lundi 31 octobre 2011

On se revoit en 2008

Ce matin, Jo et moi avions rendez-vous avec un élu. Trop long et compliqué d’expliquer pourquoi, en plus, ce n’est pas pertinent au propos. On se présente donc 5 minutes avant l’heure convenue, fâcheuse habitude canadienne de laquelle on n’arrive pas encore à se défaire. Lui, en bon haïtien n’aura pas le temps d’arriver avant que notre patience et un autre rendez-vous nous poussent vers la sortie. On a eu droit à l’accueil cordial d’une secrétaire qui nous a installés dans le bureau de l’élu en question. Sur le mur derrière, le portrait d’un personnage historique du pays, selon mon œil physionomique, c’était Pétion ? Le bureau du chef était modestement graillé, tout était bien rangé et nos sièges très confortables. Dans l’attente, nos yeux curieux se sont concentrés sur le calendrier sous-main qui meublait son bureau. Octobre 2007 ! Le petit calendrier ouvert juste à côté nous ramenait également au mois d’octobre 2007. La secrétaire qui voyait notre impatience polie grandir nous a proposé de fixer un autre rendez-vous. « Ne vous inquiétez pas madame, on va le recontacter. » Dans l’auto j’ai demandé à Jo qu’est-ce qu’on fait ? « On va essayer d’avoir un rendez-vous pour janvier 2008 ! »

samedi 29 octobre 2011

Le DJ

Normalement, la lune, pleine ou un de ses croissants, éclaire légèrement une mer devenue clame d’une journée trop érintante. À l’occasion, les orages strient le ciel d’éclairs. On écoule silencieusement une bouteille de vin sur la galerie de notre chambre d’hôtel. Dans ce genre de situation, le silence dit tout. Ce soir toutefois, le chikaboum s’est mis de la partie. Tabarnak !! Un DJ s’est installé sur le bord de la piscine et la ‘base’ de son système de son transmet parfaitement le rythme de la zizique à notre lit. On vient souvent dans ce petit hôtel de la côte au nord de PAP. On va revenir, mais on va s’assurer que le DJ a un contrat ailleurs.

vendredi 28 octobre 2011

Interminables débats

Ce n’est pas parce que je n’ai rien à dire que je n’écris pas ! C’est à cause de ce fichu d’internet à la maison. En fait, je suis responsable. Des voyous ont copié ma carte de crédit il y a quelques semaines et la sécurité de ma banque a annulé ma carte avant de m’en envoyer une nouvelle. J’avais oublié de faire le changement auprès du fournisseur Internet qui n’a pas hésité à me couper le service quand il a obtenu une réponse négative en voulant recevoir son dû. Vite pour couper, mais un peu moins rapide pour rebrancher… C’est Ayiti ! Il y a plein de chose à dire dans cette vie politique plus que trépidante. Hier, branle-bas de combat autour de l’aéroport avec le retour de France d’un député recherché par la … PNH. La police nationale. Le député de Delmas-Tabarre a un passé trouble, aurait fait de la prison, se serait évadé avant d’être rattrapé et de sortir par la grande porte. Entendre payé sa dette. Depuis, le gars est devenu député avant d’être « peut-être » coincé à nouveau dans une petite histoire illicite pas encore claire (vol de voiture et possession d’arme prohibée). J’écris au conditionnel, pas besoin de répéter à nouveau pourquoi… Outre son histoire trouble qui ne faisait pas la manchette, le bonhomme est devenu populaire en ‘se pognant’ avec le président Martelly dans une assemblée. Une engueulade dont tout le monde a parlé ici. Depuis, on ne sait plus qui dit vrai !! Chose certaine, le député aurait repris son statut de criminel depuis une semaine. La PNH l’a donc arrêté à sa sortie de l’avion même si l’immunité des parlementaires devrait être théoriquement levée par leurs semblables. Le président de la chambre des députés a eu ces mots affolants au moment où son collègue a été arrêté : « Nous étions là pour constater et dire à la nation qu'on a arrêté un député sans que son immunité ne soit levée. Nous avons affaire à un dictateur (il parle de Martelly). Ce qui se passait en 1957 quand le président François Duvalier commençait à arrêter des parlementaires risque de se produire à nouveau. » L’accès à l’aéroport aurait été interdit aux journalistes et on aurait noté la présence de deux ministres, dont le ministre de l’intérieur, le plus ‘duvaliériste’ du groupe selon les rumeurs. Ce dernier aurait (toujours selon la rumeur …, désolé !!) enlevé leur badge à des travailleurs des douanes qui voulaient empêcher la PNH d’intervenir dans leur secteur de juridiction. À nouveau, impossible de savoir le frai du faux, de connaître l’ampleur réel de l’événement au plan politique. Votre opinion vaut la mienne. Pis la mienne vaut … La seule chose qui est certaine, c’est que s’il nous a fallu près de six mois pour sortir du marasme politique créé par l’absence de gouvernement, on aura pris qu’une semaine pour replonger le pays dans un conflit exécutif/législatif qui pourrait nous paralyser de nouveau. Encore une fois, on est au bord d’un débat qui pourrait faire éclater la république. Eclater de rire peut-être !! Un conflit sans fin pour un statu quo sans fin. L’idée ici n’est pas de distinguer qui a raison de qui a tort, on ne le saura jamais et surtout, personne n’a intérêt à conclure le débat. Plus ils sont interminables, mieux ce sera. Non, l’enjeu ici est de savoir quand on passera à un vrai débat politique sur l’environnement, la santé, l’éducation, le développement économique … Le marronnage est une plaie. Ai-je déjà parlé d’engagement ?

