mardi 31 mai 2011

Les habitués


L’habitude est cette faculté qui peut rendre aveugle, sourd ou anosmique (perte de l’odorat). Dans certains cas hautement pathétiques d‘habitude, les trois facultés sensorielles s’éteignent en même temps. C’est  à peu près ce qui se passe ici autour des camps. Il y a bien évidement quelques bourrasques entourant la situation des camps qui ont suivi notre cher ami bagay la dont on ne parle presque plus. L’habitude je vous dis. Des bourrasques comme celle du maire de Delmas la semaine dernière qui est entré dans un camp (plus ou moins un vrai camp selon des rumeurs) avec des bulldozers pour débarrasser la population de ces cachettes à brigands que seraient devenus les terrains de camping urbains. Il y a aussi certaines bourrasques soufflées par des organisations internationales qui souhaitent mieux reloger les sinistrés. Mais sur le fond, le nombre de sinistrées serait passé de 800 à 600 000  au cours des derniers mois. Vous dire qu’il reste du travail à faire … Hier, en passant dans un des grands camps du bas de la ville, je suis sorti de la machine pour faire un petit safari photo de 3 minutes. Immortaliser le tout pour faire revivre la réalité, celle que l’habitude transforme malheureusement en souvenir.

lundi 30 mai 2011

Chita !


Chita, ou assoyez-vous en kreol. On entend cette phrase dans presque tous les lieux où l'on pose les pieds ... avant de poser le cul. Les haïtiens détestent vous voir attendre debout, même 30 secondes, c'est avouer que l'on vous a mal accueilli. J'avais un rendez-vous la semaine dernière et la réceptionniste était dans ses petits souliers, je voulais rester debout. "Vous ne comprenez pas monsieur, madame va comprendre que je vous ai mal accueilli." "Avec votre sourire madame, je n'arrive pas à m'imaginer que l'on puisse être mal accueilli, les fesses bien assises sur un chaise ou non." Ma charmeuse tentative n'a pas eu d'effet contre les attentes socialement définies d'une  patronne qui tient à un certain statut. J'ai pris un temps à comprendre la signification de l'intensité de cette proposition et j'avoue que je lutte toujours un peu contre elle. Comme une stratégie pour créer un moyen de pression : "J'attends, je suis pressé." Parce que faire attendre ici est aussi un moyen d'inscrire son rapport de force, son statut. C'est la même chose chez nous, mais la ponctualité est aussi une qualité qui démontre que "l'autorité" a le contrôle sur son propre agenda. Elle fait contrepoids sur l'élasticité du concept de présence, "j'ai le statut, donc je suis là !" Pour le moment, chita et attendez.

dimanche 29 mai 2011

Un petit chat est un chaton


«Un petit chat est un chaton. Le chaton buvait du lait.» Merci de copier ces deux phrases, c’est votre exercice de la journée. C’était du moins l’exercice du 27 mai 2011 que des élèves d’une classe de Kenscoff où on a passé une bonne partie de l’après-midi d'hier. Ils sont plus d’une soixantaine de timoun de 4 à 16 ans à suivre des cours dans cette salle grande comme mon salon et ma salle à manger combinés (si vous êtes gentils, je vous ferai visiter notre maison un jour...). Probablement 4 ou 5 tableaux pour un contenu et des exercices adaptés aux différents groupes d’âge, tout ce beau monde dans le même espace. La tolérance, j’en suis certain maintenant, est une qualité qui se développe. Ces jeunes, et cette classe en fait, sont dans la mire de notre nouveau président qui veut veut voir sa principale promesse se concrétiser dans au moins un département (le Sud) pour septembre prochain. Le gars (et son acolyte premier ministre toujours en attente de confirmation) avance sérieusement avec son projet d’écoles gratuites et obligatoires, un peu trop sérieusement au goût de plusieurs. Certains cette semaine invitaient notre nouveau président à tenter de réfléchir à la nuance entre rapidité et précipitation... Il a donc lancé cette semaine le Fond National pour l’Éducation (FNE) qui sera entre autres financé par des taxes perçues sur les appels et transferts entrant de l’international, de la diaspora en fait. Asefi fait partie de ceux qui trouvent que le nouveau président va trop vite et bouscule un peu trop les habitudes politiques du pays. Déjà, des députés réagissent en rappelant au Président que même s’ils partagent sa vision pour l’enseignement, qu’il doit quand même respecter les lois en vigueur et respecter le ‘législatif’ s’il veut faire avancer ses dossiers. La diaspora serait-elle aussi un peu sur les dents dans la mesure où au même moment où on lui demande de financer cet engagement, le président et son acolyte proposent d’intégrer le Ministère des Haïtiens vivant à l’étranger au sein du Ministère des affaires internationales. On voit donc notre nouveau président s’inscrire dans ses premières luttes politiques avec une fougue que plusieurs qualifient de juvénile. Les règles ‘en vigueur’ dans la vie politicienne haïtienne s’en voient quelque peu bouleversées et le pays compte assez de vierges ‘offensables’ pour s’en scandaliser. En fait, c’est la guerre de fond annoncée qui se joue actuellement : Transformer ou maintenir le système politicien en vigueur. Martelly a inscrit son discours de campagne dans ‘l’anti-politicien’ et dans le changement alors que ces adversaires parlaient de lui comme un incompétent inculte de la vie politicienne nationale. Comme le choix de son premier ministre, l’éducation devient l’espace où le rééquilibrage de la nouvelle réalité politique s’opère. À la manière du déroulement de la campagne électorale (comprendre les débats entourant les résultats des deux tours), Martelly a un allié de taille dans le dossier de l'éducation. La communauté internationale et les américains en particulier auront beaucoup d’intérêt à aider le nouveau président à réaliser son engagement de poser les fesses de tous les timoun haïtiens sur un banc d’école.

