mercredi 29 février 2012

Déraper dans une congestion !

Je me souviens d’avoir utiliser cette image dans l’un des presque 800 billets écrits sur ce blogue depuis le début. Quand je l’ai écrit ? Pas le goût ni le temps pour chercher. En fin de journée, le ciel était complètement congestionné. Un gros orage est venu nettoyer la première couche de saleté qui maquille cette ville. Ces nuages correspondait à l’ambiance du jour, la vie nationale est bouchée … la situation politique peut déraper. Voici certains de nuages qui congestionnent cette vie politique sur le bord de craquer. Rien ne bouge, condition idéale pour déraper.
1- Les sénateurs et les députés refuseront d’évaluer toutes propositions du président pour remplacer le premier ministre, tant que Martelly ne déposera pas les pièces qui pourraient clarifier la question de sa nationalité (ou de ses nationalités).
2- Les mêmes parlementaires veulent interroger le président sur l’émergence de la milice rose. C’est le nom donné à ces groupes qui ont investi les anciennes casernes pour s’entraîner au jeu de la guerre. On avait pensé que c’était d’anciens militaires, mais les petits bonhommes en vert (c’est aussi un autre de leur nom) sont majoritairement trop jeunes pour avoir fait parti de l’armée nationale. L’hypothèse qui grève le cerveau de plusieurs est que cette manifestation serait orchestrée par Martelly (ou ses proches) pour construire la milice qui permettrait de réinscrire le pays dans une dictature. Un stratagème copié sur ce que Duvalier avait instauré avec ses VPN, les Volontaires pour la nations. Mieux connus sous le nom de totons-macoutes.
3- Le président de la CONATEL, la Commission nationale des télécommunications, est interviewé par des journalistes qui souhaitent savoir si des médias perdront leur permis. Des rumeurs (encore elles) qui font de plus en plus de bruit à l’effet que l’exécutif voudrait couper le sifflet à certains journalistes. Ici, aucune ‘vraie’ nouvelle, que des craintes manifestes de journalistes que leur fonction sociale soit amputée. Le président de la CONATEL n’a pu que répéter qu’il ne savait rien de ce ‘souhait’ de l’exécutif, qu’il n’avait pas reçu le mandat, qu’il n’avait pas participé à une réunion qui visait la fermeture de certains médias, …
4- La sortie dans les médias d’une information dont il semble impossible de vérifier la véracité sur des accusations criminelles contre Aristide. Dans un contexte où il n’y a plus de gouvernement et où on soulignait (aujourd’hui) le ‘coup d’état’ qui l’a amené en Afrique du Sud pour 7 années. Les partisans d’Aristide se seraient colmatés avec les partisans de Martelly dans les rues du Cap-Haïtien et de Port-au-Prince.

mardi 28 février 2012

Les premiers seront les derniers

On pourrait analyser les liens qui se tissent entre le Venezuela et Haïti sous la lorgnette des tensions contemporaines qui caractérisent les rapports que les américains entretiennent avec Chavez. Et que Chavez entretient avec les américains itou. Comme trop souvent, cette analyse unidimensionnelle reste insatisfaisante. Dans l’histoire politique de la région, Haïti aurait joué un rôle important dans la longue lutte de Simon Bolivar pour dégager les pays d’Amérique du Sud du contrôle de l’Espagne. À cette époque (autour de 1815), Haïti est très riche (elle était la colonie la plus riche des Caraïbes au moment où l’indépendance de 1804) et est dotée d’une armée puissante. Haïti est également le premier pays à s’être doté d’une liberté politique en bottant le derrière d’un colonisateur. Rapidement, le pays se donne un budget ‘de développement international’ afin de soutenir la lutte antiesclavagiste dans les pays de la région et les États-Unis. Bolivar est venu trois fois se réfugier en Haïti afin de refaire ses forces, trouver de l'argent, des soldats et des armes pour continuer son périple de décolonisation. « Dois-je faire savoir à la postérité qu'Alexandre Pétion est le libérateur de ma patrie ? », dixit Simon Bolivar lors d’une rencontre avec le président haïtien, juste avant de libérer le Venezuela et devenir son premier Président. Une particularité de cette histoire est le fait qu’Haïti aurait souhaité que tout cet appui soit maintenu secret. Pétion ne voulant pas se mettre davantage à dos les puissantes coloniales (la France et l’Espagne entre autres) et les Etats-Unis qui s’étaient déjà lancé dans une guerre larvée pour empêcher le pays de se développer. Beaucoup pensent que ces pays ont réussi.

lundi 27 février 2012

Pas de main morte

Ici, tout le monde appelle à garder la têt frèt (tête froide) et enclencher rapidement le processus pour nous redonner un gouvernement. Martelly a déjà proposé trois candidatures pour discussions avec les deux chambres. Asefi m'a fait suivre ce texte ce matin (le lien), une vraie démonstration selon elle 'de la capacité de nos parlementaires de se draper dans la noblesse d'un propos afin de maintenir la grossièreté de leurs lucratives activités. Les arômes des toilettes sèches autour du camp du Champs-de-Mars sont plus respirables que l'odeur d'hypocrisie qui exhale de leur bouche.' Elle n'y va pas de maison morte...

dimanche 26 février 2012

Des vrais pros !