mardi 25 octobre 2011

Supplice délice

Le nouveau ministre des haïtiens vivant à l'étranger a été installé cette semaine. Il s'appelle Daniel Supplice et a fait de son discours d'entrée en fonction un vrai délice. Le sociologue s'est lancé dans la bataille au côté de Martelly au tout début de la campagne, au moment où le président n'était qu'un chasseur fou qui montrait ses fesses. Le clown de service. Il y a cru et surtout, il croit en la nécessité de dire la vérité. Lisez pour voir : "Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre, le soldat, ce n’est pas celui qui porte l'uniforme, le soldat, c'est celui qui dit la vérité et qui assume les conséquences d’avoir dit la vérité, le soldat, c'est celui qui sait que la guerre, qu'elle soit politique, économique ou militaire, se gagne après le décompte des victoires de batailles. Monsieur le Président, je sais me battre, je me suis déjà battu, j'ai perdu, j'ai gagné aussi. Quand vous me donner un ministère pareil : 54 millions de gourdes comme budget, 11 véhicules dont un seul qui marche, pas de loi organique, 4 directions mitigées, des services éparpillés contenant des sections qui ne peuvent pas être justifiées... c'est évidement qu'on a l'impression qu'on me jette quelque part dans une gaguerre 'jete comme un kòk sans Sapatonn' " Le gars a placé le 'cochon' pour la suite de la joute.

samedi 22 octobre 2011

L'engagement

Vu l’inconfort habituel de l’avion, le sommeil est généralement impossible. C’est toujours le moment de pousser un peu plus loin l’analyse. Comprendre ce pays maudit ou impossible, c’est selon. Je reçois des courriels ou encore des amis me questionnent, tout le monde veut comprendre pourquoi la descente aux enfer ne semble jamais toucher le fond. Comment le pays peut-il s’en sortir ? La réponse à ce genre de question n’est pas que complexe, elle est compliquée. Compliquée parce que rien sur cette île et dans la tête de ses occupants, n’accepte d’être cerné dans une formule simple, logique. Une seule réponse, comme les chaînes des esclaves, limiterait la liberté de mouvement, la possibilité d’errer. Même être logique dans son raisonnement serait une autre manière de se sentir coincé dans des corridors toujours perçus comme étant naturellement contraignants. La liberté dans tout ce qu’elle a d’irresponsable et d’inconséquent. Je tirais donc la conclusion (ne vous inquiétez pas, ce n’est pas la dernière, mon système hypothético-déductif fonctionne assez bien) que le problème se berçait dans l’engagement. Je ne dis pas que c’est la cause ou l’effet, le monde binaire ne sert à rien dans ce genre de contexte. Je dis que c’est le problème, en même temps la cause et l’effet. L’engagement, c’est la capacité de se mobiliser pour quelque chose qui existe dans l’espace social, même s’il peut être de portée individuelle. C’est la capacité de développer des efforts pour faire avancer un projet, de le définir et de le mettre en œuvre. Haïti souffre d’un flagrant manque d’engagement. Plus personne (ou presque !) ne s’engage dans cette société. Elle n’en vaut plus la peine, les politiciens sont corrompus, la population est incapable, les élites économiques sont aveuglés par une richesse facile et rapide, le milliard d'intellectuels ne fait que peaufiner toujours davantage son discours et les pays de la communauté internationale n’accouchent de rien à tenter de faire le plus beau. Le non engagement haïtien, c’est l’image inversée du marronnage, de la non confiance. L’absence d’engagement, c’est l’incapacité de voir son entreprise ou son pays mieux faire un jour. C’est le statu quo, confortable comme inconfortable. C’est la résignation. Vaut mieux s’y complaire que de s’engager.