mercredi 25 mai 2011

En attendant ton retour


La pluie a réinvité sa saison à danser cette année encore. Comme toujours bien évidement ! On est donc depuis quelques semaines en période des pluies, période qui devance celles des ouragans (on en parlera quand ce sera le temps, une chose à la fois). Avec la nouvelle saison des pluies, se passe ce que tout le monde appréhendait, une recrudescence du choléra. On revoit les tap-tap transformés en ambulance circuler dans les rues. Ce n'est pas encore la gadoue, mais ça pourrait le redevenir. En fait, les ONG et les organisations internationales avaient plié bagages en janvier au moment où l'épidémie s'essoufflait. "Ils attendaient une autre catastrophe pour pouvoir tirer des fonds, venir tout chambouler dans le système pour théoriquement nous aider, repartir dès que la crise ralentira et attendre la prochaine saison des pluies pour relancer leur machine à billet. Le marché de l'aide m'exaspère..." J'ai répondu à mon collègue qui manifestait son impatience qu'ils n'auront peut-être pas le temps de repartir, les ouragans sont aussi à nos portes. "Tu sais, les charognards de la misère ont trouvé un buffet en Haïti, ils n'on ni l'intention ni l'intérêt de partir trop loin." Je ne suis pas tout a fait certain de partager pleinement l'opinion de mon collègue, mais une chose est certaine, on n'a pas fait grand chose pour ramener les messages et les activités de prévention, sûrement une stratégie qui avait permis de ralentir l'épidémie en janvier dernier. Il faut dire également que le gouvernement (et Préval qui avait fait de la lutte au choléra son activité principale à l'automne) n'a rien fait depuis janvier pour prévenir une trop forte recrudescence. Pas vraiment le temps, tout ce beau monde était en élection.

mardi 24 mai 2011

Un mulâtre qui croit en Dieu

Avec le chauffeur aujourd'hui, on écoutait l'entrevue du Premier ministre désigné. Le gars, avec son patron Martelly, s'est lancé dans une vaste campagne d'auto-promotion. Daniel Gérard Rouzier a été choisi par Martelly pour devenir le prochain Premier ministre. Ami d'enfance de Martelly, le gars vient d'une famille de politicien, son père ayant été un ministre important de Duvalier. Lui, il avait fui la politique  pour réussir dans la business. Il est propriétaire de la plus grande chaîne de distributeurs de véhicules neufs en plus d'avoir une compagnie de production d'électricité. Martelly l'a choisi pour ses réussites en affaire, ses non-accointances avec le monde politique des 25 dernières années et le fait qu'ils partagent la même vision du développement du pays. Après s'être fait tiré grandement l'oreille par son ami le Président, il a accepté de servir sa nation. Le gars a vécu assez dur les dernières années, deux membres de sa famille ayant été enlevés. Il voulait donc éviter l'espace publique pour le reste de sa vie, mais ses amitiés ont eu le dessus. Le gars est fortement imprégné par la religion (il a même publié des livres en lien avec cet engagement) et comprends le mandat proposé comme Martelly comme une mission que Dieu lui donne. Dans l'entrevue que j'écoutais avec Jean-Claude dans la voiture, l'animateur lui a demandé comment il allait réussir à surpasser le fait que ce soit un mulâtre ? Il a habilement répondu que la couleur de la peau n'avait rien à voir avec l'engagement envers la nation et la capacité des gens de participer au développement de leur pays. Jean-Claude m'a dit que s'il était le choix du Président et que s'il était réellement engagé auprès de Dieu, les haïtiens n'avaient rien à cirer de la couleur de sa peau. Il lui reste maintenant à convaincre les députés et sénateurs de lui faire confiance. Là, on ne sait pas si c'est le vert des billets américains (et du visa dans le passeport) ou la couleur du parti politique qui feront la différence.