La semaine avant le Carnaval, j’avais eu droit à une leçon de Sécurité de la part de la coopération canadienne. On prend la chose au sérieux (je parle de la sécurité) et le climat politique incite les spécialistes à redoubler d’ardeur dans leurs messages. On nous conseillait donc d’être très prudents lors du Carnaval et parmi toutes les savantes consignes, nous mettant en garde contre les pickpockets, ceux-là même qui vous vident de vos biens comme des magiciens. Le bain de foule du Carnaval est un terrain de jeu de prédilection pour ces prestidigitateurs de la poche. Imaginez-vous donc qu'Ayiti s'est fait voler la vedette par Mtl, c'est là qu’un expert m’a subtilement et habilement soulagé de mon Iphone !! On mange tranquillement dans ce genre de resto de quartier où les tables sont proches les unes des autres, donc les clients adossés les uns aux autres. Deux clients s’installent à la table derrière et après 3 minutes, décident de quitter la place insatisfaits du menu, mais satisfait de ce qu’il y avait dans la poche de mon manteau. Des vrais pros ! Rien vu, rien senti, mais soulagé de quelques centaines de $ …

vendredi 24 février 2012

C'est cuit

C'est cuit ! On n'a plus de premier ministre, donc plus de gouvernement. On remet la danse sur la table pour quelques semaines en se souvenant que la dernière dans a duré près de 6 mois. Souhaitons-nous une petite vite !!!

jeudi 23 février 2012

Frileux

- Tu sais comment Duvalier a réussi à transformer son élection en dictature ?
- … raconte, je sens que ça te fait plaisir.
- Il a créé une milice, les fameux VPN (volontaires pour la nation) qui sont devenus les tontons-macoutes. C’est cette force qui l’a aidé à mater les factions de l’armée qui tentaient de le renverser.
- Tu me racontes cette histoire pourquoi ?
- Parce qu’on commence à comprendre qui sont ces ex-militaires qui ont repris le contrôle de trois casernes. La majorité des supposés soldats qui sont installés dans ces casernes n’étaient probablement pas nés au moment où l’armée nationale a été abolie par Aristide. À la blague, on les appelle les ‘petits bonhommes en vert’.
- Là, tu marronnes, tu ne réponds pas à ma question. Quel lien tu fais entre les deux évènements.
- Est-ce qu’il faut vraiment que je te fasse un dessin ?
- Je peux imaginer quel lien tu tires entre les deux évènements, mais j’aime bien quand tu te commets.
- On commence à se demander si ça ne fait pas partie de la stratégie du pouvoir en place pour installer une dictature.
- ‘Du pouvoir en place’… qu’est-ce que tu veux dire ? Ça ne veut pas dire grand chose, je te trouve un peu frileux.
- Ta référence à ‘frileux’ est liée au fait que tu as actuellement les deux pieds dans la neige ?! Je parle de manière diffus ‘du pouvoir en place’ parce que je ne suis pas certain que Martelly ait une pensée machiavélique assez développée pour mettre en action de ce genre de tactique. Je suis plutôt d’avis que des gens autour de lui peuvent être en mesure de développer une telle vision stratégique.
- Des gens autour de lui. T’es toujours dans le flou...
- Là, t’exagères, je n’irai pas te donner des noms. Surtout que je m’aperçois que tu relates une partie de nos conversations sur ton blogue. Pas question que je me mette la tête sur le billot.
- Je t’ai attribué un autre nom quand même, tu ne peux pas facilement être reconnu.
- Ouais… Cetout !! En passant, t’aurais pu mieux choisir.

