vendredi 31 décembre 2010

Bonne année !

Bonne année à toutes les Asefi et tous les Cetout de ce petit pays !! !

Annus horribilis


C'est la reine d'Angleterre qui utilisait cette expression pour décrire l'année 'de cul' qu'avait été 1992 pour son royaume. Il parait que ça se divorçait à qui mieux mieux dans sa famille. Pour Haïti, pas besoin d'un bilan supplémentaire pour comprendre que ce fut annus horribilis (une année horrible), des professionnels sont payés pour le faire dans tous les médias du monde. De Rome, on attrape les chaînes d'information continue de plusieurs pays et outre la langue, les images et histoires sur Haïti se ressemblent. En plus qu'on a passé l'année à produire des milliers de bilans sur Haïti. Dès le 13 janvier, chaque jour apportait son bilan du nombre de morts, de blessés, de maisons détruites, de déplacés …. Même genre de pratiques depuis octobre dernier, on a des bilans journaliers du nombre de personnes touchées par le choléra, les morts à l'hôpital ou dans la communauté, les personnes atteintes, les hospitalisations… Pour les élections, on est toujours dans l'exercice de faire le bilan des fraudes, des résultats et des manifestations. Non, ce qui m'intéresse aujourd'hui ne concerne pas les bilans, mais plutôt certains éléments d'analyse, question de porter un éclairage léger sur ce qui va se passer dans les prochains mois. Je qualifie l'éclairage de léger, question de rappeler à tous que je n'ai pas encore saisi l'insaisissable.

Première question : Les brisures tiendront-elles le coup ? Ou plus concrètement, allons-nous être confrontés à une crise qui servirait d'illustration des énormes fractures sociales haïtiennes et qui, au lieu de les colmater afin d'aider la population à sortir des débris, empirerait davantage la situation ? Vincent Marissal, un chroniqueur de La Presse qui est passé chez nous dans les jours qui ont suivi bagay la et revenu travailler à PAP dans les mois qui ont suivi, illustre de belle façon cette brisure. Il parle de "la déconnexion entre une élite surscolarisée qui rêve de grandes réformes et un peuple qui survit au désespoir grâce à un mélange de foi aveugle en Dieu, de fatalisme bien naturel et d'humour bon enfant." L'enjeu ici est que le tremblement de terre a modifié l'équilibre en générant des attentes dans la tête de cette partie désespérée du peuple, si ce n'est pas en générant des rêves. Et que ces mêmes désespérées voient entrer les milliers de nouveaux 4X4 neufs qui engorgent encore davantage les rues. Il faut percevoir dans cette première brisure l'effet levier auquel l'élite a accès via l'appui de la communauté internationale. En fait, il faut comprendre comment les organisations d'aide et de développement participent à creuser davantage cet écart au sein de la population. Économiquement, la réponse apparait simple. Il faudrait en effet qu'un jour, des économistes se penchent sur l'impact de notre présence sur l'exclusion économique d'une portion significative de la population haïtienne. Je ne parle pas ici uniquement de ceux qui sont les pauvres des pauvres, mais entre autres de cette classe dite moyenne qui vit dans les camps et qui travaille (un juge qui gagne 400$US par mois et qui a perdu sa maison le 12 janvier par exemple), mais qui n'arrive pas à se maintenir la tête hors de l'eau quand le coût de la vie explose par notre simple présence dans le marché (coût de logements, des voitures, de la nourriture, des biens qui font qu'une maison est une maison …). Notre pression à la hausse rend l'équation impossible. Comment réussiront-ils à gérer cet écart qui a été aggravé par bagay la et ses suites ? Comment tenir le couvercle de la marmite des attentes et des frustrations de ces millions de personnes sur la voie de garage ?

La deuxième question s'inscrit dans la continuité de la première mais s'intéresse davantage à la jeunesse haïtienne. Plus de 50% de la population haïtienne a moins de 18 ans selon des chiffres de 2009 (au Québec, les moins de 18 ans correspondent à près de 20% de la population), c'est du 'monde à messe' comme on dit chez nous. C'est cette jeunesse qu'on a vu dans les rues (surtout des hommes) pour appuyer Martelly. Un réseau d'éducation supérieure qui ne peut livrer la marchandise, un marché de l'emploi qui n'offre pas beaucoup d'espoir et une présence internationale qui s'étire et sent la tutelle. Ajouter une épidémie de choléra (qui n'est pas encore à son pic selon tous les experts) pour instrumentaliser toutes ces frustrations, et les quelques animateurs de radio 'populistes' du pays qui attirent aisément ces jeunes ont la partie facile. Qu'est-ce qu'on a à offrir à ces jeunes affamés ? À moins jeune et affamé correspondent à un pléonasme….

Troisième question, comment les élites haïtiennes arriveront-elles à transformer l'éloquence et la poésie de leurs discours en des choses concrètes pour la population ? Les événements des 12 derniers mois ont confirmé les grandes difficultés de l'État à assumer une bonne part de ses responsabilités. Tout le monde se rappelle, avec un petit sourire, des déclarations du Premier Ministre entourant la reconstruction ou encore celles de Manigat au sujet de l'imbroglio électoral : Le problème est haïtien et les solutions devront être haïtiennes… Sur le principe, personne ne peut questionner ce genre d'appel patriotique. Sauf que je ne crois pas que ce discours passe le test de la réalité mais surtout, je croise des dizaines d'haïtiens qui n'y croient pas !! À comprendre le rôle de la communauté internationale dans la réalité historique et contemporaine du pays, peut-on réalistement conclure que le problème et les solutions ne sont qu'haïtiens ? On n'a qu'à constater les contradictions actuelles entre le climat 'ONG-bashing' qui prévaut dans l'arène politique, et la reconnaissance par le Ministre de la santé de l'incapacité du pays de faire face à la crise du choléra, pour conclure qu'on devra sortir du discours simpliste (pour ne pas dire dogmatique) qui prévaut auprès de certaines élites politiques haïtiennes et comprendre que malheureusement, ni le problème ni les solutions ne pourront être qu'haïtiens. Comment ces élites politique pourront établir avec la communauté internationale un nouveau mode de collaboration où le bien-être et le développement de la population seront au centre de l'agenda ?

Dernière question : Est-ce que nous, de la communauté internationale, serons enfin en mesure d'ajuster nos flûtes pour minimalement donner l'impression de jouer les mêmes airs, ou au mieux, d'intervenir de manière cohérente ? Merci de ne pas répondre à cette question …

Bonne année 2011 !!

jeudi 30 décembre 2010

J'ai manqué le Pape


J'oubliais de vous raconter que j'ai manqué le Pape. Je suis arrivé sur la Place Saint-Pierre (pas tout à fait le même genre que la Place Saint-Pierre de Petion-Ville !!!) et il quittait la fenêtre à partir de laquelle il s'adresse aux foules. Je l'ai vu faire sa dernière salutation et n'ai même pas eu le temps de le capter avec mon kodak… Je pense donc que je ne pourrai pas avoir comme souhaité avoir un petit entretien avec lui. J'avais tellement de choses à lui raconter pour mes amis haïtiens. J'imagine qu'il lit les journaux et sait ce qui s'y passe, il interviendra en conséquence auprès de 'on sait qui'.

mercredi 29 décembre 2010

Les italiens en moins ...


À chaque fois que je quitte PAP, ce rappelle toujours à moi les réalités de l'immigration. À PAP, une grande ville de près de 3 millions de personnes, on ne croise 'jamais' la réalité de l'immigration. Il y a peut-être quelques freaks arrivés en Haïti il y a plusieurs années et qui s'y sont installés. Je ne crois toutefois pas qu'ils en sont arrivés à pousser la logique migratoire jusqu'à obtenir la citoyenneté haïtienne. Dans les rues de PAP donc, on ne croise pas de chinois, pakistanais, français, mexicains, … Je ne parle pas ici de ceux qui portent u casque bleu ou qui comme moi sont envoyés en Ayiti dans des projets de développement ou d'aide, mais de personnes qui feraient le choix de quitter leur pays pour migrer. Il faut dire qu'on migre généralement (à moins qu'on se retrouve en situation de réfugiés) pour améliorer son sort et qu'à ce titre, Haïti est davantage un producteur d'émigrants que d'immigrants. Ici à Rome, on observe les mêmes phénomènes que ceux que l'on peut constater à Montréal. On voit les immigrants dans plusieurs secteurs comme la restauration (les spécialités culinaires s'exporte), le taxi, la vente des produits 'bas de gamme' sur la rue ou les travailleurs des marchés publiques. Dans les rues très touristiques de Rome, on retrouve ces africains qui trainent sur leur dos une poche de Père-Noël remplie de matériel copié des grandes marques (sacs-à-main, montres, …). Des migrants des pays de l'Asie du Nord ou du nord de l'Afrique qui vendent des légumes, des viandes ou des poissons au marché où je vais faire les courses le matin. En fait, ce marché ressemble comme deux gouttes d'eau à celui du marché Jean-Talon, les italiens en moins …