dimanche 22 mai 2011

Petit tour en OVNI


Vous ne serez pas surpris, j’ai des collègues très croyants. Durant la journée, Jean-Claude écoute intensément des preachers protestants (Baptistes si je comprends bien) qui hurlent leur foi en Jésus à la radio. Tout y passe, je vous laisse imaginer. J’ai d’autres fervents collègues qui font des vacances de réparation, des semaines de réconciliation, … Cet engagement de plusieurs se déroulent toujours dans la tolérance. « Labadie, si t’es athée, tu vas aller en enfer. » Mon « S’il y a du Barbancourt… » fait toujours sourire les gens. Une seule collègue a travaillé fort pour me convertir à quelque chose (Témoins de Jehova si je ne me trompe pas), assez pour être un peu déçue (peut-être choquée même) de mon apathie à croire. Je reste impressionné de cette très grande ferveur de tous en leur église (et elles sont nombreuses), mais également à cette ouverture à voir les autres partager d’autres croyances, même celles qui ne se veulent pas des croyances religieuses. En fait, la seule petite zone de tension concernerait le rapport de certains groupes protestants face au vaudouisme. Comme beaucoup de tensions religieuses, il ne faut pas chercher le conflit dans les interprétations divines, mais dans le partage de certains rapports de pouvoir... Durant le week-end, la fin du monde annoncée et attendue par plusieurs n’a pas eu lieu. Ils étaient plusieurs ici coincés dans la fébrilité de cette heure. On a eu dans les jours et des semaines qui ont suivi le tremblement de terre (qui est en soi une manifestation de la fin du monde !) plusieurs dates ou heures butoirs. En fonction de notre carte de membre, on en attend encore quelques autres, la plus populaire étant le 12 du 12 2012. J’ai eu récemment une discussion animée avec un collègue qui le dimanche, met des habits de preacher. Il expliquait ces événements qui n’arrivent pas comme la confirmation que Dieu existe : « En fait, Dieu nous confirme qu’il est maître du monde en ne provocant pas ces apocalypses annoncés. Il nous rappelle que notre foi doit être encore plus forte, que notre engagement en lui doit continuellement être fortifié. Que la fin du monde n’arrive pas parce que nous ne sommes pas prêts, encore indignes de lui. Il est tellement bon, qu’il nous offre l’opportunité de guérir, de nous réconcilier avec sa parole ». Ouais… C’est assez pratique comme analyse. Au plan de la logique (de ma position philosophique au moins), je dirais que ça se mord un peu la queue. C’est l’absence de validation externe qui m’agace, la croyance s’expliquant par la foi, la foi par la croyance. Il m’arrive de me dire que dans 300 ans ou dans 1000 ans, les adeptes de Raël vont continuer à s’entretenir dans une religion bien inscrite sur des supports (les livres ou enregistrement de Raël), de la même manière qu’aujourd’hui, on maintien active une religion à partir de livres (la bible, le coran, …) écrits il y a belle lurette. En fait, la différence entre Jésus et Raël, c’est l’apport du réel dans l’imaginaire. À son époque, Jésus pouvait marcher sur l’eau ou aller au paradis, Raël peut aujourd’hui faire des tours en OVNI !