mardi 21 février 2012

La tradition

La tradition peut souvent agir comme une prison, une grille qui nous empêche d’avancer, sortir d’où nous sommes. Je me souviens d’une discussion avec une proche du président qui expliquait le marasme de son pays par le fait qu’il n’y avait jamais eu de révolution. On a bien évidemment réussi à sortir les esclavagistes il y a plus de deux cents ans, mais malheureusement pas pour sortir l’esclavagisme dans les rapports sociaux : « Comme peuple, on ne sait jamais vraiment révolté. Il faudra qu’un jour, on force une vraie rébellion, que les choses changent vraiment. On est un peuple trop discipliné, il nous manque de rebelles. » Je l’avoue, j’ai souvent cette pensée secrète, il manque de rebelles dans cette société. Pas de petits rebelles, la délinquance individualiste étant une des plaies dans ce petit pays, mais de vrais dissidents, ceux qui font éclater les murs. L’haïtien qui conduisait le taxi qui nous ramené de l’aéroport Trudeau à l’appartement hier soir a parfaitement illustré cette idée : « À cause de mon éducation, celle que mes parents m’ont donné, je n’aurais jamais pu voter pour Martelly. » On entend souvent que les haïtiens sont de grands adolescents, un peu irresponsables. Il ne resterait donc qu’à passer à la phase du développement qu’on appelle la crise d’adolescence. Question de faire sauter le modèle défini par les parents, par la tradition.

dimanche 19 février 2012

Tradition

On prend l’avion demain matin. On nous annonce une température minimale (pour un maximum de froid !) de -10 sur Mtl. Quelques jours seulement, pour affaire seulement. Je vais revoir ce pays (le mien) qui serait sur le bord de la rupture selon la Une du Devoir du week-end. L’idéologie de droite de notre premier ministre nouvellement majoritaire commence à faire ses marques dans un pays qui a passé les 60 dernières années du côté gauche 9plus à gauche disons ...) de l’échiquier. Si longtemps à gauche qu’il en avait faite une tradition. ‘Le pluss meilleur pays du monde’ disait un ex premier ministre. Une tradition, ça existe pour être changée. Ici à PAP, à peu près tous les canadiens que je côtoie ne veulent pas remettre les pieds dans le froid. Et je ne parle pas uniquement de la température. Ils attendent une prochaine élection fédérale (peut-être 4 ans) pour entrer. Je leur conseille toujours d’attendre les résultats avant de réserver leur billet.

samedi 18 février 2012

Trouver une solution

Les employés de l’hôtel attendent l’afflux de clients en discutant de la situation politique. La discussion est intense. D’un côté, l’espèce de boss des serveurs qui se sort les veines du cou pour faire comprendre à ses collègues que ‘c’est le président, il a le droit de faire ce qu’il veut.’ De l’autre, un gardien de sécurité qui défend l’idée que même si c’est le président, il doit respecter la constitution. Deux visions de la vie politique qui, malheureusement, se sont manifestées de la pire des façons dans ce pays depuis au moins 60 ans : Un président qui fait ce qu’il veut et enracine son pays dans une dictature qui a duré 30 ans, ou des politiciens qui se servent de la constitution pour tout faire dérailler et maintenir un statu quo aussi chaotique que lucratif. Cetout a une analyse que je m’empresse de vous proposer.
- La crise actuelle réinscrit une fois de plus le pays dans ce démon politique qui caractérise sa sortie avortée de la dictature. D’un côté, les tenants d’un passé plus glorieux (en apparence du moins) qui avaient été forcés de faire le dos rond depuis des années, les deux tentatives pour sortir de force Aristide leur ayant glissé entre les doigts. Leur retour au pouvoir est plutôt compliqué, il leur manque trop d’outils pour œuvrer en paix, et reprendre le temps perdu. Ils ont perdu l’expérience du jeu politique et sont impatients, ils accumulent donc les erreurs. De l’autre, ceux qui ont profité des années lavalassiennes (le duo politique Aristide-Préval) pour s’approprier du gros bout du pouvoir législatif (on n’a qu’à l’impact du CEP) et contrôler la constitution, ou du moins ce qu’il en reste. Ceux là ont ce qu’il faut de munitions pour maintenir encore longtemps un rapport de force à leur avantage. Imagine qu’actuellement, ils sont les seuls à pouvoir offrir au président la tête du premier ministre … On appelle ça tenir quelqu’un par les couilles !!
- Et comment on se sortira de la crise ?
- On ne s’en sortira pas, ceux qui détiennent le pouvoir actuellement, qui contrôlent les deux chambres et qui ont la constitution pour eux, n’en n’ont aucun intérêt. Ils sortiront toujours vainqueurs de cette tension et leur nouvel adversaire est idéal. Son impulsivité et son peu d’égard face aux prescrits d’une démocratie moderne (tu n’as qu’à penser à la notion de séparation des pouvoirs) en font une proie trop facile. Ce sont ceux qui l’ont installé à la présidence afin de reprendre le temps perdu depuis le départ de Duvalier qui devront trouver une solution.