mardi 28 décembre 2010

Quand le café fume pour personne


Au Québec, comme en Amérique du Nord de manière générale, le café est tellement chaud qu'il fume. Comme la soupe, le principe du café est le réconfort, la grosse tasse que l'on prend à deux mains pour se réchauffer, pour lire lentement le journal ou pour piquer une bonne (longue) jasette. Les publicitaires ont bien saisi (ou créé ?) ce rapport au café que les québécois affectionnent. Ici à Rome, le café est rapide, express. On s'arête deux minutes dans un café, debout au comptoir on 'avale' le contenu de la tasse dont l'anse peut être tenue seulement entre l'index et le pouce. Le café est presque toujours sublime, un Cafe Italia (rue Saint-Laurent à Montréal) à tous les coins de rue. En fait, c'est probablement les italiens de Ferrari qui ont inventé la logique du pit stop dans les courses de 'chars'. Prendre un café se fait sensiblement dans les mêmes temps que de changer les 4 pneus d'un bolide lors d'un grand prix. Je ne suis pas amateur de course de 'chars', mais pour le café … Le défi pour les néophytes comme nous est de 'spoter' les attrapes-touristes. Au coin de la rue où on a déniché l'appartement, il y a un petit café qui nous sert le tout (un espresso pour moi et un cappuccino pour Jo) pour 1 euro 90. Quelques coins de rue plus loin aux abords de la Basilique Santa-Maria-Maggiore, on boit les mêmes cafés pou 1 euro 80. Le meilleur spot selon l'addict de l'espresso que je suis. Au détour de notre errance dans les rues de Rome, on fait régulièrement le genre de petit arrêt au puit (il faut changer les pneus…) dans des restos qui, de l'extérieur ou suite à un regard curieux par la fenêtre, nous inspire. Le tout se fait souvent tellement vite qu'on ne regarde pas les prix (pas toujours bien indiqué soit dit 'aux passants'…). On a donc bu les mêmes liquides pour 5 euro 30 et, il y a quelques jours jours, pour 9 euro 20. Rien que ça ?! Si au moins l'expérience avait été 5 fois plus intense… Il y a des cafés qui méritent de fumer pour personne.

vendredi 24 décembre 2010

Niaisage sur le net


Il pleut des cordes ici à Rome aujourd'hui. On se demande encore si on se rendra voir la messe que le Pape prononcera ce soir. La messe de Noël, appelée la messe de minuit au Qc, n'a malheureusement pas laissé beaucoup de souvenirs dans mon esprit. Sauf cette video de Rock-et-Belles-Oreilles (http://www.youtube.com/watch?v=jGKS9Lvxffg). Le 'Combien t'es vends tes crayons ?' restera gravé dans ma mémoire jusqu'à l'arrivée de la maladie d'alzheimer. Pour un passe-temps un peu plus sérieux (quoique ...), allez visiter ce site de Google qui répertorie les activités de recherche au cours de la dernière année (http://www.google.com/intl/en/press/zeitgeist2010/). En fonction de la période de l'année, des pays, ... c'est assez fascinant.

jeudi 23 décembre 2010

Guerre de chiffres


Pendant que l'OEA et les politiciens se disputent sur les résultats de l'élection du 28 novembre dernier, d'autres font de même au sujet du choléra en Haïti. Cette bataille, qui se vivait dans le petit monde de la gestion de la maladie, a pris sa place dans les médias. Selon les données du MSPP, il y a maintenant plus de 2 500 morts. L'ONU estime qu'il faut multiplier les chiffres officiels par 2. Un médecin suisse estime quant à lui qu'il faut multiplier le nombre (de décès ou de personnes infectées) par dix… 25 000 morts au lieu des 2 500 annoncés. J'avais entendu de personnes de l'interne qui estimaient qu'il faudrait multiplier les chiffres officiels par six pour avoir une idée un peu plus réaliste de la situation. Deux éléments sont mises en cause pour expliquer l'incapacité actuelle de tirer un portrait juste. Premièrement, plusieurs doutent de la capacité du système publique haïtien de gérer adéquatement la compilation des données sur la maladie (de la saisie à l'analyse). En deuxième, on sait que dans des zones éloignées (ou où les soins ne sont pas accessibles), des gens meurent sans jamais avoir été clairement diagnostiqués. Mortes dans le village ou sur la route qui mène au centre de santé, ces personnes seront enterrées sans jamais être répertoriées. Dans une dynamique assez pessimiste, un des dirigeants du MSPP me disait 24 heures avant la confirmation de la maladie, qu'on pouvait s'attendre à une crise plus dévastatrice que le tremblement de terre. La nouvelle des dernières heures et le changement d'attitude du Ministre qui reconnaît que l'État n'est pas en mesure de faire face à la situation. Après plus de deux mois de collaborations conflictuelles entre le Ministère et les organisations internationales dans la gestion de cette crise, il faut maintenant souhaiter que l'organisation de la prise en charge de la crise serve mieux la population.

mardi 21 décembre 2010

Déglacage


En direct à la télé française, Gagbo explique qu'il est légalement le président dument élu de la Côte-d'Ivoire et que pour calmer le jeu, et la communauté internationale qui rejette sa victoire, il propose une commission 'internationale' qui réviserait les résultats. Louchachenko en Biélorussie qui gagne une autre fois ses élections (le choix de l'expression 'ses' élections est conscient) alors que l'Europe se demande s'ils vont ou non lui offrir le 3 milliards d'aide prévu en cas d'élections 'propres'. Je me rappelle les deux victoires 'avec suspense' de Georges W. Bush, … Au lieu de ce charabia, j'ai choisi les crevettes sautées déglacées au balsamique et les pâtes au pesto de basilic. Le vin de la région de la Sardaigne ne valait toutefois pas le prix payé, tellement qu'il va passer la nuit sur le comptoir et servir pour déglacer un fond de quelque chose demain soir. Pendant que j'écris ces lignes (merci de ne pas les qualifier …), je me demandais quel vin arriverait à déglacer ces farces démocratiques à laquelle trop de peuples s'évertuent à participer. À moins que ce ne soit du vinaigre !

Pourquoi ?


Pourquoi Haïti est la preuve de l'inefficacité de l'aide internationale ? La preuve !? OK, une preuve disons... Aller lire cet article (lien) ou celui-ci (lien), ça éclaire certaines pistes de réflexions.

dimanche 19 décembre 2010

On fait quoi maintenant ?


Je ne parle pas de nos vacances, perdre son temps à profiter de la vie est une activité dans laquelle j'excelle. De ce point de vue, tout se passe à merveille depuis deux semaines. Non, je pense à ce qui se passe (ou ne se passe pas) en Haïti. J'étais en contact avec une collègue haïtienne hier et elle me disait que tout le monde était dans l'attente de ce qu'il se passe quelque chose. Pour le moment, c'est l'impasse dans l'impasse. Comme le tremblement de terre a été la catastrophe dans la catastrophe. Martelly, Manigat et Célestin, ceux qui ont la capacité réelle de débloquer la situation, se sont bien installés dans leur position inacceptable pour leurs adversaires. Pour redonner un peu de crédibilité à l'exercice démocratique, le Président se tourne vers la communauté internationale qui bégaie, toussote. Le CEP remet la diffusion des résultats définitifs prévue pour lundi prochain. La seule chose sur laquelle tout le monde semble s'entendre, c'est la nécessité du départ de Préval. Et maintenant, il reste quoi comme option ? Dans les journaux ou sur le net, plusieurs parlent de placer le pays sous tutelle. Dans les faits, cette tutelle formaliserait un état de fait, peut-être que la 'clarté' de cette tutelle améliorerait les choses ? Peut-être… Laissez-moi douter de la capacité de cette communauté internationale 'anti-coordination et incoordonable' de donner un peu de sens au fonctionnement de l'État haïtien, pour que la population perçoive une différence du moins. Sans compter que la tutelle pourrait foutre le pays dans un beau bordel. Ils sont déjà nombreux à demander le départ des UN, 'les ceuz' qui ont jeté le choléra dans la soupe. Une coalition gouvernementale crée par les partis politiques haïtiens. Dirigée par qui ? Qui fonctionnerait comment ? Peut-on penser que les milliards promis pour la reconstruction arriveraient rapidement avec ce genre de coalition où la stabilité demeure un risque? Disons qu'en tentant de regarder devant, pas besoin d'être gravement presbyte pour tomber dans noirceur. Un autre billet sur la vision, ou sur la cécité en fait !

vendredi 17 décembre 2010

Il a neigé à ...


Ferland chantait 'Il a neigé à Port-au-Prince…', c'était sûrement une vision (dans le sens visionnaire) des perturbations climatiques que notre chère planète allait subir. Non, il a neigé à Rome. Il paraît que c'est assez rare, tout le monde était pas mal énervé. On fait des photos avec le téléphone cellulaire, on sort dehors pour avaler des flocons ou les récupérer dans ses mains. Les enfants qui jouaient dans une cour d'école me semblaient particulièrement bruyants. J'ai moi aussi essayé de capter des flocons avec mon kodak, mais disons que ce n'est pas très réussi. Même le Fatiguant (appellation contrôle pour le Vatican) semblait dans la brume. Même si je suis un gars d'hiver, je n'ai quand même pas vu neiger depuis deux ans ! Ça fait un petit quelque chose.

jeudi 16 décembre 2010

Clichés


J'ai croqué ce cliché hier en fin de journée. Une image qui aurait pu être prise il y a des décennies, peut-être toujours à l'époque du noir et blanc. Jeune prêtre tout à fait de son temps qui représente une image coulée dans une autre époque. Plus ça change, plus c'est pareil. Les rues de Rome sont remplies de ces jeunes hommes et femmes qui choisissent activement la religion et qui affichent leur choix. Images surprenantes pour un québécois qui a vu sa société foutre aux poubelles tous ces artefacts et les pratiques associées dans le tournant des années 60. Le seul moment où on peut voir de jeunes religieux dans les rues de Montréal, c'est le soir de l'Halloween ! Ici, c'est un déguisement au même titre que le 'veston-cravate' et la Audi. Les clichés sont les mêmes. Tout ça en pleine période de christianophobie selon le Pape, d'islamophobie selon un Imam français, ... Plus ça change, plus c'est pareil.