vendredi 21 octobre 2011

Réparation

En Haïti, l’eau est le principal véhicule du choléra. L’épidémie a touché en premier lieu les âmes qui vivent dans les villages qui voisinent une rivière dans laquelle se serait déversé le contenu des chiottes d’un contingent népalais. Depuis, la Minustah continue de clamer pas son innocence, mais le fait que personne ne peut faire la preuve hors de tout doute raisonnable, que ce sont ses soldats qui ont amené la fâcheuse bactérie dans le pays. Après une année, 5% de la population (près de 500 000 personnes) a été affecté par la bactérie et 6 500 personnes en sont mortes. On a appris cette semaine qu’Haïti est le ‘spot le plus hot sur la planète’ côté kolera. Les Jojo Savard de ce monde font des pronostics, mais de manière générale, l’avenir ne s’annonce pas rose. Le choléra devrait devenir l’une des principales causes de mortalité dans le pays selon des experts. « Quels experts ? » je n’en sais rien, ceux cités par les médias. Le président a dit qu’il faudrait un milliard de $ pour offrir à l’ensemble de la population une eau traitée, premier pas vers l’éradication d’une maladie devenue malheureusement endémique. J’entendais des commentateurs aujourd’hui se demander si la communauté internationale allait accepter de payer cette somme, considérant que la bibitte a fort probablement été amenée dans le pays par ses soldats. Je trouvais que la question manquait de nuance. Premièrement, c’est la communauté internationale qui paiera le milliard si on lance ce vaste projet. Le pays n’a pas les moyens d’assumer ce genre de charge. Il faut juste se rappeler que l’international assume 60% du budget de fonctionnement et 100% du budget d’investissement de l’État. Ainsi, poser la question « qui va payer » ne me semble pas appropriée. La bonne question à poser aurait été : « Est-ce que la communauté internationale va accepter sa responsabilité et offrir de dédommager le pays en assumant les frais de l’installation d’un tel système d’eau traitée ? » Là … les choses se corsent. Reconnaître sa responsabilité ouvre trop grande une porte que les Nations Unies veulent maintenir fermée. On n’est pas dans la logique jovialiste de la réparation ‘nationale’ en calmant ainsi l’ardeur de ceux qui toutes les semaines manifestent pour demander le retrait de la force onusienne. Non, on est dans la logique affairiste qui veut éviter d’éveiller l’ardeur des milliers de personnes (peut-être des centaines de milliers) qui pourraient demander réparation ‘personnelle’.

