Il y a quelques mois, j’ai écrit un texte sur une grève étudiante à la Faculté de médecine et de pharmacie (FMP) de l’Université d’État d’Haïti (UEH). Bêtement, j’annonçais, à cause du début des vacances d’été, la fin d’une grève étudiante qui durait depuis trois mois, les étudiants ayant d’autres choses à faire durant l’été que de ‘grèver’. Bêtement vous dites… Le bordel s’est continué tout l’été (avec la loi sur le salaire minimum et le paiement du 14ième mois) et perdure toujours. Quelques petites séances de violence ou de perturbation, l’intervention de la police nationale mais surtout, un élargissement des troubles à l’ensemble de l’UEH. Les cours n’ont pas encore repris (sauf en agronomie) et la dernière grande information sur la crise est l’intervention du Président. Il a créé un comité présidentiel afin de régler les problèmes de l’UEH. Les étudiants grévistes refusent l’intervention de ce comité en prétextant que l’UEH vient de vendre son autonomie au gouvernement. Imaginez le sérieux de l’argumentation quand cette université est une université d’État et que la presque totalité de son budget vient du gouvernement… Quand la Police nationale d’Haïti (PNH) est intervenu au cours du mois d’août pour sortir les squatteurs de la FMP, l’argument a été le même : L’UEH et la FMP venaient de s’inféoder à l’État en demandant à la PNH d’intervenir dans leurs locaux. Parmi les rumeurs qui circulent actuellement sur les grévistes, il y a celle qui veut que ce serait de faux étudiants (difficile en effet pour une université sans registraire de bien identifier ses inscrits !) payés par des politiciens intéressés à s’assurer qu’un certain bordel soit continuellement maintenu dans le pays. Le bruit et l’agitation de la foule remplissent un vide et offrent toujours des occasions de générer un dérapage que certains qualifient de ‘contrôlé’. L’animisme est même politique dans ce pays. Existent dans la tête de tous ces forces immatérielles qui tirent en permanence les ficelles d’une désorganisation. Aristide ou Baby Doc, qui sait ? Le plus significatif pour moi est l’absence d’un journalisme réellement crédible permettant aux acteurs de ramener le débat sur des bases plus tangibles. Les adversaires discourent sur les grands principes (autonomie de l’UEH, représentativité des étudiants, …) à des journalistes qui se font leur porte-voix sans aucune analyse ou vérification. Imaginez une négociation strictement appuyée sur des rumeurs et qui se déroule par médias interposés… Ajoutez à cela le fait que les ayisien sont les champions du monde d’une parole discursive et sans fin, l’idée étant d’avoir dans le discours raison sur son adversaire. On a donc droit à des débats continus depuis des semaines. Hier midi à la radio, on interrogeait un vieux professeur de l’UEH sur la question qui a simplement rappeler qu’en plus de 6 mois de déboires, il n’avait presque jamais été question de négociation et encore moins de trêve. Probablement trop concret !
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