jeudi 27 août 2009

Félicitations à Robinson

De mon île, j’ai été très heureux de lire les nouvelles sur la victoire de Robinson contre Cinar et ses comparses. Je ne ais pas trop pourquoi, mais il semble que ce soit une grande nouvelle, une très grande novelle. Elle offre au moins un vent de rafraîchissement sur la justice et les rapports entre les poches pleines et les poches vides. Pensons simplement à ceux qui ont vu leur bas de laine fondre dans les mains des courtiers en valeurs mobilières qui font la une depuis des années. On pense bien à des valeurs qui sont mobiles… Josée Boileau (Le Devoir d’aujourd’hui) note entre autres que dans son jugement, le juge a rappelé la faute d’orthographe commise par Robinson dans son synopsis et que les ‘plagieurs’ ont simplement copiée… Comment des d’affaire et leurs avocats peuvent-ils pousser le bouchon aussi loin sans démontré une ‘petite gêne' ? "Twou manti pas fon" ou tôt ou tard, la vérité finit par sortir.

mercredi 26 août 2009

Des femmes haïtiennes


Depuis notre arrivée, on trouve les haïtiens beaux, les haïtiennes belles. Les hommes sont souvent très minces et sculptés comme des body-builder sans Gold Gym. Les femmes, grosses comme minces, ont une démarche franche et sensuelle, la tête bien assises sur des épaules et une colonne qui ne font qu’une belle ligne droite, fluide et solide en même temps. Ici, les femmes font tout. C’est elles qui élèvent les enfants et bossent pour ramener un salaire à la maison. Les hommes ont souvent plusieurs enfants avec plusieurs femmes, des ‘ti menaj’ (des petits ménages) comme on dit en créole. Sauf pour celle qui a été mariée, les autres n’ont pas accès au revenu gagné par le mari. Ce sont souvent des relations connues et bien établies. On donnait une ‘rou lib’ (roue libre ou un ‘lift’ en québécois) à un haïtien avec qui je travaille et qui ne rentrait pas chez lui après le travail. Il allait voir son deuxième ménage. Peut-être son troisième ? La femme principale (la mariée), plus souvent, connait les autres conjointes du mari et toute se déroule relativement bien. Il semble toutefois que le niveau d’acceptation de cette pratique est relatif à la classe sociale : Plus les familles sont riches et éduquées, moins la pratique serait répandue et acceptée. Pour certains, c’est la clarté de la couleur de la peau qui détermine : Plus tu es pâles, moins c’est acceptable. Pour d’autres, c’est la trame culturelle : Le fond de culture africaine maintien ces pratiques alors que la culture européenne la décrie. C’est l’histoire d’Ayiti en fait ! La Ministre de la condition féminine est actuellement en cabale pour faire reconnaître légalement ces deuxième, troisième ou nième femmes qui n’ont aucun recours légal face à leur conjoint, le père des enfants. Elle essaie donc de donner à cette pratique culturellement bien établie une structure légale qui protégerait mieux les enfants et la mère qui ne sont pas du ménage principal (pour l’héritage par exemple). L’image qui se dégage des femmes haïtiennes quand on circule dans les rues, c’est celle de la force et de l’autonomie. Elles gèrent tout pour que l’espace familial ait un sens. C’est très majoritairement elles qu’on voit travailler dans les rues à vendre n’importe quoi. Qu’on voit dans les champs, les enfants dans les bras, sous les arbres d’ombre à la campagne vendre des melons ou des mangues... Notre Agence canadienne de développement international (ACDI) porte une attention particulière à l’EFH, l’égalité homme-femme. Toutes les activités que les canadiens mènent, les objectifs de développement qu’ils visent, doivent être analysés en fonction de l’EFH et de son amélioration. De la construction d’un pont au programme d’appui aux ‘colvol’ (collaboratrice volontaire) dans des zones où les services de santé ne sont pas accessibles, en passant par l’appui au développement de l’action civique, tout doit participer à l’EFH. Le plus frappant est de voir certains (et surtout certaines) partenaires haïtiens réagir à notre préoccupation toute canadienne de l’EFH. Une haïtienne me disait récemment : « Je ne sais pas si les femmes canadiennes ont des problèmes de pouvoir, mais je ne sens absolument pas que les hommes haïtiens en ont plus que moi ! »