mercredi 19 octobre 2011

La modernité

« Ne pas tout chambouler » est le sens du message envoyé par l’ex premier ministre Bellerive à la nouvelle équipe gouvernementale qui s’installe aujourd’hui. Asefi qui m’écrit un courriel pour me demander : « Mais à quelle réalisation Bellerive fait-il référence pour demander au gouvernement de ne pas faire table rase ? Il faudrait de la continuité dans l’inaction et la corruption !! » Je lui ai répondu que Martelly avait fait tout sa campagne et les premiers mois de sa présidence en disant qu’il voulait tout transformer, faire table rase sur l’ancienne façon de gouverner justement. En fait, j’ose même avancer l’idée que la seule attente réelle de la population et que le gouvernement nettoie la table, fasse enfin le tivire, le virage à 180 qui amènerait le pays dans une autre direction. Le défi pour moi reste celui de la confiance. Le climat de confiance que Martelly et son gouvernement vont pouvoir établir avec les fonctionnaires. J’avoue que sur ce point, le nouveau président me semble envoyé des message plutôt inquiétant. Ses problèmes avec la police nationale l’amènent à faire confiance à la Minustah ou à une ‘nouvelle’ force armée, il a lancé son programme de scolarisation complètement en parallèle du ministère de l’éducation (la gestion du financement entre autres) et il vient de créer une cellule d’appui technique qui interviendra entre le premier ministre et la présidence. Comme façon de se déconnecter de ses fonctionnaires, on reste dans les vieilles façons de faire de Préval, surtout dans les semaines qui ont suivi le tremblement de terre. Il faut juste souhaiter que Martelly arrive à marier plus positivement la modernité affichée de sa nouvelle présidence, avec ces vieux démons qui baignent tous les fonctionnaires dans le même coulis d’incompétence et de corruption. Une équipe gouvernementale qui définit une vision claire, qui assure un encadrement rigoureux, qui fait améliore les conditions de travail de ses zouaves et qui arrive à tirer avantage des organisations d’appui technique qui sont en place partout, est une équipe qui a davantage d’entrer réellement dans la modernité.

mardi 18 octobre 2011

Attrape-touriste

Un des avantages en vacances, c’est qu’on peut se déculpabiliser de manger du foie gras et de boire du Sauternes en marchant toute la journée. Ou en montant sur la Basilique Notre-Dame pour aller faire des photos. Il y a de ces attrapes-touristes qui valent le prix et les étages à gravir à pied.

lundi 17 octobre 2011

Remplir son chapeau

La bonne nouvelle depuis vendredi en Haïti, c’est qu’on a maintenant un nouveau gouvernement. Plusieurs s’énervent aujourd’hui à l’effet que Martelly s’est entouré de duvaliéristes, des gens qui devaient dormir depuis un an !! La liste des duvaliéristes n’arrêtent pas de s’allonger. Lors de la campagne présidentielle, ses critiques faisaient déjà émerger la possibilité d’un prédisent dictateur considérant son style et ses accointances. Un peu particulier que cette idée émerge de nouveau au moment où son gouvernement s’installe. Entre le 14 mai et le 15 octobre, le temps politique a été dessiné par des tensions entre d’un côté un président novice, têtu et populaire, et de l’autre des parlementaires expérimentés et publiquement désavoués. On aura rapidement l’occasion de voir si la vedette de la chanson va être aussi bon et ‘rentable’ avec son gouvernement qu’avec son band. De chef d’orchestre à chef d’État, il n’y a qu’un pas. Un pas pour tomber dans le vide comme ce joueur de soccer qui faisait son show d’habiletés au dessus du grand escalier de Montmartre aujourd’hui. Son chapeau s’est rempli assez vite et même si on peut souhaiter que le chapeau du pays se remplisse aussi rapidement, j’espère qu’on en bouchera les trous avant …

samedi 15 octobre 2011

Danseurs anonymes

Sur les bords de La Seine, deux danseurs tanguaient, dansant un tango. Une musique presque sourde, des pas compétents qui manquaient de souplesse. Des gens tout autour pour les regarder rêver. C’est la force de ces grandes villes qui anonymisent des millions de personnes tous les jours, elles permettent toujours de soutenir l’originalité de certains.

Les fleurs attendent

J’aurai aimé devenir urbaniste … Bien sûr, je travaillerais à reconstruire Port-au-Prince bien autrement que ce que tout le monde s’apprête à faire, mais surtout, je referais les coins de pays qui existent entre l’aéroport et la ville. Sortir en bus d’Orly pour se rendre à Paris n’a rien de très réjouissant au plan urbanistique. Ceux qui sont arrivés à JFK pour entre à Manhattan savent de quoi je parle. Quant à ceux qui ont atterri à Dorval (ou à Pierre-Elliot-Trudeau …), l’image de ces ‘tracks’ de chemin de fer juste avant qui précède le très beau secteur de l’échangeur Turcot, ils savent que la fin du monde peut exister… Je suis donc arrivé sur Paris avec plus de deux heures de retard et un décalage horaire amplifié par un confort plus que relatif dans l’avion. La ville est toujours aussi inspirante et je regrette presque d’avoir écrit que New York était ma ville préférée. La première chose à faire est bien évidemment de trouver un marchand de vin avant de finaliser les deux ou trois dossiers laissés en plan avant de quitter PAP. Ma mère arrive aujourd’hui et avec moi, des fleurs l’attendent. Il ne manque qu’elle !