vendredi 17 février 2012

La trêve

Ce sera les vacances pour les prochains jours. Une trêve qui permettra à la vie politique de se calmer un peu. Le convoi du président a été attaqué aujourd'hui dans le centre-ville, un échantillon supplémentaire du climat qui règne ici. Le carnaval et ses trois jours chômés (de lundi à mercredi) nous donne une pause nécessaire. Il faut souhaiter qu'en coulisse, ceux qui alimentent la braise en profitent pour offrir autre chose qu'une nouvelle crise politique.

mercredi 15 février 2012

Borne fontaine

Jean Chrétien (un ancien premier ministre canadien) disait quelque chose comme : ‘Un bon politicien doit savoir marcher sur la peinture quand il s’est peinturé dans le coin d’une pièce’. Tactique politique qui permet aux politiciens de virer le capot de leur pensée, ou simplement de se sortir d’un pétrin. L’attention médiatique depuis quelques jours se concentre sur le premier ministre haïtien qui semble avoir décidé de ne pas marcher sur la peinture, mais de pousser le mur derrière lui.
- Il ne finira pas le mois de février à son poste me lance Cetout.
- C’est à dire ? - Depuis le début de cette bataille sur la nationalité des membres du gouvernements, il tient une position opposée à celle du président. Au conseil des ministres de lundi, il a maintenu sa position contre l’ensemble des ministres et le président. Il vient même de conseiller aux membres du gouvernement de répondre favorablement à la demande des sénateurs et de déposer leurs papiers. Il termine sa lettre en invitant les membres du gouvernement (de son gouvernement !!) à ne pas enflammer davantage un débat qui ne mènerait à rien. Il écrit : « Au moment où toutes les conditions psychologiques et financières semblent réunies pour le décollage du pays, les dirigeants et les acteurs politiques ont pour devoir de travailler à consolider la stabilité institutionnelle et gouvernementale, et à éviter qu'une nouvelle crise vienne compromettre l'harmonie des pouvoirs et la synergie des efforts pour la reconstruction nationale. » Il pousse réellement le bouchon.
- Peut-être joue-t-il la fonction de soupape ? Il saute pour éviter que tout le reste explose.
- Les sénateurs anti-martelly ne se contenteront pas d’un seul joueur. Non, mon sentiment est que c’est avec Martelly que le torchon brûle. L’arrivée inopinée du président dans sa résidence le premier février dernier est sûrement le signe d’une forte tension. Le gars ne marche probablement pas dans les sentiers que le président avait prévus pour lui et surtout, la pression est maintenue sur le président qui refuse de présenter ses pièces. Imagine que le premier ministre se rende voir les sénateurs pour leur présenter son passeport et ces derniers papiers de voyage, la scission sera intolérable.
- Le feu va prendre …
- C’est la braise qui couvre depuis des mois. Les tensions entre l’exécutif et le législatif sont devenues l’argument en or pour expliquer l’inertie du gouvernement. Peut-être que les prochaines législatives vont transformer la dynamique politique, mais je serais surpris, la capacité de maintenir le surplace actuel, un statu quo fortement lucratif, étant le seul enjeu réel de nos politiciens.
- Personne donc pour éteindre le feu ?
- Avec quel équipement !?!?

mardi 14 février 2012

Les amoureux

Souffler le chaud et le froid, courir deux lièvres à la fois ou manger à tous les râteliers, à vous de choisir. C’est un peu ce qui se dégage selon Marcus de la tactique martellienne des dernières semaines (« Une tactique, une tactique !!! Il faudrait quand même qu’il y est une stratégie pour commencer à parler de tactique … » me disait Asefi en lisant par dessus mon épaule). Au même moment où Martelly fraternisait avec l’ALBA* et son principal animateur Hugo Chavez, le premier ministre passait quelques jours avec les autorités politiques étatsuniennes. Martelly a même profité de son périple à l’ALBA pour inviter tout le beau monde à tenir sa prochaine réunion à Jacmel, et offrir une visite guidée du pays à Chavez et à Castro. On attend les deux leaders dans les prochains mois en Haïti. Cette semaine, c’est une délégation Onusienne dirigée par les États-Unis qui vient ici revoir le mandat des Nations-Unies (entre autres le mandat de la Minustah) et sonder les cœurs afin que l’aide puisse se transformer en développement économique pour le pays. On parle de zone franche entre autres et le premier ministre a profité de la venue de tout ce beau monde pour leur rappeler que plusieurs des milliards annoncés à New York il y a deux ans se font toujours attendre. Il y aurait théoriquement assez de dossiers (dont celui du financement de l'Armée national haïtienne) pour que chaque partenaire y trouve son intérêt, mais en affaire, comme en amour, l'exclusivité est une aspiration très forte. Quelle compagne partagera le repas du gouvernement haïtien en ce soir de Saint-Valentin ? La même qui partagera son lit ? * ALBA : Alternative bolivarienne pour les Amériques, une alliance de pays socialistes (lancée par le Venezuela et Cuba) pour combattre une zone de libre-échange entre les pays des Amériques favorisée entre autres par les États-Unis. À noter que Haïti a un statut d’observateur au sein de l’ALBA.