mardi 18 août 2009

La famille Ouragan


La période des ouragans dure six mois en Haïti, de juin à novembre. Le peak est mi-août à mi septembre, là où la chaleur accumulée dans la mer permet aux petites dépressions tropicales de devenir des ouragans. Il y a un système de classification assez simple qui permet d’identifier l’intensité du personnage qui vire la maison à l’envers. Ana s’en venait vers nous mais elle s’est épuisée, peut-être a-t-elle conclue qu’il fallait nous donner un break, le bordel étant déjà bien installé. Elle serait passée durant la nuit sans étouffer même le son de mes ronflements. Peut-être que c’est moi qui lui ai fait peur ? Son collègue Bill quant à lui, ne semble pas vouloir se calmer. Il a sagement décidé de passer un peu plus loin, probablement plus assez de dégâts à faire pour que ça vaille le détour. Aux dernières nouvelles, il se dirigerait vers le Canada... Peut-être arrivera-t-il à décoiffer notre ami Harper ! Le meteomedia local est le site du National Hurricane Center (http://www.nhc.noaa.gov/). On y retrouve le portait de famille de tous les enfants, de ceux qui n’ont pas encore quitté la maison jusqu’à ceux qui ont levé les pieds de la maison depuis 1958. Des milliers de statistiques sur leur développement, les ravages que leur adolescence leur a permis de faire avant d’aller vivre leur vie d’adulte un peu pepère ailleurs. Ici, on va sur ce site à tous les jours voir les différentes prévisions associées aux tempêtes en développement ou en cours. Dimanche soir, on eu droit à une soirée d’orage mémorable, un anonyme de la famille (il y a effectivement des anonyme dans cette famille) a joué de la batterie avec au moins trois ou quatre de ses frères. Un timoun a été emporté par l’eau qui s’écoule dans les ravines. Les spots d’information à la radio nous donnent tous les trucs possibles pour se préparer aux tempêtes : Déserter les maisons trop près des ravines, déplacer les animaux qui broutent toujours trop près des ravines, avoir des provisions, des piles, des médicaments … L’une des mesures les plus importantes concerne le fait de bien fixer les toitures de taule. Y parait qu’une feuille de métal de 4 par 8 qui voyage à plus de 200 km dans les airs, ça fait une belle job.

jeudi 13 août 2009

Avoir l'air cool


Samedi soir, on a passé la soirée au Presse-Café. Petite place cool où les tables et certains murs sont tapissés de journaux plastifiés, l’effet est sympathique. Debout devant l’urinoir, tu peux lire l’article publié ici sur le retour d’exil de Benazir Butho, 250 000 partisans étaient présents pour l’acclamer. On connait la suite... Presse-Café est un restaurant qui accueille des groupes de musique certains soirs de la semaine. Comme bien des restaurants de la capitale. On était 4 blancs à 8h30 quand le groupe a commencé à jouer. Ti-Coca & Wanga-Nègès, musique haïtienne avec de fortes tendances caribéennes. Lentement, la salle s’est remplie. On a également lancé le bal en étant les premiers à aller danser. La piste a commencé à se remplir et j’ai perdu ma place assez rapidement. Jo ‘s’est fait danser’ par un haïtien, pas mal meilleur que moi. Je ne ferai pas un Dr Mailloux de moi, mais je pense que les noirs ont un petit quelque chose que nous n’avons pas : au moins une vertèbre de plus et des ligaments sûrement plus souples. Pas de sens. Ils ne bougent pas mais arrivent à projeter un rythme. Tout love subtilement, sensuellement. Comme si leur corps comportait une prise directe pour la musique. Jo m’a passé son partenaire de danse et … j’avais l’air d’un balai ! Surtout pas d’un ballet. Le gars a essayé de me donner le ‘rythm’ mais à l’impossible, nul n’est tenu. Je ne comprends simplement pas et c’est ça mon problème. Il ne faut pas essayer de comprendre, juste de sentir. Un jour je vais être meilleur et Jo n’aura plus besoin d’ayisien pour avoir le sentiment de ‘se faire danser’. Autour de la piste a traîné un timoun, 10 ans max. À minuit il était toujours là. Lui aussi avait le mouvement facile. C’est probablement génétique. Il était très intéressé par les blancs de la place qui essayaient de danser. Je pense qu’on l’amusait pas mal. En plus des talents de danseurs, il avait toutes les attitudes du gars cool et sympathique. Il s’est assis à notre table pendant un certain temps et j’ai fait la gaffe de lui offrir un jus ou un cola… Ki sak pase, mwen vle on bier (Quosse ça, je veux une bière !). Vous comprenez qu’il me manque encore pas mal de clés pour avoir l’air cool ...