jeudi 13 octobre 2011

L'heureuse et la malheureuse

C’est bien connu, les hommes sont toujours déchirés entre leur mère et leur blonde (compagne pour le français de France !). C’est un peu comme si l’amour était comme grand un bol de glace à la vanille, difficile de partager. Dès que tu tentes d’en séparer le contenu, la chaleur de l’outil fait fondre un peu des deux morceaux et tout se mélange à nouveau au fond du bol. Toute cette introduction un peu ‘crémeuse’ pour vous expliquer que je prends l’avion aujourd’hui pour Paris afin de souligner l’anniversaire de ma mère (gardez ça pour vous, mais elle fête ses 80 ans). L’heureuse quittera Montréal demain avec une partie de la fratrie pour venir me rejoindre. On y passe une semaine. La partie déchirante de l’affaire, est que ma blonde n’est pas en mesure de nous accompagner, la malheureuse est confinée à PAP par le travail. Je vous écris de là-bas, je devrais être inspiré.

mercredi 12 octobre 2011

Liste d'épicerie politique

Je faisais une blague dans un mon billet d'hier concernant l'énoncé de politique du nouveau premier ministre désigné. Les demandes venaient de partout et touchaient tous les thèmes que vous ne pouvez même pas imaginer. Haïti libre publie en trois sections le texte de l'énoncé de politique, si vous voulez le lire, voici le premier lien, le deuxième lien et le troisième lien. Bonne lecture et surtout n'imprimez pas ces textes, la planète ne survivrait pas !

mardi 11 octobre 2011

Enveloppe charnue

La course à obstacle du premier ministre nouvellement désigné ne semble pas terminée. Après une ratification technique la semaine dernière, le premier ministre devait présenter sa politique générale sur laquelle les deux chambres doivent se positionner. Dans la politique générale, il y a les orientations du premier ministre et un cabinet ministériel. Les deux volets sont sur la table des négociations. Les demandes concernant les orientations concernent tout ce que vous pouvez imaginez, du départ de la Minustah, à la réforme de l’université d’État en passant pas la construction d’une route entre mon village et celui du voisin. Les députés et sénateurs ont concocté une liste d’épicerie tellement grande que même Costco plierait bagages … Intégrer toutes ces demandes dans un énoncé de politique impose un texte d’au moins 3000 pages, ou des généralités tellement grandes et inclusives qu’on ne dit rien de très concrets. L’autre volet concerne le choix des ministres. Les négociations qui avaient eu lieu avant le vote technique ne semblent plus tenir, 5 sièges seraient de nouveau sur la table de poker. À ces deux volets, s’ajoute un troisième problème ; certains sénateurs veulent reprendre le vote technique parce qu’il semble que certaines pièces sont évaluées aujourd’hui non conformes. Conille aurait fait un long séjour au Canada qui n’apparait pas dans son passeport haïtien, ce qui impliquerait qu’il voyage aussi avec un deuxième passeport et qu’à cet effet, il n’est pas un citoyen haïtien (Ayiti ne reconnaît pas la double citoyenneté). Ces petits contretemps imposent au premier ministre de reporter sa présentation attendue pour lundi dans un premier temps, remise à mardi et maintenant à jeudi. Cetout est cynique au cube : « En fait, à partir du moment où tu distribues des petites enveloppes brunes pour faire passer la première étape à ton premier ministre, tu dois comprendre assez vite que l’enveloppe se devra d’être plus charnue pour la deuxième étape. Si tu ne saisis pas cette réalité politique haïtienne, tu ne comprendras jamais rien. » Je lui ai demandé à qui il faisait référence dans cette dernière phrase et il m’a simplement répondu : « À ceux qui l’ont placé dans cette galère, la communauté internationale. En fait, ils n’ont jamais rien compris …»