mercredi 15 décembre 2010

Bof


Cet homme statufié attend là depuis trop d'années pour que ce soit pertinent de trouver sur le net une réponse plus précise. Comme tous ces haïtiens qui attendent qu'il se passe quelque chose. Disons que pour la sortie de crise actuelle, les propositions manquent de tonus ou de pertinence (à moins que ce ne soit les deux !?) pour laisser entrevoir un filet de lumière. Il pleut en Haïti depuis deux jours … Martelly qui propose un deuxième tour à 18 (ou 19 ?) et qu'une majorité simple (on ne parle plus ici de majorité absolue) s'exprime sur le choix d'un ou d'une présidence. Imaginez la suite avec un ou une gagnante avec 25% d'appui et deux chambres contrôlées par l'Initie… L'accroc à la constitution est un détail comme le fait de reconstituer un CEP pour l'exercice. Comme si personne n'était assis à la présidence depuis 5 ans. Célestin quant à lui sort d'une torpeur qui n'est peut-être pas la sienne pour nous annoncer que le recomptage est nécessaire, il passerait de 22,5% des appuis à 52 ou 54% des appuis selon l'estimation de son parti. Plus besoin de deuxième tour dans leur esprit. La CE qui propose un deuxième tour à trois alors que le Canada et les EU s'impatientent et fomentent les menaces. Pendant ce temps là en République Dominicaine, la quatrième rencontre de la CIRH tourne au vinaigre (http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=86728&PubDate=2010-12-14). Est-ce qu'il y a une crise politique, eu une élection frauduleuse, eu un tremblement de terre, a une épidémie de choléra qui est seulement à la période bourgeonnement ? Est-ce qu'il y aura un deuxième tour à mettre en forme pour le 16 janvier prochain ? Une période des fêtes qui, même sous le soleil des caraïbes, gèle les activités de l'État ? Bof !!

mardi 14 décembre 2010

Manifestatione


Même à Rome, les gens manifestent. Ce matin, les hélicoptères tournaient autour de l'édifice où on loge. Juste au coin, on a pris la rue avec les manifestants pour sentir l'atmosphère, faire des photos. Autour de nous, des groupes d'étudiants qui se calculent sûrement pas quelques dizaines de milliers. Certains jeunes anarchistes se mêlaient à la foule, mais tout était calme, sympathique même. On a quitté la manif quand les groupes de 'carabinieri' faisaient sentir davantage leur présence. On comprendra en rentrant que Berlusconi a gagné le vote qui l'avait installé au bout de la planche, et que la manifestatione s'est terminée dans la violence. Pourtant, tout était si sympathique en début de journée...

lundi 13 décembre 2010

Petit


La vie est faite de bonheurs qui se doivent de rester petits… C’est ce qu’un vieux sage haïtien édenté m’a dit. Même son haleine sentait le bonheur. Je l’ai cru, moi qui pensais ne pas croire.

dimanche 12 décembre 2010

Tout un couple


Je Skypais avec Cetout, il s'ennuie de moi …
- Pas du tout, c'est toi qui m'a téléphoné !
- C'est vrai…
- Ta rencontre avec le Pape a eu lieu ?
- Pas encore. Il ne semble pas vite sur le courriel. J'ai cherché en vain son adresse sur Skype. Je vais aller sonner chez lui ce matin, c'est dimanche, il travaille sûrement.
- Tu ne m'as pas Skypé pour me raconter des niaiseries. J'imagine que tu voulais entendre parler d'Ayiti et de la crise des élections.
- Entendre parler, pas tout à fait. On n'est bien servi sur les sites de nouvelles ici et le net fonctionne à merveille. Je voulais te parler parce que j'ai eu un flash en voyant des mariés se faire photographier au Monument de Vittorio Emanuele II. Pourquoi Martelly et Manigat ne s'assoient pas pour sortir de la crise ?
- T'es certain que tu n'abuses pas de l'espresso !?
- C'est simple, c'est toi-même qui m'a raconté que l'histoire politique de ton pays était un fiasco parce que tous les présidents n'avaient jamais réussi à sortir de la division. Que vos 150 partis, c'est le résultat de l'individualisme ambiant qui pourrit votre espace politique. Imagine, lui est capable de mobiliser les foules alors qu'il n'a aucune compétence ni aucun programme, elle a l'expérience et l'expertise. Elle conserve la présidence et lui assure le poste de Premier Ministre. Dans cinq ans il devient Président. Martelly fait campagne auprès de Manigat pour le deuxième tour. À deux, Célestin fait strictement acte de présence et ils s'en sortent avec un appui massif. Les conditions essentielles pour lancer le fameux 'changement' auquel le couple fait constamment référence. Ils ont une belle occasion de montrer concrètement qu'ils sont près à faire la politique haïtienne autrement, pour mettre en oeuvre ce changement.
- Vraiment, les vacances ne te font pas !!! Je ne pense pas que la culture politique permette ce genre de manoeuvre.
- La culture, c'est justement faite pour changer.
- Tu règles comment le problème 'CEP' ?
- En fait, une telle stratégie a pour effet de débloquer la situation actuelle. On se lance tout de suite dans le deuxième tour. Le défi du prochain tour est de contrôler le CEP. Premièrement, tu mobilises la population pour sortir l'Inite, Préval et son futur gendre. Plus le taux de participation est élevé, moins les risques de fraudes sont grands. Deuxièmement, tu profites du ras-le-bol de la communauté internationale pour en les invitant à s'impliquer davantage dans la mécanique de l'affaire. les chances de sortir plus solidement d'un deuxième tour sont grandes.
- Et l'Inite ?
- Pa gen pwoblem… C'est un parti que Préval a créé il n'y a pas deux ans en achetant tout le monde selon les rumeurs. Devant une déconfiture générale pour leur candidat à la présidence et certains postes pour des sénateurs et des députés, Manigat et Martelly peuvent induire les rapports de force nécessaires au ralliement.
- Les 12 autres partis qui demandent l'annulation des élections ?
- Face au raz-de-marée Manigat-Martelly, tout le monde jouerait low profile.
- Ça ne marche pas ton affaire !
- Pourquoi ?
- Parce que c'est trop simple, trop clair ou trop évident. T'a pas encore compris la complexité de la réalité culturelle et politique haïtienne, il ne faut pas que les choses se passent bien, simplement. Rien ne doit être comme un long fleuve tranquille.
- Je ne dis pas que ce sera simple, mais c'est le genre de mariage de raison qui pourrait permettre de sortir du gouffre actuel et, on ne sait jamais, relancer le pays sur de nouvelles bases politiques.
- Je ne sais plus si c'est que tu ne comprends pas, ou si t'es simplement naïf.
- J'avoue que je préfère naïf...

samedi 11 décembre 2010

Décalage horaire


C'est un drôle de phénomène que celui du décalage horaire. Je ne parle pas du mouvement de la planète, je parle de ce 'centrisme' qui nous amène à perdre la perspective que les autres ne sont pas à la même heure, à la même page. Quand je me couche, c'est la fin de l'après-mdi en Ayiti, les grosses nouvelles ne sont pas encore publiées et mes amis-collègues n'ont pas terminé leur journée. Pour dire vrai, ils ont passé les 3 derniers jours à la maison, il pleut des cailloux, ce n'est pas très bon pour les carrosseries. La journée commence ici quand en Ayiti tout le monde dort profondément. Au lever, on a accès aux nouvelles de la veille. J'apprends que Martelly et Manigat ne participeront pas à l'exercice de recomptage proposé par le CEP… Attendons que les résultats commencent à émerger, il est toujours temps de changer d'idée. Rappelons-nous le passage du 28 au 29 novembre ! Il faut fouiner quelques heures sur le site du CEP où des résultats assez détaillés sont présentés pour arriver à tirer quelques conclusions éclairantes de ces milliers de documents disponibles. Dans la ville de Jacmel par exemple, on constate (ça mérite sûrement une validation) que seulement 8 des 39 PV ont été comptabilisés, dans la ville du Cap-Haïtien, on a comptabilisé 51 des 53 des PV. Qui fait ces analyses grossières et simplistes pour donner quelques nuances de gris dans l'analyse binaire qui prévaut actuellement ? Quelle est la proportion exacte des PV non calculés ? Comment cette proportion varie d'un département à l'autre ? D'une commune à l'autre ? Peut-on identifier les bureaux de vote les plus 'délinquants' ? Quelle était la répartition des votes dans ces bureaux de vote ? Parmi les PV que Martelly a entre les mains depuis le 29 novembre et qui lui permettent de se déclarer vainqueur, combien ont été rejetés ? Rejetés par qui : l'équipe responsable de la fabulation ou par le CEP ? Quel est le rôle de la communauté internationale (fort présente au centre de fabulation) et celui du CEP dans la diffusion des résultats ? Entre l'engagement du CEP de recalculer les procès verbaux, et l'étonnement de l'ambassadeur américain face aux résultats, il y a encore tout un décalage. Comment l'État haïtien et la communauté internationale feront cette prochaine valse ?

vendredi 10 décembre 2010

Se perdre


Se perdre est mon activité préférée en vacances, vacances urbaines s'entend. La carte ne sert pas à se guider, mais à évaluer grossièrement notre état de perdition éventuelle. Au détour des rues, et des ruelles à Rome, on se laisse guider par la pente des pavés. En quelques semaines, j'imagine bien que notre flair nous aura amené dans tous les coins pertinents de la ville. En fait, au hasard de ces promenades aléatoires, on croise inévitablement les spots incontournables de tous visiteurs préparés et guidés par les guides touristiques. Ces fameux guides touristiques qui sont généralement d'une grande utilité pour le voyage, lorgnent souvent avec l'incompétence quand il est question de bouffe. Pis la bouffe … c'est la bouffe, dans le sens que c'est essentiel dans ma vie en général et surtout en vacances (et pas uniquement dans le sens vital du terme). Le voyage est aussi culinaire. Au marché du coin, j'ai trouvé le bon poissonnier. Le choix du boucher n'est pas encore confirmé. Pour l'espresso, bien c'est, c'est … Rome !!