vendredi 7 août 2009

H1N1

Il n’y aurait eu que six cas dans le pays dont les deux premiers dépistés dans les services de la Minustah. Là où des programmes de dépistage existent vraiment. Y parait que les médecins des casques bleu sont contents, ça changerait de leur pratique normalement axée sur la gestion des MTS. En République voisine, plus de 150 cas dont six décès. Considérant les déplacements fréquents d’un côté et de l’autre de la frontière, considérant également les milliers d’haïtiens de la diaspora qui entrent en terre natale tous les jours pour les vacances, et considérant finalement les déplacements fréquents des blancs (Minustah et aide internationale), plusieurs estiment que le nombre de cas est sûrement supérieur à ceux officiellement déclarés. Difficile en effet de penser qu’une infrastructure sanitaire comme celle d’Ayiti soit réellement en mesure d’assurer le dépistage et la prise en charge de ce genre d’épidémie. Le problème ne me semble pas lié au manque d’effort, plusieurs gestionnaires du MSPP (Ministère de la santé publique de la population) y passent des samedis complets depuis des mois. Planifier le dépistage, le mettre en place. Organiser les différents lieux de quarantaine. Former les douaniers. Doter les laboratoires des équipements et matériaux nécessaires. Former le personnel des institutions sanitaires. Acheter et stocker les médicaments. Un million de chose à faire mais une expertise limitée et des moyens qui le sont encore davantage. Petit exemple ‘bebête’ mais représentatif de la réalité du pays : Le MSPP n’a pas les ressources financières pour se procurer le papier et les cartouches d’encre afin d’imprimer les feuilles que les cie aériennes doivent distribuer aux passagers qui arrivent en Haïti. Un bailleur a déjà fourni l’imprimante, mais le stock de papier et de cartouche d’encre est épuisé. Pa gen kob (pas d’argent). Imaginez maintenant arriver à doter les institutions des ressources nécessaires aux dépistages et au traitement ! À ce problème de ressources et de manque d’organisation, s’ajoute premièrement la rareté des moyens pour maintenir une hygiène acceptable pour une très grande partie de la population. Il faut juste voir les gens profiter du moindre petit filet d’eau dans la ville pour se laver et on a tout compris. S’ajoute deuxièmement le fait qu’on retrouve plusieurs pratiques favorables à la transmission dans la culture populaire. Les ayatollahs de la santé publique auraient des boutons ! Les aysien se voient, se touchent, se parlent, s’embrassent. J’ai déjà écrit sur ce blogue que les haïtiens vivent dans la rue. Comme les vieux qui circulent au centre d’achat pour rencontrer d’autres vieux. Pour discuter de ce qui a été et de ce qui sera. Les ayitiens sont toujours en conversation avec quelqu’un sur cette rue. Tu entends dix personnes s’enguirlander sur Préval, le parti Lavalas, la supériorité du Brésil sur l’Argentine (au foot), le salaire minimum ou sur l’avenir de leur petit pays. C’est partout. Les chauffeurs dans la cour du bureau, les deux gardiens de sécurité à la banque, dans le tap-tap, autour du BBQ sur le trottoir, à la plage, … On discute, on échange, on se choque, mais surtout, on se serre la main. On se tient la main. On se touche. Sur la rue, on voit deux hommes marcher main dans la main. Je n’ai jamais serré autant de mains et fait autant d’accolades de toute ma vie entière. Vous n’avez pas idée. Le matin, je rentre au travail et croise Thony (administrateur de notre projet), on se serre la main et tapote l’épaule. Je me rends à son bureau 30 minutes plus tard pour discuter avec lui, on se prend les mains et on discutera pendant une minute sans que nos mains se soient dessoudées. L’occasion de nous tapoter les mains se répétera plusieurs fois dans la journée. Ajouter à cela les chauffeurs, les garçons de cours, l’informaticien, les visiteurs, … Le contexte idéal donc pour voir la grippe H1N1 se répandre comme une traînée de poudre. Vous pouvez être assuré que les messages aseptisant de la santé publique ne serviront à rien. Si éviter de faciliter la circulation des germes implique que nous ne touchions plus, que nous nous parlions plus, au diable le H1N1.