samedi 21 mai 2011

Banalités


Cette photo a été faite vendredi matin très tôt (pas pour un ayisien) quelques minutes après qu'un autre mango ait fait sonner la caisse de résonannance qu'était ma chambre. C'était le calme reposant d'un bord de mer somme toute banal. Mais je n'y peux rien, je me fais prendre à chaque fois. Dans le hasard de toutes ces photos, un jour je ferai le 'portrait' d'un coucher ou un lever de soleil qui gagnera des prix. Les odds sont de mon côté. Si je ne me fatigue pas de ces banalités, je reste toutefois toujours un peu surpris de ce que les gens appellent ici des banalités politiques. La banalité de ces manœuvres (magouilles si vous souhaitez) ne tient pas à l'absence de conséquences sur la vie nationale, mais plutôt au fait qu'elles fassent partie de la vie courante de ce peuple désabusé. On a donc eu droit avant le 13 mai à un marathon législatif qui a permis de modifier plusieurs articles de la constitution. Qu'ont-ils fait pendant toutes ces années pour avoir été forcés de faire ces changements dans la loi fondamentale du pays à la sauvette ? Sujet d'un autre billet, désolé. Tout s'est donc fait dans l'empressement des derniers jours de la présidence prévalienne. Ou laisser un legs politique, ou embêter un peu plus le prochain pésident, à vous de choisir. Tout ça pour en arriver aujourd'hui à une contestation généralisée de ce qui a été publié dans le Moniteur, le journal officiel de la République. Des députés et des sénateurs qui ne reconnaissent pas les textes qu'ils ont négociés et votés dans la précipitation des derniers jours, des signatures perdues. "Un dernier coup fourré de Préval pour embêter Martelly" disait un commentateur de la vie politique, de simples "erreurs matérielles faciles à corriger" pour d'autres. Le genre de débat politico-juridique qui marque le début d'une présidence qui se donne comme objectif principal (et stratégique) de couper avec les anciennes façons de faire. Ces anciennetés sont bien ancrées et comptent sur plusieurs protagonistes pour continuer d'exister. Moins paisiblement sûrement, mais de continuer quand même.

vendredi 20 mai 2011

Le livre bleu, suite


Rien n'est encore terminé dans mon fameux dossier du livre bleu... Imaginez que notre cher Gouvernement canadien a besoin de preuves supplémentaires de l'existence du ti-cul de 16 ans. Vous savez, il ne faut pas juste perdre ses parents, il faut être en mesure d'en faire la preuve hors de tout doute. Pas de problème avec l'idée d'en faire la preuve, l'enjeu est dans le 'hors de tout doute'. Il faudrait qu'ils ajoutent 'raisonnable' après hors de tout doute. En fait, à partir du moment où tu pars du principe qu'Ayiti est n'importe quoi, tu peux tirer la conclusion logique que tous les papiers produits sont potentiellement n'importe quoi. On attend donc un nouveau papier qui pourrait éliminer (réduire pour être plus juste) ce qui subsiste dans l'espace 'doute' du cerveau d'un fonctionnaire canadien (ou québécois, je ne suis plus trop certain). Jusqu'à ce qu'il faille combler à nouveau le doute peut-être raisonnable de mes compatriotes. Peut-être aura-t-il le temps d'atteindre ses 18 ans !?

jeudi 19 mai 2011

Dormir sous un manguier

Bang !! Une première fois il y a quelques minutes. Sak rive ? La chambre est sous un manguier et la confection de la toiture offre une très belle résonance. Les mangues fraîches ne seront pas récupérées par les rat de pye (les rats à deux pieds, plus souvent des enfants qui volent les fruits qui tombent des arbres), la cour de l'hôtel étant bien gardée. Bonne nuit, et rêver à la saveur des mangues. Bang, encore ...

Envoyé de mon iPhone

Dilemme

Je suis à Fort-Liberté aujourd'hui. Il fait trop chaud hors de la salle climatisée. Même la mer s'est retirée un peu. On se prépare à manger de la poul an sos (poulet sauce creole) avec un petit déchirement anodin : On mange en regardant la mer et on devient nous même en sauce, ou on se cache sous la clim. Il y a de ces dilemmes dans la vie !!

Envoyé de mon iPhone

mercredi 18 mai 2011

Rose rouge


Aujourd'hui, c'est férié. Fête du Drapeau. Le Président se rend à Arcahaie pour souligner l'événement, la ville où tout a commencé pour le drapeau. J'écris où tout a commencé, mais ce drapeau a vécu quelques modifications au cours de son histoire, ses couleurs n'étant pas dans la palette de certains présidents penchés sur l'esthétisme ou la symbolique. Duvalier avait sorti le bleu pour ramener le noir et dès la chute de son fils, les ayisien ont ramené le bleu. On a donc depuis 1987 le même drapeau aux couleurs bleu et rouge, avec au centre, des armoiries où ont peu lire 'L'union fait la force'. Dans ce pays où l'individualisme est l'unique stratégie de survie, cette maxime sonne drôle. Comme le 'Je me souviens' du Qc, mais ça, c'est un autre sujet. On est passé par Archaie aujourd'hui avant d'aller tremper nos fesses dans l'eau salée. Partout où on passe depuis deux semaines, des artistes peignent des affiches aux couleurs de leur nouveau Président. En sentant cette énergie nouvelle autour du président et en voyant le rose s'afficher partout, je me suis demandé si les gens n'allaient pas maintenant faire sauter le rouge du drapeau pour le transformer en rose !