lundi 13 février 2012

Ne pas déranger


Aujourd’hui, tous ceux du gouvernement qui devaient se présenter devant les sénateurs pour montrer leur passeport et leurs papiers de voyage, tous ceux-là donc, ne se sont pas présentés aux rendez-vous. Réunion plus importante, un conseil des ministres en fait. On ne sait où cette crise va pousser tout le monde et pour le moment, rien ne se passe réellement. On ne fait qu’attiser un feu sans trop savoir s’il y a réellement une braise. Une guerre qui devrait tirer sa conclusion après le carnaval selon les rumeurs retransmises à l’une des fameuses radio-poubelle de la capitale. Selon l’animateur, on attendrait que le peuple arrête de s’amuser pour passer aux choses sérieuses. C’est bien connu, il ne faut pas déranger le peuple quand il danse, ni le gouvernement quand il travaille.

dimanche 12 février 2012

Weekend pré-carnaval


Pas le vrai, celui de Jacmel. Tout le monde sait qu’il y a le faux carnaval de Jacmel, celui que les blancs visitent, et le vrai qui aura lieu la semaine prochaine. C’est un peu comme une répétition générale aujourd’hui. Dimanche, lundi et mardi prochain, ce sera ‘la vraie affaire’. Cette année, il y a parfum de scandale autour du ‘vrai’ carnaval national. Il a toujours eu lieu à PAP (selon la mémoire des historiens qui sont ici comme les gérants d’estrade au chevet de ‘nos Canadiens’, tous des experts) alors que cette année, on fait une première, on le déménage au Cayes. Une ville du sud. Offense aux bonne mœurs et à la culture nationale-ancestrale, un peu comme si le Bonhomme Carnaval sortait du fleuve à la hauteur de Trois-Rivières parce que la terrasse Dufferin était en réparation. Inimaginable… Ici, c’est parce que le Champ de Mars est encore rempli de campeurs et que les fêtards et les campeurs, à part au Noël des campeurs, ça ne fait pas toujours bon ménage. Le gouvernement a donc choisi de déplacer le carnaval national du côté des Cayes, décision critiquée par tous et qui au plan de la logistique, semble un peu incongrue. L’ex-candidate à la présidence, l’intellectuelle-normalement-retenue-madame-Manigat a même pris le micro d’un poste de radio pour claironner que cette décision du gouvernement était une tentative du pouvoir de procéder plus facilement à des activités de blanchiment d’argent, le coins des Cayes ayant la réputation d’être un des terrains de jeu préférés pour les trafiquants. On ne sait toujours pas si le tout aura lieu au Cayes, l’argent qui devait venir de l’État se ferait toujours attendre et le responsable de la fête vient de donner sa démission. Une chose est certaines, les gens de la capitale vont quand même faire leur carnaval. Ils s’entrainent tous les dimanches depuis le début janvier et seront donc prêts pour le prochain weekend. Ce soir, en revenant de la mer, on a croisé ces fêtards qui font peur à tous ceux qu’ils croisent sur la rue. Vous les trouverez également sur youtube.