lundi 10 octobre 2011

L'arrosé arroseur

Je sais, on écrit généralement l’inverse. Mais une des stratégies d’écriture est de placer un titre qui attirera l’attention du lecteur. Je parle de Paul Farmer, un être arrosé par la critique dans ce pays, qui s’est donné depuis un certain temps un statut d’arroseur. J’ai parlé du bonhomme il y a quelques semaines en réaction à ce qui se passait dans certains médias québécois où on faisait référence à son bouquin et à ses sorties récentes sur la nécessité de mieux outiller le gouvernement, au lieu de faire bêtement à sa place. Je ne le connais pas (même si j’entends plusieurs rumeurs sur le personnage) et j’avançais l’hypothèse que ses sorties étaient peut-être liées à une prise de conscience de l’impact de ses propres actions en Ayiti. Ma naïveté entretenue s’est faite ‘ramassée’ par plusieurs de mes collègues (des expat) qui n’en finissent plus de critiquer le bonhomme, les extravagances de son organisation, l’absence de collaboration avec les autres partenaires ou encore le ‘parallélisme’ de ses projets avec les intérêts du ministère. Son dernier boulet concernerait la construction d’un hôpital gigantesque à Mirebalais, hôpital tellement gros et moderne que jamais le ministère ne sera capable d’en assure la gestion et l’entretien. Pas de ressources humaines à mettre dedans ni davantage de kob. Parmi l’ensemble des éléphants blancs construits par les coopérations, ce serait le plus gros ! Mais là ou le bonhomme chatouille un peu les haïtiens et certaines coopérations, c’est dans son association avec Aristide et les cubains. La Fondation d’Aristide a recommencé à donner des cours universitaires il y a quelques semaines en lançant une première cohorte d’étudiants en Fac de médecine. Les cubains donnent un coup de pouce pour la formation et Farmer offrira ses espaces pour les stages (il enseignera également dans cette faculté). Tout ça sous le nez d’un ministère qui ne reconnaît pas cette faculté de médecine et qui en conséquence, ne devrait pas reconnaître les diplômés qui en sortiront. Belle bataille politico-technique en perspective, bataille qui permettra peut-être à Aristide de réapparaître sur la place publique. On ne sait pas très bien avec quoi Farmer arrose le feu ?

dimanche 9 octobre 2011

Revenir en chaloupe

Après les visites répétées de la représentante canadienne de la Reine d’Angleterre, on a droit cette fois-ci à une vraie visite royale. La Reine d’Espagne est en ville. Elle a visité des écoles et un chantier où l’on construit une usine de traitement des eaux financés par ses commettants. Il y a autour de ce projet de construction le même genre de difficultés que le gouvernement canadien a eu en finançant la construction d’une prison, d’une usine de traitement des déchets et un hôpital : Des travaux arrêtés au début ou à la fin par des familles qui se disent ‘propriétaires’ du terrain où le projet prend forme. Disons que le cadastre dans ce pays est tellement bon qu’il force le président à intervenir en déclarant certaines zones d’utilité publique tout ça pour éviter des débats devant une court qui pourraient durer des années. Il exproprie sans dédommagement des propriétaires sans avoir vraiment les moyens de distinguer les vrais des faux, tous ce beau monde exhibant la kyrielle de papiers notariés qui auraient pu confirmer leur statut de propriétaire. Mais bof, un papier en vaut toujours un autre. On a croisé sur la route 9 ce samedi matin très tôt les convois de la Reine et celui du Président. Toute la circulation en direction de la Côte des Arcadins avait été ‘stationnée’ sur le bord de la route, le temps que les 18 voitures et 22 policiers à moto qui accompagnaient la Reine passent. Une minute plus tard, même manège, on se re-stationne sur la droite pour regarder un deuxième bataillon tout aussi imposant, celui du président. C’est la quatrième fois en quelques mois que le cortège qui assure la sécurité du président dans ses déplacements se trouve sur notre chemin. Samedi matin, je pensais à tous ceux qui ont été expropriés par des décrets présidentiels et je me suis questionné si mon permis de conduire haïtien et les papiers de la voiture étaient valides. On n’a pas pris de chance, on est revenu en chaloupe.