mardi 17 mai 2011

La meute


Les occasions de mettre de nouveaux souliers auront été nombreuses depuis mon arrivée. Même si quelques unes de ces godasses sont de plus en plus confortables, il demeure que certaines continuent de former des ampoules (des cloques pour ceux qui pensaient voter DSK à la prochaine présidentielle). Samedi donc, j’ai usurpé les souliers de quelqu’un d’autre, celui d’un journaliste photographe. Un free lens dans le jargon. Je me suis rendu très tôt (avec une collègue qui elle est une ‘vraie’ journaliste) au Ministère de la Culture pour faire faire une accréditation de presse afin d’entrer sur le site de l’investiture. C’est la première fois que la chose était officielle. Normalement, avec mon ‘attelage’ de kodaks (c’est Jo qui est responsable de cette appellation), j’arrivais à entrer un peu partout sans aucune formalité. À l’allure, la sécurité me laisse généralement entrer. Samedi matin toutefois, la chose était plus sérieuse. Accréditation officielle avec photo mes amis, on ne blague plus. J’ai donc pu entrer sur le site avec un vrai (mais faux !) statut de photographe. Vous dire comment il a fait chaud en plein cœur de ce beau gazon du palais national, que tout était long et pénible, … En fait, tout a commencé à être long et pénible quand le tout a … commencé. Ma patience est morte avant la fin. Ils ont coincé tous les journalistes dans un enclos au centre de l’espace. Le kodak du gars derrière dans le creux du cou, et le mien avec une vue superbe sur la calvitie de celui devant. L’avantage d’être relativement grand quand même. J’ai donc compris que je n’avais que l’attelage de professionnel. Au moment où Martelly a mis les pieds sur le tapis rouge, tous les caméramans et photographes autour de moi ont débordé la sécurité pour s’approcher de la vedette de la journée. Je suis resté un peu en plan, mes nouveaux souliers me faisaient mal.

Sajes


Il y a ce futur policier qui laisse couler une petite goutte de sueur en entendant les propos du nouveau Président sur la lutte contre l'insécurité. Il sait bien que le nouveau Président s'est engagé publiquement à ce que les policiers travaillent pour l'intérêt de la population, qu'ils luttent contre les gangs de voyous et qu'ils protègent les honnêtes contre les malhonnêtes. Gros travail, surtout que dans ce dernier bout du discours, il visait ces politiciens bien installés qui pour le moment, feraient toutes les menaces possibles et plus ou moins subtiles auprès des personnes identifiées comme ministrables et proches du clan Martelly. Sajes (sagesse en français) est le lead politique de notre nouveau Président : Sécurité, Agriculture, Jobs, Éducation et Santé. J'aurais naïvement tendance à croire que l'ordre des S n'est pas lié au hasard. En espérant que tout le monde reste sage... Bonne chance mon jeune !!

dimanche 15 mai 2011

Deux chaises vides


Hier matin juste avant la cérémonie d'investiture, on pouvait voir deux chaises libres dans les ruines du Palais National. Aristide et Duvalier avaient pourtant été invités !? Ces deux chaises sont restées vides toute la journée, bien cachées derrière et de billet du grand podium où tout avait lieu pour Martelly. Elles ont observé le déroulement de la scène en y gardant un oeil. Martelly sera surveillé de près, même si ici tout le monde raconte que ses accointances avec Duvalier en font davantage un allier qu’un ennemi. Pour Aristide, la chaise est vide et silencieuse. Des analystes à la radio discutaient de ces deux absences en tentant d’y donner une dimension politique. Le clan Martelly aurait été volontairement très ‘malhabile’ dans ses invitations, évitant ainsi que ces deux personnages plus grands que nature fassent une quelconque ombre sur l’investiture. Asefi me disait «Ou le pays est rendu ailleurs et leur présence n’aurait rien signifié au plan national, ou les deux hommes demeurent des forces politiques qu’il faut éviter de réanimer ? Tu remarqueras, tous les autres Présidents invités (même Manigat) étaient également absents.»
- C’est bizarre, il a fait sa campagne sur une logique d’ouverture, il a même parlé de réconciliation nationale !
- Il arrive dans la vraie politique maintenant, je pense que sa volonté de couper avec tout ce qui peut rappeler l’histoire politique du pays est très nette. C’est l’homme du renouveau qui ne souhaite pas inscrire ses pas dans les ornières profondes et boueuses de notre vie politique. Il va résister et se battre contre ces forces. Tèt kale !!
- En espérant que ces vieilles chaises restent vides.
- De quelles chaises tu parles !?
- Tu iras lire le billet de dimanche, tu comprendras.