vendredi 10 février 2012

Nulle part

Les informations relatives à la remobilisation théoriquement non coordonnée des anciens militaires se confirment (http://www.alterpresse.org/spip.php?article12354). Cetout se questionne sur le fait que personne n’aurait financé ou organisé cette remobilisation dans au moins trois zones du pays :
- Difficile de s’imaginer qu’il n’y a pas une main qui pousse ces anciens militaires à se réinstaller de la sorte. En plus, on mentionne qu’ils sont lourdement armés, tellement que les policiers de la PNH ne se sentent pas en mesure d’intervenir pour les sortir des bases qu’ils ont réinvesties.
- Impossible d’envisager que la Minustah puisse faire le travail de les déloger !
- T’as raison, ce serait mettre le feu une mèche. Pis tu sais qu’avec la Minustah, la mèche est déjà trop courte. C’est un peu bizarre ce mouvement dans le contexte politique actuel d’incertitude sur l’avenir de la présidence, d’une remobilisation officielle de l’armée qui retarde et d’une démobilisation graduelle annoncée de la Minustah, … Ceux qui sentent venir des aromes de dictature doivent avoir les narines hautement affolées.
- Certains militaires mentionnent qu’ils n’ont jamais été formellement démobilisés. Que dans la constitution, l’armée existe toujours et qu’à ce titre, ils ne font que reprendre la place qu’il leur revient. Dans ce contexte, il ne ferait rien d'illégal.
- C’est là que tu vois que le mouvement est dirigé. On peut facilement déceler dans ces manoeuvres leur intérêt de redéfinir un rapport de forces politique qui leur avait donné le haut du pavé pendant de longues années, ou l’étage jute en dessous. Le plus triste, c’est que ça semble marcher. Le vide politique actuel fait en sorte que ni le gouvernement ni la PNH semblent en mesure de les sortir de là. Quant à la Minustah, elle a les deux mains liées.
- Ça peut nous amener où ?
- Comme d’habitude, nulle part !!

jeudi 9 février 2012

Cul de sac

‘Les ceuz’ (ou l’équivalent tout simple du terme ‘ceux’ dans un bon français) qui nous racontent toujours que c’était meilleur dans le bon vieux temps, ces ‘ceuz-là’ m’énervent presque systématiquement. J’écris ‘presque’ dans la mesure où il existe mon idole Jean Dion, le seul à arriver à manipuler le concept du ‘bon vieux temps’ d’une manière convenable. Depuis que je suis ici, il y a des ‘ceuz’ me rappellent que dans le temps de Duvalier, c’était le bon vieux temps et qu’Haïti était un vrai pays. Fier, digne, propre, respecté, … Pas un ‘n’importe quoi’ comme Haïti serait devenu depuis que des coins-coins ont forcé Baby Doc à partir sans avoir le temps de faire sa valise. Le bug actuellement, c’est que le discours de ces ‘ceuz’ commencent à prendre parfumer un peu plus l’air ambiant.
- Tu sais, le problème c’est que la perception qu’on aurait rien réussi depuis le départ de Jean-Claude est bien entretenue et de ce fait, donne raison à ces gens qui souhaitent le retour de la dictature.
Asefi a l’air débitée en prononçant cette phrase.
- Ce n’est pas si simple que cela ! Si les gens ont pris la rue pendant des mois jusqu’à déterrer le cadavre du père pour dissoudre ses restes, ce n’était sûrement pas parce que c’était le bonheur.
- T’as raison. La situation de la population s’est généralement améliorée depuis 26 ans, mais ces gains restent insatisfaisants et il est facile de nous peindre en rose une réalité passée. De là à vouloir sauter dans une dictature, il y a un pas que la population n’accepterait pas.
- Généralement pas besoin de l’accord de la population pour installer une dictature !
- Ouais… Duvalier avait pu se servir des tentatives de coups d’État et la guerre contre les communistes afin d'obtenir l’appui des américains pour installer sa dictature, mais là, le contexte est nettement différent.
- On entend ce genre de préoccupations un peu partout, mais j’ai de la difficulté à y accorder une quelconque crédibilité à l’éventualité d’un coup d’État qui réinscrirait le pays dans une dictature.
- Ce n’est pas parce qu’on ne retournera pas à cette dictature, qu’on ne risque pas de passer pas dans une nouvelle zone de turbulence. Imagine qu’avec un président déchu à cause de sa nationalité, des militaires qui se sont remobilisés en prenant le contrôle de deux anciennes casernes et une opinion publique bien entubée au discours anti-Minustah, le contexte politique pourrait manquer de stabilité.
- Les gens me semblent effectivement fatigué de cette instabilité, cette guerre continue entre les parlementaire et l’exécutif.
- On peut certainement avoir le sentiment que ce pays est ingouvernable. Génétiquement ingouvernable. Tu vas entendre plein de gens te raconter que le peuple et ses politiciens n’ont pas la maturité nécessaire pour vivre dans une démocratie, qu’on a besoin d’un dictateur.
- On est dans un cul de sac si je comprends bien.
- Probablement, impossibilité de se gouverner adéquatement et plus aucune des conditions nécessaires pour renverser l’État. On est dans un culs de sac.