vendredi 7 octobre 2011

Film d'horreur

Dans les zones de tension qu’il reste à apaiser, il y a cette question des camps. Simple question des camps. Ils seraient toujours près de 600 000 personnes à y vivre, tout ça près de 21 mois après bagay la. Au plus fort de la crise, on parlait de 1,3 millions de personnes. Le problème avec ces chiffres qui comptent plus de 0 que de réalité, c’est que vous trouvez toujours des gens pour vous dire qu’ils sont gonflés de malhonnêteté. Des gens qui auraient de vrais maisons bien droites, mais qui font se force à vivre dans les camps, conservant la certitude qu’un jour, la communauté internationale va leur payer une belle maison neuve. Il y a aussi ces rumeurs qui véhiculent l’idée que ces camps sont en fait vides, et qu’ils servent de repères aux gang criminalisées. Encore une fois, impossible de connaître la vérité. Ce qui dans un pays rempli de croyants, devrait être une ineptie ! Des gens des Nations Unies se seraient donc dits horrifiés par le fait que l’éléphant blanc de la reconstruction n’accouche que de souris depuis près de 2 ans. Horrifiés ! Wow. Ce qui est horrifiant quant à moi, c’est que des gens sérieux et brillants comme ces fonctionnaires internationaux, puissent sincèrement se déclarer horrifiés devant un public bien nourri que rien n’a bougé (ou presque) dans ce pays depuis le 12 janvier 2010. Non, messieurs et mesdames onusiens, rien (ou presque) n’a bougé. En fait, ce n’est pas tout à fait vrai. Il y a au moins 4 milliards de $ qui ont circulé entre les filtres flous et difformes de l’économie national avant de retourner d’où ils étaient partis. Si les fonctionnaires internationaux veulent réellement être horrifiés maintenant, je leur rappelle que les salles de cinéma vont offrir des centaines de films d’horreur pour la période de l’halloween ! Allez au cinéma, la fiction se confond avec le réel.

jeudi 6 octobre 2011

90 minutes

Quand on entend parler les politiciens du Québec, j’ose imaginer que c’est sensiblement la même tactique en France ou aux États-Unis, il y a le syndrome de la cassette. Le bonhomme ou la bonne-femme répète les mêmes phrases courtes qu’un spécialiste des communications lui a mis dans le cerveau, la même réponse peu importe la question. L’idée générale étant de marteler le même message simple parce que c’est bien connu, on est tous des cons incapables de comprendre une idée qui s’appuie sur plus de deux propositions. Keep it simple qu’ils disent… Ici aussi il y a la cassette politicienne, mais c’est généralement le modèle 90 minutes … On a eu droit à des discours, à des motions, à des motions sur la motion, cette dernière étant déjà la motion d’une autre motion. Huit heures de débat pour choisir un premier ministre sur ce qu’on devrait appeler un vote technique : Le bonhomme répond-il, oui ou non, aux exigences définies par la constitution pour accéder au poste ? Il a été sélectionné par 17 des 32 sénateurs. Un groupe de 8 (du parti l’Alternative) se sont abstenus, parce que techniquement, le dossier du bonhomme n’était pas valide selon les prescrits de la constitution, mais que politiquement, on ne pouvait plus attendre. Ne pas choisir, c’est choisir ! Le prochain vote quant à lui sera réellement ‘politique’, le premier ministre devant présenter son énoncé de politique. Les grandes idéologies gauche-droite-écologiste-nationaliste-décentralisatrice… vont permettre à tout le monde de recharger leurs cassettes de 90 minutes.

mardi 4 octobre 2011

Une marque dans l'histoire

Avec le début officiel des classes, je veux dire qu’à partir d’hier, tous les timoun peuvent mettre leur bel uniforme, l’environnement de la marche du matin s’est transformée. On rencontre plein de ces petits uniformes colorés sur lequel se transporte un sac à dos souvent plus gros que le porteur … Le bout de la route de Pèlerin 5 ressemble presque à une boîte de smarties ! Selon les chiffres du Ministère de l’éducation c’est 4 millions d’enfant qui devaient gagner les bancs d’école hier. De ce nombre, un peu plus de 700 000 devraient bénéficier de l’engagement de Martelly de rendre l’éducation gratuite, dont 100 000 enfants qui n’avaient jusque là pas eu accès à l’école. Une marque dans l'histoire selon certains journalistes. Martelly en a profité hier pour réitérer son engagement à ce que d’ici la fin de son mandat, tous les enfants aient un accès gratuit à l’école, ce qui en fait serait conforme à la constitution nationale. Pendant que Martelly profitait de ce rare moment de réjouissance dans sa courte épopée présidentielle, les sénateurs quant à eux annulaient la séance de ratification du premier ministre. Remise à aujourd’hui officiellement. Comme quoi, tout ne peut pas toujours bien aller.