samedi 14 mai 2011

Espwa


L’espoir (espwa en créole) est peut-être ce fichu virus qui tire avantage d’un terrain un peu trop fertile en naïveté. Peut-être. Chose certaine, il y a depuis une semaine où Ayiti se fait belle, une épidémie de ce virus. Ils étaient des milliers aujourd'hui en face du Palais à brandir ces photos du nouveau Président. Des milliers à revivre d'espoir. Martelly arrive enfin (je sais que je l’ai déjà écrit !!) à générer cette idée que c’est enfin possible. Que peut-être, le cul de sac dans lequel on tourne depuis des décennies se soit enfin percé, ouvert. Qu’on pourra en sortir. Plusieurs des partenaires ayisien avec qui je travaille salivent déjà à l’idée que cette sortie offre une bouffée d’air, une première depuis le vent d’exaltation qui transportait Aristide au moment de sa première élection. «La différence cette fois-ci, c’est que vous êtes là, que la Minustah est là, qu’on n’a pas d’armée pour venir tout gâcher, que des milliards sont sur la table. Le gars a dans les mains des cartes que peu de politiciens ont eues, il ne peut pas ne pas bien les jouer» me disait un de mes collègues. En fait, ils sont sûrement quelques millions à imaginer que l’avenir est maintenant rose. Il reste une certaine force rabat-joie qui ne peux pas s’empêcher de penser aux ravages que peut continuer à faire cette force politique toujours active en Ayiti. Qui d’aucune manière n’a encore accepté ses deux dernières défaites (la perte de la présidence et des deux chambres). Cette force qui promet publiquement à Martelly (Sweet Micky comme ils l’appellent) un baptême de feu politique dès lundi prochain. Qui partout dans les ministères a les racines pour que les mangues continuent de pourrir. Cette force qui, justement, s’appelait Espwa avant de s’appeler Inite !! «On ne croit pas en Dieu pour rien !» me dira Cetout pour expliquer ce que certains appellent de l’aveuglement. Mon petit coeur naïf se met à rêver. Et si c’était vraiment l’espoir ?

vendredi 13 mai 2011

... un billet retrouvé

C'est ok, le rejeton perdu (celui de mercredi) est rentré au bercail. On peut continuer l'esprit en paix.

Un billet de perdu ..

Le petit problème technique semble maintenant résolu, mais le billet de mercredi a disparu. Dans la mesure où j'écris le tout de manière intuitive et spontanée, je n'ai pas conservé le billet de mercredi ... Je vais tenter de le réinventer.

Petit problème technique

Impossible depuis hier d'avoir accès via le navigateur web à mon blogue ?? J'avais tellement d'histoires renversantes à vous raconter et d'extraordinaires photos à diffuser...

Envoyé de mon iPad

mercredi 11 mai 2011

Rose pour rose


Tout le monde se fait beau. On sent une certaine effervescence dans les rues de PAP. La couleur rose s’étend un peu partout. Sur la Panaméricaine près du bureau, un beau stand rose et blanc a été installé. Pou tèt kale (pour tête calée, ce qui est devenu le surnom de Martelly) dira l’heureux propriétaire. On sent que la fête sera bonne, comme si des années de misère (et une dernière année d’enfer …) allaient commencer à se dissiper avec l’entrée en fonction du nouveau Président. Au-delà de toute partisannerie ou de toutes allégeances politiques (dans la mesure où cette notion a un sens ici), il faut dire que le bonhomme réussit à teindre de rose les lunettes de bien du monde. Il y a en effet un optimisme que je n’avais jamais senti en plus de deux ans, comme si le gars allait être en mesure de faire virer le navire vers le bonheur. Il ne lâche pas sa stratégie de communication pour se rapprocher du bon peuple. Tout au long de la campagne, on recevait des SMS ou des appels téléphoniques (préenregistrés) pour nous inciter à l’appuyer. Depuis sa victoire, on reçoit des appels pour nous remercier et surtout, pour nous dire de nous préparer à un vrai changement. Depuis une semaine, de nouvelles affiches placardent les rues où ils remercient les gens de l’avoir appuyer. Le gars comprend le sens du M A R K E tting pour rappeler une scène des Boys 18 ou 26 !? Chose certaine, cette vague Martelly fait du bien, souhaitons qu’elle ne soit pas un tsunami dévastateur.