mardi 7 février 2012

L’équilibre

On rencontre toujours ces camions où des humains sont accrochés dans un équilibre qui me semble toujours précaire. Pour la petite info, on suit un bus qui roule à plus de 110 km au moment où je capte cette photo !! Outre ces haïtiens en équilibre sur des tacots, le journalisme haïtien est peut-être en train de perdre l’équilibre. Pour être honnête, je n’ai jamais cru à l’objectivité comme position intellectuelle, entre autres dans le domaine de la nouvelle et de son analyse. J’ai passé 15 ans de ma vie professionnelle dans le secteur de la recherche sociale, assez pour ne plus croire possible tout raisonnement ‘objectif’. Ça ne veut pas dire qu’on fait ou pense n’importe quoi, mais je préfère parler de la notion de subjectivité consciente ou encore d’intersubjectivité. Les journaux français me semblent plus clairement identifiés à un courant de pensée, alors que chez nous au Qc, il sont encore trop nombreux à se bercer dans l’idée de l’objectivité. Les journalistes haïtiens sont à cet effet en train de perdre un peu de leur vernis. Je ne parle pas de ces animateurs de radio qui n’avaient plus de vernis à perdre (des ‘vrais’ journalistes pourraient vous dire que ces animateurs ne sont justement pas des journalistes), mais de gens pour qui j’avais développé une certaine estime au cours des dernières années. Le président et les médias ont eu plusieurs occasions de se bagarrer depuis un an et l’altercation de la semaine dernière (le président a refusé de répondre à une question d’un journaliste après lui avoir demandé pour quel média il travaillait) ouvre la porte à certaines prises de position moins ‘molles’. Aujourd’hui, le 7 février, on soulignait un peu partout le départ de Duvalier (1986), donc la victoire de la démocratie, des droits de l’homme, de la liberté … L’évènement du jour a permis à certains journalistes de tisser des liens avec la dernière sortie du président, les accusations de violation des droits de l’homme contre Duvalier qui ne sont pas retenues, la présence de Duvalier aux côtés de Martelly lors de la cérémonie de commémoration des deux ans du tremblement de terre, les accointances duvaliéristes de proches du président, … Tout un argumentaire pour nous souligner que la démocratie haïtienne était sur le bord d’un précipice, à deux pas de perdre une fois de plus un équilibre toujours fragile.

lundi 6 février 2012

Petites brèves

Ça fait déjà longtemps que je n’ai pas donné des petites nouvelles brèves. Preuve supplémentaire que la ‘normalité’ reprend une partie de sa place, les balles de tennis ont recommencé à voyager sur les terrains du chic Pétion-Ville Sport Club. Dans les jours qui ont suivi bagay la, le club est devenu le camp de base de l’armée américaine (les courts de tennis entre autres), alors que le golf de neuf trous est devenu le plus grand camps de PAP. À partir du moment où la riche clientèle du Club recommence à suer en s’envoyant des balles ramassées par de petits haïtiens ‘noirs’. La sécurité de l’ambassade nous achemine un courriel aujourd’hui pour nous demander d’être prudents : D’ex-soldats ‘lourdement armés’ circuleraient dans les rues de PAP pour manifester. Manifester pour quelle raison ? On n’en sait rien encore. À la radio, on nous explique qu’une ancienne base de la Minsutah est maintenant occupée par d’ex-soldats armés qui ne veulent pas quitter la place. On tenterait de les convaincre qu’ils ne sont pas armés comme des civils et qu’à cet effet, on serait en situation de les arrêter, mais les ex-soldats maintiennent qu’il sont toujours des membres de l’armée nationale. On ne sait pas trop comment la chose se règlera, mais la police nationale aurait déjà manifesté son inquiétude quant à sa capacité à gérer ce dossier. À la radio cet après-midi, un journaliste nous raconte que la guerre entre l’exécutif et le législatif s’est gangrainée un peu davantage dans les dernières semaines. Le dossier de la nationalité du président – sur lequel des sénateurs enquêtent – pourrait nourrir, toujours selon le journaliste, les rumeurs encore quelques semaines. Martelly refuse toujours de fournir ses pièces et notre expert souligne que les sénateurs ont une bonne emprise sur lui qu’ils n’auraient pas intérêt à laisser tomber. Surtout que le journaliste nous a clairement laissé savoir que les sorties récentes du Président contre le médias pourraient lui offrir une couverture médiatique non favorable.