mercredi 8 décembre 2010

Mirlande Manigat-70 ans

Mix feeling… Être assis ici en Europe à profiter de ces vacances alors que chez moi, ça saute, ça brûle. Je sais que ce n'est pas un 'vrai' chez moi, mais c'est le mien depuis deux ans. Selon les infos que j'ai des amis et des collègues, tout le monde se terre à la maison en attendant que la situation se calme. Personne ne serait en fâcheuse position même si ce sentiment d'être piégé, même en sécurité, n'est pas très agréable. La petite aventure du Cap-Haïtien il y a quelques semaines a laissé quelques séquelles… Loin de l'action mais proche de ce qui s'y vit, sentiments ambigus. En lisant ce que la planète journalistique publie sur le web depuis quelques jours, Jo me faisait remarquer que la candidate à la présidence avait deux noms de famille, Manigat et 70 ans. Les journalistes qui écrivent sur elle, de Port-au-Prince ou d'ailleurs sur la planète, l'affublent presque systématiquement d'un deuxième nom de famille qui fait référence à son âge. Je tentais de me rappeler si on avait fait la même chose à John McCain (il avait plus de 70 ans lors de la campagne de 2008) ou pour celui qui se bat actuellement pour garder le pouvoir en Côte d'Ivoire (Laurent Gagbo aurait 65 ans). Mémoire défaillante ! Malgré le fait que le machisme de la société haïtienne soit très bien reconnu, j'avoue n'avoir jamais entendu de commentaires négatifs sur le fait que cette candidature soit féminine. Sa première place dans les sondages confirme d'une certaine manière que le machisme haïtien ne s'exprimerait pas dans cette dimension de la sphère politique. Peut-être que son âge deviendra son principal handicap ? Célestin et Martelly ont moins de 50 ans et n'ont aucune expérience politique, seraient-ils trop jeunes ?

Mauvais rêve


Le soleil se lève ce matin sur Rome pendant qu'on se décolle les yeux. On va vite aux nouvelles pour voir ce qui s'est passé dans la nuit à PAP. On voit des pneus qui brûlent, on parle de coup de feu, commerces vandalisés… Place St-Pierre, la route de l'aéroport, … Célestin et Manigat passeront au deuxième tour. Les gens semblent incrédules. N'importe quoi, c'est n'importe quoi. Les amis de Martelly ne lâcheront pas le morceau,surtout que les ÉU se sont déjà montrés surpris des résultats publiés par le CEP. Ce n'est que le début d'un mauvais rêve.

mardi 7 décembre 2010

Tête de cochon


Je me souviens de ces phrases piquées aux enfants (on ne sait pas trop si c'est vrai) et qui illuminent certains aspects de notre réalité d'adulte. La petite 3 ou 4 ans qui se prépare à entrer dans un avion avec sa grand-mère et qui lui demande si ça fait mal quand on rétrécie en montant dans les airs… Ou l'autre, plus proche de ma réalité de citadin, à qui on demande d'ou vient le lait et qui répond candidement : 'De l'épicerie.' J'avoue avoir le même sentiment quand je sors de cette Amérique du nord aseptisée et emballée dans le saran-wrap. Au Québec, les inspecteurs de je ne sais plus quelle agence aurait déjà emprisonné un boucher qui laisserait trois têtes de porc sur son comptoir, son commerce serait fermé. La bouffe dans les autres pays se voit sur toutes ses formes, j'écris bien 'ses formes'. Dans un marché avec Jo aujourd'hui, je me demandais qu'est-ce que j'arriverais à cuisiner avec ce genre de matière première. Je fais plus souvent dans le filet ou dans les côtelettes. J'imagine toujours ma mère qui ouvrirait le frigo chez moi et qui croiserait le regard aveugle d'une de ces têtes de cochon. Elle ne pourrait s'empêcher de faire le parallèle avec une certaine dimension de la personnalité de son fils tant aimé… En discutant de la politique haïtienne avec Jo ce soir, on pensait à la lutte à trois qui se vit actuellement à PAP. Les trois candidats à la présidence qui se disent gagnants. Les résultats seront publiés aujourd'hui. Le site de HPN fait sa une depuis hier soir avec 'Port-au-Prince a peur des résultats' (http://hpnhaiti.com/site/). Sur le site du Nouvelliste, on parle d'une attente fébrile (http://www.lenouvelliste.com/). Comme on n'a eu peur des ravages du cyclone Tomas et de l'exclusion de Wyclef de la course à la présidence, on craint une explosion sociale. Les écoles sont fermés et certaines ONG gardent leurs employés à la maison depuis dimanche. Imaginez comment on arrive à prendre en charge le choléra dans ce genre de contexte … On s'attend donc à ce que deux des trois têtes se retrouvent sur les affiches électorales dans les prochaines semaines. Pour ce qui est de se retrouver sur la carte des restos, je m'engage à essayer et à discuter avec le chef pour connaître la technique. Tant qu'à se manger la tête ...

lundi 6 décembre 2010

La Pavoni à piston

Enfin arrivés à Rome. Je l’ai écrit je ne sais plus quand (on perd l’horaire dans les méandres du décalage du même nom), attendre dans des aéroports et dormir dans des avions, c’est comme aller à la toilette dans une bécosse, c’est rarement pleinement satisfaisant. Près de 30 heures en tout, des retards et des retards. Il pleut-neige en Europe et les avions n’ayant pas de pneus d’hiver… Première soirée à se promener dans le quartier du petit appartement que nous avons loué, j’ai déjà des ampoules aux pieds. Pas que mes souliers sont neufs, c’est que mes pieds perdent l’habitude marcher dans cet Ayiti chérie. Dans Le Monde d’hier, un long article sur la contamination népalaise en Haïti. Je parle du choléra. Un scientifique français fait le pas que personne n’avait osé faire jusqu’ici (même lui en début de semaine dernière). Je ne sais pas trop comment les haïtiens vont réagir, je n’ai encore rien vu dans leurs médias. Il faut dire que les résultats des élections vont occuper tous les journalistes pour les prochaines 48 heures… Quant à nous, les élections haïtiennes vont occuper le temps de notre fouinage sur le Web, pas que ça ne nous intéresse pas, mais on n’a d’autres responsabilités pour les prochains jours. Je pensais m’ennuyer de ma cafetière à piston La Pavoni que j’ai abandonnée pour un mois à PAP, mais disons qu’il y a ici ce qu’il faut pour que la séparation ne soit pas trop difficile. Je vous raconterai.

samedi 4 décembre 2010

L'attente

Voyager est toujours intéressant, c’est se déplacer qui tue. L’aéroport a été inventé pour attendre. Attendre la famille qui revient, attendre le prochain avion. L’un et l’autre sont toujours en retard, l’un à cause de l’autre. Notre comparse Ben Laden ne fait rien pour nous simplifier la vie des preneux d'avion. Enlever ses souliers trois fois en moins de 15 minutes, sortir le portable, passer à la fouille… Lorsque je quitte Port-au-Prince, je vois toujours ces ayisien se dépatouiller avec les douaniers, américains, canadiens ou français. Visas, assurances rapatriement, viser le passeport prend toujours plus de temps. Une forme de profilage racial … Le choléra est le nouveau venu du risque haïtien. Imaginez-vous les pays voisins (amis en fait !) qui sont plutôt inquiets de voir débarquer trois cents personnes qui viennent d’Haïti. En Guadeloupe, on a été accueilli par un bonhomme hautement sympathique qui nous invitait très fortement à nous laver les mains et surtout, à nous rendre chez le médecin dès que les symptômes connus se manifestaient. ‘Ici, on peut s’occuper de vous, on n’a du sérum de réhydratation, des médicaments, des bons médecins…’ Notre animateur a réussi à nous pointer comme des pestiférés potentiels, tout en se rendant sympathique. Il a agrémenté l’attente.

