Billet publié le 11 janvier 2009.
L’un des sujets préférés des coopérants, outre les bons restos, les meilleurs markets et les plus belles plages, est l’haïtien. Ses qualités et ses travers. Ce qui inspire et ce qui frustre, toujours, bien évidement, du point de vue de celui qui est ici pour aider. Parmi les caractéristiques mentionnées par les plus expérimentés revient souvent l’idée du marronnage. Dire oui et faire non, se faufiler, se sauver, éviter de répondre ou répondre n’importe quoi, … Comme un poisson vivant qu’on tenterait de regarder dans les yeux plus de dix secondes, les mains enduites d’huile d’olive. Sauf dans la domesticité (je raconterai un jour les déboires avec les services de câbles et d’internet !), je n’ai pas encore réellement vécu le problème. Le marronnage est bien décrit dans les manuels d’histoire d’Haïti, à l’époque de l’esclavagisme, les Nègres Marrons étaient un problème très important pour les propriétaires de plantation. Certains esclaves arrivaient à se sauver du contrôle de leur propriétaire et vivaient cacher dans les forêts. Dans le Robert, on nous dit que le marron est un esclave noir qui s’est enfui pour vivre en liberté. Ils se sauvaient donc et vivaient dans une forme de réclusion de la société haïtienne, dans des campements plus ou moins bien organisés, revenaient la nuit sur les plantations voler de la nourriture. On aurait retrouvé très longtemps après la fin de la période de l’esclavagisme des communautés complètes ou des générations n’avaient pas vécu sous la férule de l’esclavagisme. Les propriétaires qui arrivaient à les rattraper sévissaient de manière importante : ici entre autres, pace que le marronnage n’est pas qu’haïtien, on sectionnait un de leur tendon d’Achille pour éviter qu’il ne puisse fuguer de nouveau. Comme la Statue de la Liberté pour Manhattan, Ayiti a une statue qui lui sert d’emblème visuel : le Nègre Marron. L’image du nègre libre des contraintes de l’esclavagisme est très forte pour les haïtiens. Ils sont très fiers d’être le premier peuple soumis à s’être libéré du colonisateur (en 1804) bien avant les mouvements de libération du 20ième siècle. Dans la même logique aujourd’hui, un des défis des coopérants est ‘d’attraper’ un haïtien. De s’assurer que son engagement dans un projet est réel et continu. De s’assurer que sa réponse est valide et tiendra la route plus longtemps que le moment du renddez-vous. Comme si se sauver était resté jusqu’à aujourd’hui, pour plusieurs haïtiens, une dimension importante du rapport au blanc. Ou encore, comme si le développement international représentait, sous certaines de ses dimensions, la continuité moderne de l’esclavagisme. Je continuerai à prendre le temps d’y réfléchir...
1 commentaire:
Très fort comme réflexion!
Depuis que je vous lis, je me demande quel est votre travail exactement en Haïti.
Je m'intéresse à la coopération internationale et avec vos billets vous me faites beaucoup réfléchir.
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