En septembre 2010, je faisais un billet sur
le relativisme en me servant de la sécurité au travail comme illustrateur (http://jeanfrancoislabadie.blogspot.com/2010/09/le-gars-de-la-csst.html
). Ce samedi, j’ai eu une autre occasion de tester cette dimension de l’interculturel,
cette fois-ci, il y avait en plus une question de sécurité publique. Sur la
route de Kenscoff, à la hauteur de Thomassin 32, on pouvait observer cet
acrobate au bout d’un arbre (une soixantaine de pieds dans les airs, près de 20
mètres). Regarder bien la vidéo, vous verrez au bout de l’arbre le
consciencieux bucheron armé de sa machette s’atteler à descendre ce majestueux
pyebwa (lire pied bois). Au moins, il coupe la branche du dessus !! Bien
évidemment, pas besoin d’être attaché. Pas nécessaire également de s’assurer,
en bas, que personne ne se trouvera sur la trajectoire de la chute. Encore
moins de se demander si dans sa descente, la branche pourrait couper certains
fils électriques et donc, éventuellement, électrocuter des passants ou priver
d’électricité tout le reste des zones sur la route de Kenscoff. C’est un peu
comme conduire au son : quand ça fait boum, tu freines… Heureusement, pas
de dégât, du moins pour le bout d’épisode que nous avons regardé. Même après
plus de 4 ans dans ce pays, je demeure toujours aussi impressionné qu’il n’y
ait pas plus de personnes estropiées, même si en fait c’est probablement l’un
des principaux problèmes de santé publique. Et bien évidemment, cette prise de
risque n’émeut personne sauf le blanc que je suis, élevé dans cet environnement
contrôlé qu’est un pays dit développé. À la radio de RFI ce matin, j’écoutais
un reportage sur les égouts de Paris. Selon le journaliste, on y organiserait
des visites tout aussi intéressantes que démystifiantes sur cet environnement
hautement hostile. L’égoutier interviewé raconte comment les législations des
dernières décennies ont permis d’éliminer presque tous les risques professionnels auxquels lui et ses collègues étaient confrontés.
On en vient à rêver que la vie des haïtiens soit traitée comme les égouts de Paris
!
lundi 27 mai 2013
mardi 14 mai 2013
Redonner vie à Aristide
Ceux qui sont abonnés au compte Twitter du
président ont aujourd’hui été inondés de tweets (on doit approcher la centaine).
J’ai même reçu un appel automatisé où il vantait les réalisations de son
gouvernement, ainsi qu’une invitation par SMS pour le rejoindre cet après-midi
au Champs de Mars. C'est sans compter les rues de PAP qui sont décorées des affiches/banderoles soulignant les bienfaits du gouvernement Martelly/Lamothe. Parce que c’est l’objectif de communication du président,
souligner les bons coups de ses 2 ans à la présidence d’Haïti question de
parler plus fort que ses détracteurs. Ajouter à cela les odeurs naissantes d'une campagne électorale, on comprend que la partie communication de la guerre est lancée. Je n’ai pas lu tous les tweets (je
travaille quand même !) mais on peut facilement s’imaginer que les opposants qui
veulent critiquer son action trouveront assez de ‘poignées’ pour le mettre en
valise. En politique, c’est de bonne guerre. En politique en fait, c’est la
guerre, une guerre renouvelée la semaine dernière avec le passage d’Aristide au
parquet (il a été convoqué comme témoin dans l’histoire du meurtre d’un
animateur de radio et du gardien de sécurité de sa station qui a lieu il y a
plus de dix ans). L’ex-président – dont tout le monde ici estime qu’il jouit
toujours d’une très grande popularité auprès de la population – a profité de
cette convocation pour relancer la machine de son parti pour les prochaines
élections. Au plan tactique, l’anglicisme ‘une
fenêtre d’opportunité’ apparaît, au minimum, comme un euphémisme. Le
convoquer au parquet lui a offert une occasion en or de refaire surface
publiquement, un long cortège de policiers et de fanatiques a fait le trajet
aller-retour entre Tabarre et le centre-ville, une ville en arrêt pendant presqu’une
journée (les UN avaient fermé certains de leurs bureaux par crainte des
débordements), tous les médias obnubilés par l’évènement. Je vous le dis, un
grand hit au plan des communications pour le parti exclus des deux dernières
élections, et un chef qui était resté muet depuis deux ans. Le lendemain,
l’homme a lu devant les médias un communiqué (un communiqué haïtien, donc de 40
minutes) dans lequel il a très clairement rouvert les hostilités politiques. Il
a promis une renaissance de son parti avec des centaines de victoires pour son équipe
(plus de 600 postes électifs lors du prochain scrutin). La chose qui m’a le
plus frappé dans son discours, et j’avoue ne pas avoir vu de commentaires à cet
effet, est l’utilisation de la vieille division de la couleur de peau pour mobiliser ses
troupes et annoncer la ‘couleur’ de sa politique. Je parle bien ici de ces
nuances de blancs-à-noir qui jugulent l’histoire politico-sociale du pays : La grande majorité de la population pauvre et noir, contre la minorité mulâtre/blanc riche et dominante. La
lutte des classes sur le plateau des divisions ... ‘raciales’. Il y a toutes
sortes d’histories (plus ou moins objectivées) concernant les appels de
l’ex-président pour que les noirs de ce pays reprennent aux blancs (ne pas
comprendre les étrangers) ce qui leur a été volés, ou encore ce à quoi on leur
avait jamais donné accès. L’histoire du supplice du Père Lebrun par exemple.
Martelly est très souvent critiqué pour sa pseudo trop grande ‘proximité’ avec
les pouvoirs judiciaires et dès que la convocation d’Aristide a été connue, ils
sont nombreux à avoir associé cette démarche du juge comme le prolongement
direct de l’action du président. À voir comment les choses évoluent, peut-être
qu’Aristide et son parti estiment aujourd’hui que la plus grande réalisation de
Martelly aura été de leur redonner vie ?
Inscription à :
Articles (Atom)