vendredi 3 décembre 2010

Parler Minustah à une population qui comprend le créole


Je ne suis pas du tout spécialiste des communications, mais j'avoue que depuis quelques semaines, l'idée d'envoyer mon CV à la Minustah m'a effleuré l'esprit (preuve irréfutable que j'ai de l'esprit). Comment, par exemple, gérer plus malhabilement les communications publiques que dans le dossier du choléra ? Imaginez-vous avec votre timoun de 4 ans dans une verrerie. Vous êtes au comptoir en train de payer et pendant que la caissière grille votre carte de crédit, une bonne centaine de flutes de champagne s'allongent bruyamment sur le plancher, juste au pied du timoun. Personne d'autres dans le magasin et il ne semble pas que bagay la ait refait des siennes. Vous ne croirez certainement pas le petit 'pa fot mwen' (pas de ma faute) qui sortira tout doucement de la bouche coincée de votre héritier. Mem bagay avec le choléra. Tout pointe vers la Minustah, ça ne prouve rien c'est vrai, mais disons que ça regarde mal ! Au plan de la perception publique du moins. La maladie se déclare chez des riverains qui vivent juste en amont d'un camp de la Minustah (riverain lui aussi) où des soldats Népalais sont installés depuis une dizaine de jours. Le microbe est de cette région de la planète et, comme par hasard, le Népal est un pays où la maladie est endémique, proche de l'alerte épidémique selon un rapport de l'OMS du mois d'août dernier…. Je me répète, mais ça regarde mal. Donc au lieu de calmer le jeu, les spécialistes des communications de nos amis des UN se sont mis tout de suite à crier sur tous les toits 'pa fot nou' (pas de notre faute), en langage plus diplomatique bien évidement. Il y a quelques jours à la radio, le grand patron de la Minustah a reconnu que 'peut-être que peut-être' il restait 'peut-être' une hypothèse faible (mais très très faible) que ce serait 'peut-être' des soldats de la Minustah qui avaient apporté cette bibitte en Ayiti. Mais si c'était le cas, c'est très peu probable mais quand même, ils ne l'auraient pas fait exprès… !! On est ébahi… Imaginez si le chef de la Minustah avait pris le micro dans les premières minutes pour dire : On prend ça au sérieux, des équipes de scientifiques vont étudier la question et produiront un rapport, on fait tout ce qu'il faut pour nettoyer cette base et vérifier/nettoyer toutes les autres et, surtout, on rend disponible des équipes et du matériel pour organiser les soins. Merci madame, mais le département des plaintes étudie actuellement la question et d'ici à ce que la réponse soit disponible, voici ce que l'on vous offre pour atténuer les inconvénients. Le deuxième dossier de communication à revoir est celui des élections. On ne peut pas continuer à se promener de poste de radio en poste de radio pour répéter qu'on n'a jamais vu de belles élections comme ça en Ayiti. Que oui, il y a eu quelques petits problèmes techniques, mais que sur le fond, 'tout bagay anfom' (tout va bien). C'est la déprime démocratique généralisée, le festival du n'importe quoi démagogique, la crise politique est sur le bord d'être sur le bord !!! Au plan de la crédibilité, disons que ça ne frappe pas très fort et que ça rappelle à la population haïtienne que même si on vit sur la même bout de terre, on ne vit pas dans le même monde. Finalement, il y a cette déclaration d'hier : Si ça continue à ne pas bien aller, on s'en va !! Le genre de proposition que tu n'es mieux de pas répéter deux fois, disons que tu pourrais donner des idées à certaines personnes. La grogne contre la Minustah est la façon la plus facile d'instrumentaliser la violence dans ce pays où l'insatisfaction se dissémine plus efficacement que le choléra. Comment en arrivent-ils à offrir à ceux qui sont capables de mobiliser ces frustrations, une occasion supplémentaires de sortir dans les rues et de tout détruire ? Les violences des dernières semaines contre les casques bleus ont touchés presque toutes les principales villes depuis deux semaines : le Cap-Haïtien,Ouanaminthe, Hinche, Mirebalais, St-Marc, les Gonaïves, Jacmel, Port-au-Prince. C'est du langage diplomatique vous me direz, je leur envois mon CV quand même !!

jeudi 2 décembre 2010

D'un messie à l'autre


Quand Wyclef a voulu se lancer dans la campagne, je me souviens de textes qui mettaient en garde la population contre la venue d’un nouveau messie. Après l’épisode Aristide, ces auteurs souhaitaient rappeler les risques associés à ce genre de personnalité charismatique, capable de mobiliser les foules mais capable aussi de foutre un peu plus le bordel dans le fonctionnement d’un État. Pour plusieurs, les images de Martelly et Wyclef sur une voiture en train d’animer une foule ‘heureuse’ en plein jour de deuil démocratique faisaient un peu ‘cheap’. Racoleur en fait ! De la même manière que les gens de l’Inite se seraient rendus grotesquement dans les centres de vote avec des urnes remplies de bulletins complétés, Martelly aurait bien compris le pouvoir démagogique que son statut de vedette lui donne. Ses accointances avec Wyclef s’inscriraient dans cette même logique. Il est sorti du bureau de vote dimanche en se déclarant vainqueur, peut-être sera-t-il capable de mobiliser des masses à manifester dans les rues pour en faire le vainqueur, ou celui qui devra passer au deuxième tour. Politiquement, il semble être devenu incontournable en fait, peu importe les résultats des urnes. Un collègue me rappelait que Martelly est en train de s’inscrire dans la même logique messianique qui a amené Aristide à la Présidence. C’est une terre parfaite pour les messies et il pourrait trouver une bonne frange de la population prête à prendre la rue pour l’appuyer. D’ici le 7, il va continuer à faire monter la tension et s’il ne passe pas au deuxième tour, j’avoue que je préfère être ailleurs et suivre le tout à la télé. On quitte samedi pour des vacances à Rome, je vais en profiter pour demander une audience au Pape, il parait que dans la business des messies, c’est le spécialiste.

mercredi 1 décembre 2010

Négocier les résultats des élections : Vive les vacances


- On nous prend pour des imbéciles.
- Asefi, tu y vas fort ! Qu’est-ce que tu veux dire ?
- Ne joue pas le même jeu qu’eux !! Dans le fond, comme haïtienne, je me suis encore une fois déplacée pour rien, tout le monde est autour de l’exercice de tabulation des procès verbaux et on négocie les gagnants et les perdants.
- Tout le monde …
- Les quatre ! Martelly est rendu incontournable politiquement, Manigat l’est depuis le début de la course. Dans la ferveur médiatique, ce sont les gagnants. L’Inite est aussi là, ils ont toujours le pouvoir qu’ils ne veulent pas perdre. On va négocier pour qu’ils conservent le contrôle des deux chambres. Et finalement, les blancs qui arbitrent ce débat surréaliste. Je te donne deux % à PAP si tu m’en laisses cinq aux Cayes…
- Le CEP lui ?
- Un faire-valoir pour le quatuor. Le CEP ne peut plus marcher dans le sentier que l’Inite lui avait dessiné, il laisse donc tomber sa fonction technique et promulguera les résultats qui auront été négociés par les quatre amis.
- L’image est forte effectivement, quatre personnes assises autour d’une table en train de se partager le deuxième tour et le pouvoir.
- T’as remarqué ? Célestin est disparu depuis dimanche… Depuis sa mésaventure au bureau de vote dimanche dernier, on ne l’a pas revu. Même le parti ne l’a pas sorti lors de la conférence de presse d’hier !!
- J’ai compris qu’ils avaient lancé la serviette effectivement, ça ne va tout de même pas diminuer la pression. Tout le monde continue de pousser sur les résultats ou sur l,annulation du scrutin.
- Diminuer la pression est le seul intérêt des quatre qui négocient. Peu importe si les résultats représentent la volonté populaire. Depuis trois jours tout ce qu’il y a d’officiels dans ce pays ou dans cette communauté internationale est venu nous raconter que les choses se passaient généralement dans l’ordre, et que les petites poussières allaient être balayées sous le tapis.
- Bof, diminuer la pression… Je vois les réactions de certains partis qui nous annoncent des manifs pour les prochains jours, le parti du pouvoir qui revient aujourd’hui sur ses déclarations d’hier, je ne vois pas vraiment en quoi la pression puisse diminuer. En fait, d’ici mardi prochain où les résultats officiels seront publiés, la pression ne devrait faire qu’augmenter. Bien égoïstement, l’important c’est que je vais avoir levé les pieds.
- Lever les pieds …
- Je pars en vacances le 5, samedi prochain.
- Où tu vas encore ?
- Comment ça ‘encore’ ? Je t’ai dit, pour continuer à aimer ce pays-là, il faut que je le quitte de manière régulière. Une espèce de relation passionno-destructrice. Un couple qui se laisse aux deux mois et qui n’en peu plus de ne pas se voir après 4 jours.
- Tu pars pour 4 jours…
- Non, 4 semaines. Je reviens avant le deuxième tour. Ne t’ennuie pas trop vite, il me reste deux jours à te questionner.
- Labadie, ne t'inquiète pas pour moi, il n'y aura rien ici pour que je m'ennuie.

mardi 30 novembre 2010

Du cinéma

Ce matin, je regardais le pouce noirci d'une collègue noire (l'encre qu'on appose sur le pouce des gens qui ont voté pour éviter que la même personne ne vote deux fois), une de celle qui a bravé tous les risques pour aller voter.
- On dirait un hématome ?
- Ouais … on s'est effectivement fait coincé le doigt dans cette machine ...
Les dindons d'une farce, plate, mais d'une farce quand même. En fait, le seul sujet de conversation depuis dimanche concerne les élections. Arriver à vous raconter comment les gens sont découragés du cirque pré et post électoral, ce serait impossible. Du cirque de cette communauté internationale qui courre tous les micros pour dire que tout s'est déroulé normalement, comme dans le meilleur des mondes ! Je tentais de deviner à quel genre de film on assistait. Pas un drame d'horreur, mais en fonction de certains événements… Sûrement pas une comédie romantique même si on peut penser que l'escapade Martelly-Manigat pourrait faire couler des larmes et en même temps accrocher un sourire aux cinéphiles. À certains égards, le film pourrait être une comédie satirique, mais la satire peut elle aussi dévoiler un mauvais goût que tout le monde reconnaitrait. Un drame social ? Trop faible comme description. Un film de série B ? Avec un budget de 30 millions… Comédie humoristique aurait été une bonne venue, mais quand on pense aux conséquences, on n'est davantage dans le drame psychologique. C'est ça, un drame psychologique. À voir la déprime de mes collègues haïtiens et la honte désespérée de certains expats que je côtoie, on est vraiment dans un drame psychologique. Un espèce d'Orange mécanique où les victimes se comptent par millions, alors que les coupables restent insaisissables.