dimanche 2 octobre 2011

L'impatience

Bon, parlons politique, ça fait longtemps ! Asefi m’en veut un peu, je ne parle presque plus d’elle. Cetout, son frère, s’en fout un peu plus. Après un passage éclatant (87 sur 87) à la chambre des députés, Conille, le troisième premier ministre désigné, devrait sortir couronné du vote des sénateurs qui devrait avoir lieu lundi. Gagnant, mais un peu égratigné. Si la commission de la chambre basse avait donné un 100% à son dossier technique, la commission sénatoriale a quant à elle rejeté quelques unes de ces pièces. La plus significative, celle dont tout le monde parle, réfère à cette exigence ‘technique’ de la constitution de résider dans le pays depuis 5 ans. Le bonhomme travaillait pour les Nations Unies dans un pays africain ou encore pour Bill Clinton (de New York/Washington) dans sa fonction onusienne de représentant spécial pour Haïti. Les sénateurs qui ont formé cette commission auraient donc conclu que le dossier est ‘techniquement’ incomplet, mais proposeraient quand même à leurs collègues de faire un vote ‘politique’ en acceptant le désigné. La conjoncture nationale exigerait que le texte de la constitution soit un peu bafoué.
-Bafoué, bafoué !! Rien dans cette constitution n’est respectée. Les politiciens s’en servent avec zèle quand ça fait leur affaire – parler de ‘leurs affaires’ serait plus pertinent !! Depuis le début de notre histoire libre, nous sommes bouffés par les politiciens. C’est décourageant.
Asefi vient de s’enflammer de nouveau. Je lui demande si elle ne pense pas que le bonhomme peut quand même faire un bon travail.
-Je n’en sais rien, personne ne le connaît vraiment sauf pour savoir qu’il navigue dans les hautes sphères diplomatiques depuis plusieurs années. Il n’a pas vraiment eu d’impact sur notre société. En fait, ce qui est le plus troublant dans cette histoire, c’est qu’encore une fois, ce sont les blancs qui nous imposent leur choix. Vous n’alliez sûrement pas vous arrêter après nous avoir imposé les résultats du premier et du deuxième tours !
-En tout cas, moi, on ne m’a pas consulté !
-Arrête de faire l’imbécile, tu comprends ce que je veux dire. Tu sais très bien que la communauté internationale s’est une fois de plus impatientée devant notre incapacité chronique à décider ou à faire les choses correctement. Devant notre marronnage chronique en réalité.
-Est-ce que je décèlerais une petite contradiction dans ta dernière salve ? À la limite, une autocritique nationale ?
-Tu comprends très bien ce que je veux dire, tu l’as même écrit dans un de tes derniers billets sur les ONG. Il faut être deux pour danser le tango. On est plus dans une logique simple de cause à effet, mais dans une relation complexe (peut-être même compliquée) où les causes et les effets se confondent. On marronne parce qu’on sait que ça va être plus payant et la communauté internationale a besoin qu’on marronne pour légitimer son impatience.
-Pour l’impatience, on la sentait bien plus chez les haïtiens.
-T’as tout faux, la grande majorité des haïtiens n’attendent plus rien de leur gouvernement ou de la communauté internationale, ils ne sont donc nullement impatients. Qu’on tergiverse un mois ou dix mois pour la nomination d’un gouvernement, ça ne change rien à leur vie. Vous êtes les plus frustrés, vous ne savez plus à qui vous adresser pour dépenser vos millions en aide au développement.
-Ça me fait suer un peu quand t’as raison.
-Suer en Haïti, c’est tous les jours. On connaît.