mardi 10 mai 2011

Côté givré


Asefi avait la même moue que cette jeune fille le jour où ils ont proclamé la victoire de Martelly. Elle qui voyait dans ce nouveau président le spectre d'une démagogie de droite un peu inculte, commence à changer son fusil d'épaule. En fait, presque tout les anti-Martelly autour de moi (et ils étaient nombreux !) semblent vouloir donner une chance au bonhomme dont l'attitude, il faut le dire, s'est nettement 'raffinée' depuis l'annonce des résultats. Comme si le côté givré ayant été si efficace en campagne, laissait une place au côté nature...
- Tu me sembles moins découragée de ton futur Président ?
- Je ne veux pas m'emballer trop rapidement, mais j'avoue que je suis surprise de ce qu'il nous offre pour le moment. En fait, ce qui me fait plaisir, c'est qu'il semble vraiment vouloir couper les ponts avec la réalité politique avec laquelle notre pays pourrit depuis des années.
- T'as pas l'impression que c'est ce qui va le couler justement ?
- Je ne te suis pas !
- En, fait je pense que ces politiciens que tout le monde qualifie de corrompus ne se laisseront pas marginaliser aussi facilement. Que les moyens soient légaux ou non, ils vont tout faire pour lui mettre les bâtons dans les roues. Regarde juste ce qui arrive avec les résultats finaux du deuxième tour, ces gens là ne se laisseront pas damer le pion sans réagir. C'est sans compter la fonction publique bien assise elle aussi sur ces réseaux politiciens, la partie n'est pas gagnée.
- Personne ne dira que la partie sera facile, mais s'il joue bien ses cartes sur la scène de l'opinion publique entre autres, il pourrait inverser la dynamique. Il faut que tu saches qu'il n'y a aucun corps dans les deux chambres. Le partie Inite a été créé de toutes pièces par Préval il y a 3 ans en achetant les députes et sénateurs nécessaires à une majorité. Si Martelly navigue habillement, il pourra facilement désaffilier ces politiciens intéressés et les affilier à une plate-forme politique plus proche de ses intérêts.
- T'as vraiment changé ton fusil d'épaule !! Tu lui portes maintenant des habilités politiques et stratégiques assez fines !
- J'ai bien dit 'si', je garde toujours mes réserves.
- Elles fondent un peu tout de même.
- C'est la chaleur du printemps...

lundi 9 mai 2011

Face à face


Il n'a même pas encore son armée qu'on l'accuse déjà de déclarer la guerre ! Le ton monte joliement depuis ce weekend dans la vie politique haïtienne. Un Bureau du contentieux électoral national spécial (BCNE spécial) a lieu depuis vendredi pour trouver une solution à l'imbroglio électoral que constitue la victoire après contestation de 19 candidats de l'Inite. La communauté internationale pousse dans la même direction que Martelly pour que l'on revienne aux résultats préliminaires, ceux qu'un comite spécial de l'OEA considère comme valides. Tout réside bien évidement dans le contrôle des deux chambres, avec ces victoires surprises des 19 candidats, le parti de Préval en prenait le contrôle. Martelly ne veut pas voir ses deux mains attachées par l'Inite, les changements promis ne pourraient se concrétiser. C'est ce qu'il a lancé dans une conférence de presse en accusant les gens au pouvoir actuellement de ne pas respecter la volonté populaire, et surtout, de poursuivre en justice ceux qui avaient trafiqué les résultats. Il n'en fallait pas plus pour que certains politiciens (parlementaires et sénateurs) se sentent visés et se lancent dans la mêlée en rappelant à Martelly (qu'ils appellent Sweet Micky pour rappeler à tous son statut de vedette et lui rappeler que la vie politique n'est pas sweet) qu'il ne pourra pas gouverner sans eux. Je ne commente pas la joute sur son contenu (je demeure un blanc dans cette histoire), mais au plan stratégique, la situation est intéressante à décrire. En fait, on a le gars 'neuf' qui a passé sa campagne à dire qu'il fallait se débarrasser des politiciens corrompus qui ont fait l'histoire d'Ayiti depuis 25 ans (tout le monde sait bien qu'il n'avait pas de corruption sous la dictature) et une population du même avis qui l'a fortement appuyé. Tout ce beau monde est assis en face de cette supposée racaille qui a, dans la logique même de la constitution, le pouvoir d'accepter le Premier ministre et sa déclaration de gouvernement (ses engagements et ses priorités). Comment ce face à face se déroulera-t-il dans les prochaines semaines ? C'est la question qui brûle les lèvres de plusieurs. D'où toute l'importance de la décision du BCNE spécial qu'on attend toujours pour aujourd'hui.