lundi 29 novembre 2010

Marcher sur la peinture fraîche


Un de mes ex-patrons m'a raconté que Jean Chrétien mentionnait qu'un politicien qui s'est peinturé dans le coin, doit apprendre à marcher sur la peinture fraîche, celle même qu'il vient lui-même d'étendre. Tacher ses semelles est toujours moins pire que de perdre la face. Heu… À moins que perdre la face implique de tacher ses semelles…. Hier quand la majorité des candidats à la présidence se sont présentés à la conférence de presse pour demander l'annulation des élections (et cela avant la fin de la période de vote !?), je me suis posé des questions sur leur lecture stratégique de la situation. Se peinturer dans le coin, même à 12, c'est se peinturer dans le coin. C'est comme si on n'avait mis une deuxième et une troisième couches de peinture sans savoir si la première avait eu le temps de sécher. 'Labadie, il va falloir un jour que tu comprennes que la politique ici, c'est n'importe quoi !' En ce jour d'un très grand calme à Potopwins, Manigat et Martelly (première et troisième dans les sondages) ont marché sur la peinture fraîche. Les trois couches même ! Manigat explique qu'elle a été surprise d'être associée à un texte qui demandait l'annulation (article), Martelly raconte quant à lui que même s'il a demandé l'annulation du vote, il respectera les résultats que le CEP publiera si ceux-ci resprésentent la volonté de la majorité (article). Bien évidement, il sait ce qu'est la volonté de la majorité…
- Labadie, tu ne comprends vraiment rien. Les premières informations sur les résultats confirmeraient que Martelly et Manigat vont passer au deuxième tour. Ils n'ont plus intérêt à ce que les élections soient annulées. La communauté internationale négocierait actuellement avec Préval pour qu'il donne du 'slack' au processus (avec son candidat) et laisse le deuxième tour de danse se faire entre Manigat et Martelly.
-Méchant couple !
-Ils se marcheront sur les pieds.

dimanche 28 novembre 2010

Soirée de première


Première tristesse. J'avoue, la première vraie tristesse de ce périple ayisien. La tristesse et la colère étant de proche parentes … Bagay la avec ces centaines de milliers de vies brisées est pour toujours une tristesse sans nom dans mon petit sac-à-dos, celui que je porterai toute ma vie. Une tristesse où l'espoir avait toujours réussi à se pointer le bout du nez. Une tristesse où il y avait toujours la vie. Ce soir, c'est le désert. Les histoires de magouilles se comptent par centaines alors que le CEP continue de nous dire que ces centaines de magouilles doivent êtres mises dans la même équation que les milliers de déroulement normaux. Mathématiquement, on suit. Politiquement ou socialement maintenant … Douze candidats réunis pour demander le report des élections supposément maquillées par l'Inite. Les rues sont pleines de moun en colère, ou payés pour l'être. Tout le monde demande le départ de Préval. Le demandera demain et après-demain… Un tremblement de terre politique dont les secousses vont continuer de nous hanter pour des mois. Des mois d'actions politiques qui continueront de moisir les conditions de vie de 9 millions de personnes. Et il y a cette Minustah qui nous avait annoncé que tout est en place et allait se dérouler dans le calme, correctement. Ayiti n'avait jamais été aussi bien préparée. Wow ! Des organisations internationales déjà éclopées qui continueront d'avoir pour les prochains mois des partenaires de danse désarticulés. Je suis en colère pour tous ces ayisien qui se sont fait noircir le pouce malgré la peur. Peut-être pour rien… Je suis en colère contre tout ce désespoir, désespéré de toute cette colère.

Ne quittez pas votre appareil...

Plus rien à comprendre, les événements se bousculent et je ne sais plus quoi penser ....

En continue

Ceux qui veulent suivre le déroulement des élections en continue, allez sur ce site : http://www.haitielections2010.com/. Haïti Press Network donne aussi des informations en continue : http://hpnhaiti.com/site/. Bonne journée !!

samedi 27 novembre 2010

Je me souviens


'Je me souviens' de la fébrilité du 29 octobre 1995. Le jour qui précédait le deuxième vote référendaire sur l'indépendance politique du Québec. 'Je me souviens' de cette journée légère et grave où en masse, les québécois se sont déplacés pour aller voter. Depuis des années, Jacques Parizeau avait préparé ce moment, on arrivait enfin à la fin de la troisième période d'une longue game. La photofinish avait départagé les vainqueurs des vaincus, on connait la suite. Je tente de me mettre dans la peau de mes collègues et amis ayisien qui vont aller voter demain. Un vote important dans ce petit pays aux deux cents dernières années troublées. Un jour, il faudra passer de ce 'Haïti n'existe pas', à un Haïti qui existe. Que les séquelles d'un accouchement difficile arrêtent de meurtrir cet État 'prématuré'. L'atmosphère est un mélange de fébrilité, de peur et de scepticisme. Tout le monde reconnaît l'importance de l'enjeu, bagay la n'ayant fait que révéler le vide béant dans lequel ce pays politique existe. Le choléra, mem bagay. Vide que tant de gens ont tenté de remplir aux cours dernières décennies. Millions de $ après millions de $, le vide est toujours … vide. Les autorités nationales et internationales se disent confiantes du déroulement du scrutin de demain. On se félicite d'avoir réussi à organiser des élections dans un tel contexte. Aujourd'hui, les rues sont vides, calmes. Anormalement vides et calmes. L'ambassade nous conseille très fortement de rester à la maison dimanche, de manger des chips en regardant des DVD. Des organisations internationales ont quitté pour la République Dominicaine depuis mercredi ou jeudi dernier, pour ne revenir que lorsque le climat politique post-électoral se sera calmé. Entendrons-nous toute la nuit et dans la matinée de demain, ces pétarades de coups de feu qui ne servent qu'à effrayer davantage les gens, à limiter la participation au scrutin ? Est-ce que la population affirmera une fois de plus son courage en défiant toutes les violences et la magouilles annoncées ? Qui gagnera dans la course à la contestation des résultats ? 'Je me souviens' de mon contentement le 30 octobre 1995, faire la queue avec tant d'autres, dire oui, sortir de l'isoloir et déposer le bulletin dans l'urne. Le retour à la maison avait été léger, satisfait d'avoir joué mon rôle dans cet exercice démocratique important. Des amis haïtiens passeront dîner à la maison demain après avoir joué leur rôle. J'espère qu'ils seront enfin légers de satisfaction.

** Pour les lecteurs français, 'Je me souviens' est la devise du Québec.

vendredi 26 novembre 2010

On verra bien


Ti-culs, mes frères et moi attendions avec fébrilité le début de la Lutte Grand-Prix à la télévision. En pyjama transformé pour l’occasion en costume de lutteur, un de mes frères se faisait un masque avec des bobettes … propres. Complètement chavirés par Édouard Carpentier, malheureusement décédé il y a quelques semaines. Toujours la même histoire. Ma mère laissait les choses aller jusqu’au débordement, la fin de l’émission étant sonnée quand l’un des trois (le plus jeune bien évidement) se mettait à pleurer ‘pour vrai’. Je n’y étais toujours pour rien, c’était mon grand frère le responsable … J’écoute parler mes collègues ayisien depuis quelques semaines, et ces images d’enfance me remontent à l’esprit. Tout le monde attend avec fébrilité une bataille que l’on sait truquée et qui se terminera lundi par de vrais dégâts. Aujourd’hui, les écoles ont été fermées, les gens craignant les débordements. Pour les mêmes raisons, elles le seront lundi aussi. Tout le monde à qui je donne rendez-vous pour lundi prochain reste dubitatif : Tu penses travailler lundi ? ‘On verra bien, mais généralement, ça se passe mal le lendemain des élections’ me dira une collègue. On verra bien !

jeudi 25 novembre 2010

Aussi simplement que ça


Ce matin sur la route du bureau, j’attendais au feu rouge. Il y en pas beaucoup, raison de plus pour les respecter. Sur le coin de la rue, il y a cet homme, début de la quarantaine et probablement au chômage comme tant d’autres, qui s’étire vers un filet d’eau qui descend de la toiture d’un immeuble. Il se lave les mains, récupère de l’eau dans ses deux mains pour se rafraîchir le visage, se remplit la bouche de l’eau qui tombe et se brosse les dents avec son index. Ils sont des milliers, des dizaines ou des centaines de milliers, à faire ce geste anodin tous les jours. En ville comme à la campagne, sur toutes les sources d’eau qui se pointent la goutte. Peu importe ce qui se passe en amont, qu’une femme ait vidé sa vessie, que la couche d’un timoun ait été nettoyée, … Pour un peuple qui évolue continuellement en regardant en amont de son histoire, c’est un beau paradoxe. C’est le lot des pays pauvres, des conditions de vie qui offrent un terrain fertile à la transmission de féco-orale. Pas besoin de dessin ... ? On parle du choléra maintenant parce que la crise en est à ses premières poussées et qu’elle est foudroyante, mais les haïtiens confrontent beaucoup d’autres maladies de cette nature. Il y a bien de ces enfants de ce pays qui sont morts de déshydratation et qui vont continuer d’en mourir, des maladies technologiquement si facilement à éradiquer. Faire entrer de l’eau propre dans une maison et s’assurer que l’eau sale en sorte, aussi simplement que ça. Les ingénieurs civils sont des sauveurs. Avant la sortie du choléra, on avait vu depuis dans la dernière année des jeunes mourir de la typhoïde. Le retour d’une maladie que les médecins croyaient enrayés depuis plusieurs années. ‘On n’avance pas, on recule’ m’avait dit un collègue pédiatre suite au décès d’un jeune de 8 ans. Le choléra vient donc s’agglomérer à une série d’autres maladies qui se propagent par l’incapacité à gérer les eaux sales et les eaux propres. Aussi simplement que ça.

mercredi 24 novembre 2010

Tout goûte le clorox


J'ai écrit un billet sur le H1N1 en Ayiti l'année dernière (http://jeanfrancoislabadie.blogspot.com/2009/08/h1n1.html). J'y écrivais plusieurs niaiseries, mais surtout je relatais comment les Ayatollahs de la santé publique auraient des boutons à voir les ayisien se toucher en période d'épidémie. Se toucher en Ayiti,tenir la main du gars avec qui tu parles, c'est comme pour les québécois parler de la température. Tous les jours, plusieurs fois par jour. Pour le choléra, mem bagay ! Pire en fait. Pire parce que la crise est si importante (des spécialistes vous diront dans le creux de l'oriel que les chiffres sous-estiment la réalité) que la population est en mode panique. On passe la journée à se laver les mains. On 'javelise' tout, tout goûte le clorox. Les marchandes de pistaches ou d'oranges qui colorent les rues de PAP perdent leur clientèle. Plus personne ne veut prendre de risque. Malgré tout, on se touche, on s'embrasse. La chaleur est trop grande dans ce pays des caraïbes.

mardi 23 novembre 2010

Pas cette fois-ci ?