mardi 4 août 2009

Îles Turques et Caïques


L’expression utilisée ici en Ayiti mélange le français et l’Anglais : les Îles Turk et Caïcos. Le paradis sur terre selon des aysien prêts à mourir pour s’y rendre. Encore quelques dizaines de mes nouveaux concitoyens sont morts noyés pendant la traversée vers le bonheur. Entre 60 et 90 haïtiens perdues dans l’aventure. Les chiffres varient, la clandestinité du moyen de transport et de la démarche migratoire rend impossible d’identifier une donnée valide. Ce genre d’événements est monnaie courante depuis notre arrivée. Plus souvent toutefois, on ne parle pas d’un nombre de personnes aussi significatif. Les Îles Turks et Caïcos sont un archipel Britanique d’une trentaine d’îles entre Haïti et les Bahamas, en route vers la Floride. Le Courrier international nous informe que ce territoire britannique d’outre-mer a connu de petits rebondissements politiques dans les derniers mois à cause de problème de corruption. Sur Wikipedia, on apprend qu’en 2004, le Canada avait fait quelques démarches pour intégrer l’archipel dans la confédération canadienne. De Kujuak aux Îles Turk et Caïcos, vraiment le pluss beau pays du monde ! Ils sont moins de 40 000 personnes à vivre sur ces îles, principalement du commerce offshore. Les haïtiens se déplacent beaucoup sur ces îles pour passer plus tard aux Bahamas, en Jamaïque ou directement en Floride. Les escales et le voyage maritime ont toujours fait bon ménage. Outre les morts et les 120 survivants à rapatrier en Haïti, le gouvernement Préval a quelques problèmes sur les bras. Les brookers de ‘places pour le bonheur’ sont légions, souvent associés à des réseaux criminels bien installés aux USA. L’industrie est hautement rentable, les ayisien paient chère le voyage et les coûts d’exploitation pour les réseaux sont minimes (coûts d’exploitation, c’est une tentative de jeu de mot !). L’autre problème que cette situation pose concerne la décision d’Obhama au sujet des haïtiens illégaux vivant aux USA. Bush avait refusé de gracier plus de 30 000 haïtiens porteurs d’un avis d’extradition vers leur pays d’origine. Si au début de son mandat le président américain avait ouvert la porte et était préoccupé de la dimension humanitaire du retour en Haïti de ces personnes, le genre d’événement des derniers jours pourrait l’amener à se montrer plus prudent selon plusieurs commentateurs haïtiens. Déjà durant le week-end, il a clairement montré que la température de l’eau s’était refroidie. La crainte américaines est de voir cette ouverture éventuelle d’Obhama représente un carton d’invitation pour ses 48 ans !