samedi 4 février 2012

La semaine à l'envers

Merci à tous de chanter avec moi : «Lundi matin, le roi, sa femme et son p'tit prince Sont venus chez moi pour me serrer la pince Mais comm' j'n'étais pas là, le petit prince a dit: Puisque c'est comme ça, nous reviendrons mardi Mardi matin … » Je suis certain que vous vous souvenez de cette comptine idiote que, ti-cul, on nous faisait répéter ad nauseam pour que le trajet en bus apparaisse moins long. Je connais le truc pour l’avoir consciemment exploité lorsque adolescent, j’avais la responsabilité d’animer des dizaines de timoun dezod. Hier, je suis entré dans un magasin de jouets et la comptine jouait. Le disque avait certainement quelques brèches et donc, le disque ‘sautait’ comme on dit au Qc. On passait du lundi au jeudi pour revenir au mardi avant de sauter à nouveau à dimanche … La même abrutissante répétition dans le désordre. J’ai mentionné à la vendeuse que son disque avait quelques difficultés avec la suite habituelle des jours de la semaine et qu’elle devait probablement le nettoyer. Elle ne semblait pas me comprendre et le temps qu’elle zip la carte de crédit et ensache le coffre à outils pour un boss menuisier de 3 ans, la comptine m’a presque amené sur le bord de l’aliénation.

vendredi 3 février 2012

Pays de coqs



En faisant la petite marche du matin, j'ai filmé ces hommes en train de s'énerver devant deux coqs. Deux coqs qui avaient, l'un sur l'autre, à se faire une meilleure condition. Je racontais l'événement à Asefi qui me lance "Il se passe la même chose avec nos politiciens depuis quelques jours. La tension a monté d'un cran entre le président et les élus. Des rumeurs de bataille entre le président et des parlementaires dans la maison du premier ministre cette semaine, le président qui se coince avec un journaliste qui le questionne sur son passeport (sa nationalité) juste avant de prendre l'avion ... C'est un vrai pays de coqs !"

jeudi 2 février 2012

Pensée magique


Manifestations des professeurs de la Grande-Anse aujourd’hui, ils n’ont pas touché depuis 4 mois. Embauché dans le cadre du projet des écoles gratuites lancé par la mouvance présidentielle, les profs attendent toujours de recevoir leur premier salaire. Il y a des grandes langues pas trop propres pour nous raconter que le Président a menti, d’autres pour dire que c’est un ‘relais’ dans le système de financement qui s’est sauvé avec l’argent, ou encore pour avancer l’idée que les profs mentent pour être payés en double… Je vous laisse choisir. Ce qui m’intéresse dans cette histoire, est cette pensée magique toute politicienne (je ne fais pas référence à ce qui se passe uniquement ici en Haïti) qui nous laisse croire que tout est simple. Que des problèmes structuraux, complexes et historiques (comme l’accès à l’éducation) se règlent en dix minutes sur le coin d’un engagement politicien. Je pense en écrivant ce billet à une nouvelle parue dans un journal canadien il y a quelques semaines : De tous les dossiers du parrainage d’urgence mis en place au Canada au lendemain du tremblement de terre, 50% ont été réglés… Mon petit livre bleu attend toujours.  

mercredi 1 février 2012

Étonnantes coïncidences


Le 12 janvier 2010, je passais à l’épicerie où tout s’est passé 30 à 45 minutes plus tôt qu’à l’habitude. Le soir, le festival littéraire Étonnants voyageurs avait planifié une soirée de rencontres avec des auteurs, dont Dany Laferrière. Je me rendais à l’épicerie pour faire le repas plus tôt et pouvoir ainsi me rendre à cette rencontre. Vous devinez que la rencontre n’a pas eu lieu, mais j’ai tout de même eu un brin de jasette avec Danny Laferrière le lendemain dans sa chambre à coucher, c’est à dire le terrain de tennis de l’Hôtel Karibe où il avait passé la nuit. Ils étaient peut-être une centaine à avoir partagé la même chambre cette nuit là ! (Pour la petite histoire, les journalistes de La Presse qui accompagnaient l’illustre auteur avaient dormi à la maison et nous étions allés le saluer.) Un long détour pour vous dire que les deux évènements refont l’actualité depuis quelques jours.  Ce matin à la radio, on a eu droit à une petite idée sur ce qui se trame du point de vue ‘tremblement de terre’. La République voisine a été frappée par plusieurs secousses au moins 4 fois depuis le début de l’année, ce qui confirmerait selon les experts américains le fait que le tremblement de terre du 12 janvier 2010 a relancé les activités de la faille Enriquillo et que la venue du grand soir serait proche. Quand ? Personne ne le sait , mais proche quand même. Ce bout de la faille aurait eu le même genre d’activités soutenues sur une quinzaine d’années avant de donner le grand tremblement de terre de 1770 et se clamer pour 240 ans. L’animateur racontait tout cela juste avant de recevoir les organisateurs du festival littéraire, ceux là même qui avaient dormi avec Dany Laferrière sur le tennis du Karibe. Il y a de ces coïncidences …