Impossible pour moi de ne pas faire de parallèle entre ce qui se passe actuellement au Québec et la réalité politique haïtienne. Pour les français qui lisent ce blogue, disons que la vie politique québécoise est secouée par une multitude d’histoires de corruptions. Politiciens municipaux et provinciaux, mafia, industrie de la construction, collusions, enveloppes brunes, … Une belle soupe Habitant. C’est tellement intense comme crise que j’imagine la nécessité d’une psychanalyse collective pour sortir de ce trauma politique. Dans cette nébuleuse malodorante, il y a des élections partielles où le ton monterait entre les deux principaux partis, et ce dans un comté peinturé rouge depuis 25 ans. Il y aurait eu intimidation et vandalisme selon les belligérants. Deux des ingrédients de la soupe politique québécoise sont en action ici : Corruption et bisbilles électorales. À un degré autre bien évidement, mais rien n’est comparable. Depuis deux jours ici, on ne compte plus les histories de listes de superviseurs d’élections trafiquées, de manifestations, de distribution ‘anarchique’ de cartes électorales, de vandalisme contre les affiches des ennemis, de l’intimidation, de pneus qui brûlent et, malheureusement, de morts ou de blessés par balles. Se gravman grav, ça veut dire que c’est grave ! C’est la route normale vers la démocratie me dira Asefi. Bof ! Normal, qu’est-ce que ça veut dire ? Ici, ça veut dire habituel. Aristide a été élu en 2000 avec 93% des appuis, alors que seulement 5% des adultes s’étaient déplacées aux urnes. Le climat de terreur était tel que les gens ne sont pas allés voter. La terreur, ça fait peur. Le même genre de contexte est en train de s’installer et on pourrait croire que l’augmentation de cette tension paralyse la population le jour du vote. Peut-être que mon flair n’est pas très bon, mais j’ai le sentiment que cette fois-ci, la population voudra se lever, se mettre beau et aller voter. Autour de moi, des gens qui n’avaient pas voté aux deux derniers tours des sénatoriales (printemps 20009) et me disaient il y a un mois qu’ils ne voteraient toujours pas encore cette fois-ci, ils ont changé d’idée. Ils veulent se lever dimanche matin et se rendre dans un bureau de vote afin qu’on leur trempe le doigt dans l’encre, la preuve qu’ils ont fait un choix. Trempez vos doigts dans l’encre, il faut faire une tache dans l’histoire.

lundi 22 novembre 2010

Bonne semaine


Le premier matin de notre captivité dans un hôtel (confortable) du Cap la semaine dernière, il y avait ce timoun qui nous attendait. Il venait nous souhaiter une bonne journée. Le soleil était toujours à l'horizontale et illuminait son parapluie. La ville dans laquelle il vit était en 'guerre', mais son sourire et son oeil borgne charmaient tout le monde. Il jouait dans la rue avec ces petites voitures que les enfants ayisien se confectionnent avec des bouteilles de plastique. Depuis deux ans, mon coeur de ti-cul est chaviré par ces bagnoles. Un jour, je sais que je vais avoir l'indécence de proposer à un de ce timoun de me vendre son jouet-oeuvre-d'art à un prix mirobolant. Je me retiens depuis mon arrivée ici mais je sais que ma capacité de résister va fondre sous la chaleur de ce soleil et ces sourires. Je n'y pourrai rien, je le sais et reconnais à l'avance ma culpabilité. Ce timoun n'ira pas voter dimanche prochain, mais il faut juste souhaiter que celui qui sera élu le mettra au centre des intérêts de l'État ! Bonne semaine, elle sera chaude.

samedi 20 novembre 2010

Bonne idée !


Le mode ‘trouble’ s’est mis à la mode. La vague va-t-elle déferler sur l’ensemble du pays ou seules certaines villes vont s’embraser ? Pour le moment, les tensions semblaient s’estomper au Cap-Haïtien alors que pour Hinche et PAP, rien n’est encore joué. On entend parler de Mirebalais, de Ouanaminthe, des Gonaïves… Une chose est certaine, les policiers de la Minustah avec qui j’ai parlé dans les derniers jours sont sur les dents. La prochaine semaine risque de ressembler à une boîte à surprise. Je discutais avec Cetout de la situation des élections en le questionnant sur cette idée très forte que tout ce qui se déroule actuellement est orchestrée par la classe politique qui ne veut pas d’une élection qu’elle semble en voie de perdre.
- Ça me semble un peu simpliste comme analyse. Cette hypothèse est sur toutes les lèvres, charnues comme émaciées. Comme si l’évidence était tellement forte, qu’aucune autre idée ne pouvait se pointer dans la tête des gens.
- Depuis 20 ans, c’est la même ‘classe politique’. Celle qui profite de la situation du pays pour s’en mettre plein les poches. Là, je parle des politiciens corrompus, des trafiquants de drogues et de quelques familles riches du pays. Ces gens là paniquent actuellement. Leur poulain ne passe pas du tout dans les sondages et celle qui est bien assise en première place dans les sondages des dernières semaines, Madame Manigat, n’a jamais mangé dans leur main. Elle parle de ‘rupture’ avec l’ancien régime alors que Célestin se présente comme le candidat de la continuité.
- Cette analyse est aussi logique que séduisante, ça n’en fait pas pour autant une vérité transcendante !
- On a vu dans notre histoire récente ce genre de manœuvres. On arme des groupes criminalisés ou des jeunes un peu désœuvrés, tu ajoutes un peu de kob et du klerin (alcool) et hop, la situation s’embrase. Du temps d’Aristide, on parlait des chimères. As-tu remarqué que les accusations de distribution d’armes n’ont jamais été démenties ? En fait, tout le monde connait très bien la suite de l’histoire, ils ont vu la pièce à quelques reprises.
- Le chef de la Minustah mentionnait également que d’anciens militaires faisaient partie de ces manifestants.
- Eux, ils attendent leur tour depuis que les américains les ont écrasés pour réinstaller Aristide en 1994. Ils sont là, toujours près à reprendre du service. Pour le moment, ils se battent avec les chimères contre la Minustah, mais si jamais la Minustah plie bagage, les militaires et les chimères se feront la guerre. Les soldats sont de la clic duvaliériste, et ceux qui financent les chimères sont des aristidiens. Si la Minustah lève les pieds, bienvenue dans ta première guerre civile.
- Air-Canada a toujours des vols, ne t’inquiète pas !
- Ce qui est nouveau cette fois-ci, c’est que la communauté internationale semble tenir son bout. On voit des prises de position assez fortes des UN, de la France et des États-Unis pour le maintien des élections. Tout le monde imagine que Préval et ses amis ont maintenant deux bâtons dans les roues. Une population qui semble vouloir se mobiliser derrière Manigat et des acteurs internationaux moins complices.
- Je te dirais que la Minustah a également assez mal géré le dossier du choléra. Le fait de se dépêcher à nier toute responsabilité dans l’affaire offre une très belle opportunité à ceux qui avaient besoin d’un prétexte pour tout faire sauter.
- Donc tu penses que c'est vrai cette histoire que des soldats de la Minustah sont responsables de l’épidémie de choléra.
- Ce n’est pas mon point. Pour le moment, tout concourt à pointer du doigt les soldats Népalais installés à Mirebalais mais dans le contexte politique actuel, c’est un faux enjeu. Ceux de la classe politique qui veulent annuler les élections se sont fait offrir sur un plateau d’argent une occasion de mobiliser les manifestants. Imagine que les UN, au lieu de rapidement nier toute responsabilité, avaient plutôt dit qu’ils allaient étudier en détail la question et rapidement mettre en place dans toutes leurs casernes les dispositifs pour éviter toute contamination possible. Qu’ils allaient évaluer l’état de santé de toutes leurs troupes et que tout porteur sain allait être rapatrié dans son pays, et qu’ils s’engageaient en cas de responsabilité prouvée à dédommager la population haïtienne. Et que dans l’immédiat, ils allaient mobiliser des équipes pour soutenir la distribution des médicaments et équipements nécessaires aux populations touchées. Aujourd’hui, au lieu de se battre contre la population, ils distribueraient des caisses de sérum et d’antibiotiques… Disons qu’au plan de la stratégie de communication, on a déjà vu mieux.
Cetout m’écoutait sans broncher avant de reprendre la balle au bond.
- Du point de vue de la stratégie de communication, c’est effectivement une catastrophe. Au plan politique, c’est encore pire. Ils se sont offerts en cible à ceux qui ne veulent pas d’élection et qui ont les moyens de les perturber. Maintenant, il ne leur reste qu’à continuer à téléguider les manifestants. Ou on en arrivera tous à la conclusion que la situation est tellement dégradée qu’il faille annuler les élections, ou le climat de terreur imposera une participation tellement faible aux élections que ce sera plus facile de magouiller les résultats.
- Peut-être que t’es en train de leur donner une idée …
- Ne t’inquiète pas, ils n’ont pas besoin de moi pour avoir ce genre d’idée.

vendredi 19 novembre 2010

Restons calmes


À part les chiens qui jappent et les coqs qui s'étirent le gosier pour crier, notre coin de la ville est calme. Tout le monde est sur ses gardes, la rumeur (toujours celle-là !!) nous annonce une grande annonce pour les prochaines heures. Les élections seront-elles annulées ? Et ce même si la communauté internationale travaille dans le sens contraire. Restons calmes, il y a assez de monde pour s'énerver.

jeudi 18 novembre 2010

La Bataille de Vertières


Notre sortie du Cap-Haïtien a été une belle aventure… heureuse du moins. Mardi matin, on n'avait fait une première tentative de quitter la ville tôt en matinée mais la réalité des barricades et des manifestants s'était réinstallée. À Vertières, à la sortie du Cap, on a rebroussé chemin pour reprendre nos chambres à l'hôtel. Hier matin, on a eu plus de chance. Encore plus tôt cette fois-ci, on a sauté sur l'occasion offerte par l'escouade SWAT de la PNH. Les policiers de l'UDMO (Unité départementale de maintien de l'ordre) se préparaient à faire une ronde jusqu'à la sortie de la ville, deux camions de transport de troupes et deux douzaines d'hommes équipés nous offraient leur escorte. En moins de deux secondes, les valises étaient bouclées, les dents brossées. Fallait être beau pour cette sortie!! Encadrés de deux véhicules, nous sommes sortis lentement avant que les manifestants aient le temps de réinstaller les barricades enlevées durant la nuit. Il fallait qu'on rejoigne PAP par la route du département du Centre, la route nationale (qui passe en Artibonite, qui est plus courte et en meilleure condition) étant le champ de bataille principal entre le Cap et Limbé. Avant de se mettre définitivement sur la route, on n'a fait un détour par la douane de Ouanaminthe, le temps qu'une collègue canadienne puisse prendre un vol sur Montréal via Santiago (République Dominicaine). Le temps étant ce qu'il est dans un pays comme Ayiti, on est arrivé en soirée sur Hinche pour pouvoir s'étendre dans un hôtel afin de reprendre la route pour PAP dès la levée du soleil. La situation ne devrait pas s'améliorer pour aujourd'hui, c'est jour de la Bataille de Vertières. En fait, en plein coeur de la bataille actuelle, là où les ayisien affrontent les UN depuis lundi. Là où le 18 novembre 1803, Dessalines a mené la bataille qui a permis à Ayiti de naître le premier janvier 1804. On s'imagine que ceux qui nous ont sortis de la ville travaillent fort en ce congé férié !

Enfin libre

On a pu sortir hier du Cap-Haïtien et de retour à la maison ce matin. Je donnerai davantage de détails plus tard aujourd'hui. J'ai aussi fait quelques photos...

mardi 16 novembre 2010

C’est vrai que c’est faux

21h45, bien allongé sur le lit, je regarde la seule chaîne que la télé est capable de retransmettre. C’est de la lutte, 3 femmes en rouge contre 3 femmes en blanc. Émission britannique retransmise par les français. Artifices et imbécilités habituelles. Tout le monde sait que c’est vrai que c’est faux. Des amis qui deviennent des ennemis, des ennemis qui deviennent des alliés. Je pense à ces gens qui se battent dans les rues de la ville depuis deux jours. Des soldats de partout dans le monde envoyés ici et qui sur le fond, n’ont rien contre les haïtiens. Des haïtiens qui n’ont rien contre les chiliens qui sont là devant eux, mais plutôt contre la nébuleuse ‘communauté internationale’. Des discussions avec des autorités nationales arrivées à l’hôtel pour la nuit ou avec des policiers québécois qui appuient la PNH, on m’explique que des politiciens instrumentalisent le choléra pour perturber le déroulement des élections, pour les annuler. On finance et on arme des groupes de jeunes qui foutent le bordel. Cette hypothèse est sur les lèvres de tout le monde. C’est tellement un lieu commun que personne ne la remet en cause, c’est une explication générique, on la sert à toutes les causes dans ce pays. Que tout ce qui se passe depuis deux jours est de la frime. Comme un match de lutte, tout le monde sait que c’est vrai que c’est faux. Si les motifs sont faux, les balles sont vraies … Les dégâts aussi.
On attend des nouvelles pour avoir une occasion de sortir de ce merdier dès demain matin. retourner à PAP. Il semble qu’une trêve ait été négociée durant la journée et qu’on permettra à l’aéroport de rouvrir demain afin que soit rapatrié sur PAP ceux qui ont à l’être. On continue de passer ce moment en toute sécurité, pas vraiment d’inquiétude pour nous, mais on a quand même hâte de rentrer chez nous.

Ça se calmerait ...

À l'hôtel, on a passé une partie de la soirée avec deux photographes français arrivés ici pour le choléra et, disons simplement, que les troubles actuels ont offert un autre 'sujet'. Ils quittaient l'hôtel en même temps que nous ce matin pour aller travailler à l'intérieur des barricades. Ils viennent tout juste de revenir parce que la situation s'est nettement calmée, assez pour penser que ce n'est plus intéressant pour eux... C'est fou que ce qui est intéressant pour les uns, peut l'être moins pour les autres !

Toujours coincé au Cap-Haitien

Ce matin tôt, on s’est rendu au poste de police pour avoir des informations sur la fin de la journée d’hier et la dernière nuit. Les routes avaient été déblayées et l’aéroport resterait fermé. On s’assure que les villes entre le Cap et PAP ne sont pas elles aussi empêtrées dans les manifestations et on décide de prendre la route. On passera par le haut de la ville pour sorti du Cap-Haïtien une chance, le chauffeur est du coin et connaît les ruelles moins achalandées. Au sortir de la ville, on a déjà croisé quelques petits groupes qui se préparent à une autre journée de manifestations mais sans plus. En mettant les 4 roues sur la route nationale, on se voit bloquer le chemin par un groupe nettement plus nombreux. On nous fait comprendre que la meilleure solution est de retourner au Cap, que nous ne pourrons nous rendre à Port-au-Prince. On s’installe con à l’hôtel pour attendre la fin d el ajournée. Des contacts ont été faits avec l’ambassade et avec des policiers canadiens qui travaillent ici au Cap. Pour le moment, on est en sécurité à l’hôtel et on attend la suite des choses pour connaître nos meilleures options. Le moral reste bon, surtout qu’il reste du rhum. Les autorités haïtiennes arrivent en ville ce matin pour calmer le jeu. On reste branché sur les informations …

lundi 15 novembre 2010

Bagay yo chofe (ça chauffe )


Vu du ciel, le ciel bleu était très beau. Assis dans cette machine à voler, on se dirige calmement vers la piste d’atterrissage de l’aéroport du Cap-Haitien. Il fait beau et le vol est calme, à moins que ce ne soit il fait beau ‘parce que’ le vol est calme. En sortant de l’aéroport, je cherche le chauffeur qui devait m’attendre. Pas là. Pas son style ?? Je le rejoins au téléphone pour apprendre qu’il est terré au Cap, impossible de sortir de la ville pour venir nous cueillir. Des manifestants et la Minustah s’affrontent. Coups de feu, pneus qui brulent, gaz lacrymogène barricades. Impossible de quitter le centre-ville. Impossible également pour les gens de Fort-Liberté (Département du Nord-Est) où on avait réunion puissent venir nous rejoindre. Les rues sont bloquées. Il est 8h15 du matin et on s’installe dans l’aéroport pour attendre. Entre 10h00 et 12h00, les troubles se déplaceront autour de l’aéroport. Nos oreilles entendront plusieurs coups de feu et on respirera un peu de vapeur de gaz lacrymogène. Toutes les hypothèses sont sur la table, je l’ai écrit des centaines de fois sur ce blogue Haïti pays de rumeurs. La plus rapide à se manifester est que le parti au pouvoir vient de lancer des troubles dans tout le pays, les sondages ne déroulant pas le tapis rouge pour son candidat, vaut mieux tout mettre en place pour annuler le scrutin du 28 novembre. Selon une autre source, seule la ville du Cap est concernée par ces troubles ‘soudains’. L’autre explication veut que la population du Cap se soit révoltée à la vue ce matin du corps d’une jeune fille de 16 ans morte du choléra. On en voudrait à ce gouvernement qui dépense de millions pour la campagne de son poulain au lieu de prévenir le choléra et soigner les gens. Dans une dernière hypothèse (‘dernière’ hypothèse est présomptueux !!), la population en veut à la Minustah qui aurait apporté cette fichue bactérie dans le pays. C’est toutes ces réponses de me dire Asefi en lisant par dessus mon épaule. À 12h30 c’est confirmé, on ne quittera pas le Cap aujourd’hui et on ne sait toujours pas si on sera forcé de passer la nuit sur les confortables banquettes de l’aéroport… 14h45, l’aéroport s’est presque totalement vidé. Le chauffeur est toujours coincé au Cap et ne peut venir nous chercher, la fumée noire des pneus qui brulent se fait voir à plusieurs endroits entre la ville et l’aéroport. Un ingénieur de l’EDH qui patientait avec nous depuis le début de la journée a réussi à rejoindre de ses collègues qui viendront à pied nous chercher. On allait donc devoir se rendre à l’hôtel à pied. En passant pas des petites rues que seul un local peut connaître, on prendra près d’une heure pour se retrouver en sécurité à l’hôtel. Drôle de voyage dans cette ville tourmentée. Disons simplement que notre passage sera hautement remarqué, en matière de discrétion il nous en reste beaucoup à apprendre...