dimanche 8 mai 2011

Celle qui reste


Au Qc aujourd'hui, c'est la fête des mères. Pour la fête 'des autres mères', bof, mais pour celle de ma mère, c'est du sérieux. Plus que du sérieux même. Comme tout le monde le sait maintenant, son mari (donc mon père) est décédé il y a maintenant près de trois semaines. Pour l'occasion, j'avais eu à écrire et à lire une petit ode à Bob au nom des enfants. Je ne pouvais pas m'imaginer cet hommage sans écrire quelque chose sur elle, celle qui reste. Je lisais donc le texte comme un grand jusqu'à ce que j'arrive au paragraphe qui concernait celle qui reste. La gorge s'est serrée et la voix s'est mise à dérailler. Voici ce que j'avais écrit : "Ce texte se veut aussi un hommage à celle qui reste. Celle qui est restée auprès de lui dans toutes les tempêtes d’une vie. Celle qui dans l’effervescence de notre père fut son équilibre, son axe solide sur lequel il a pu s’appuyer. Celle qui fut le ciment d’une vie familiale. Celle qui est restée tous les jours à la maison pour prendre soins de nous. Celle qui aujourd’hui continue de rester auprès des ses petits-enfants. On lui dit ici tout notre amour, toute notre reconnaissance." Bonne fête ma mère !! xxx

samedi 7 mai 2011

Conditions propres au pays


Les Nations Unies ont publié cette semaine les conclusions définitives du rapport d'expert internationaux sur l'origine de l'épidémie de choléra. Langue de bois pour langue de bois, on peut faire la compétition avec qui vous voudrez. Chose certaine, on prend presque les haïtiens pour des imbéciles et ce n'est pas qu'ils ne chavirent pas tout qu'ils le sont, c'est par nature qu'ils ne chavirent rien. Ils ont appris de 1804 et ne veulent plus recommencer. On apprend donc de manière officielle que la souche est d'Asie du Sud (c'est confirmé depuis novembre) et que plusieurs "conditions propres au pays" ont favorisé l'épidémie. "Conditions propres au pays" réfère ici aux problématiques d'hygiène, à l'accès à l'eau potable et au traitement des eaux souillées, à l’absence d’immunité (!!!!), aux habitudes des riverains (se laver dans la rivière, arroser les champs et laver les aliments avec l'eau de la rivière, ...) et également certaines pratiques sociales comme se visiter ou commercer d'une commune à l'autre ou d'un département à l'autre. Merci de ne pas vous étouffer. J'essaie de me demander comment les ayisien auraient pu se dégager davantage de leurs conditions sanitaires et sociales pour éviter la propagation du choléra sans mourir d'autre chose, et je ne vois pas vraiment ! La seule chose intelligente dans ce qui a été rendu publique est la reconnaissance par la Minustah que la gestion des "activités humaines" (la gestion de la merde et des urines pour simplement parler) avait été déficiente à la base népalaise de Mirebalais. On propose donc que cette gestion maintenant resserrée de manière à éviter toutes contaminations. Ainsi, l'ensemble des installations des troupes des Nations Unies (ici ou ailleurs dans le monde) devront maintenant s'équiper d'un système qui inactive les bactéries pathogènes. Len conclusion, l’épidémie est donc le résultat d'une série de facteurs combinés qui, dans leurs interactions, ont causé la mort de plus de 4000 personnes … et se préparent à continuer pour encore plusieurs années. Scientifiquement, impossible d'isoler un de ces facteurs. La science, c'est souvent commode. Pour terminer, bien évidement, la Minustah ‘réitère sa profonde sympathie’ aux familles et s’engage à épauler les haïtiens dans sa lutte contre cette épidémie.

jeudi 5 mai 2011

Polis et mango twòp dous


9h45 à l'aéroport régional de PAP. L'avion de Tortugair a déjà deux heures de retard. Je viens de parler avec l'un des pilotes qui m'explique qu'il y a un petit problème mécanique qui devrait être régulariser bientôt. Ils ont fait 'a fly test' et on fait les derniers ajustements. Juste avant les derniers arrangements... On ne sait plus trop quoi faire, surtout que la place se remplie de personnes qui ont des billets pour le prochain vol ! Je sens que la journée va être épique. Pendant qu'on niaise avec quelques collègues, on parle politique bien évidement. J'apprends dans l'échange que la Minustah couterait 83 millions de $ ( US) au pays par année. Par année !? "Par année mon blanc." Je dis couterait, mais en fait, c'est la dette du pays qui, par année, augmenterait de ce montant. En fait, Haïti emprunte aux Nations Unies pour assumer la sécurité de sa population ... et celle des blancs qui résident ici. Wow !! La ligne est mince entre la naïveté et l'imbécilité, je ne sais pas trop si je ne la transgresse pas quelques fois ? Personne sauf moi n'est surpris. La Minustah est ici suite à une demande du Président Préval, c'est au pays d'en assumer les frais. Cette petite niaiserie de nos organisations des internationales sort dans le débat au moment où les anciens militaires demandent au nouveau Président de relancer l'armée (en passant, on nous rappelle que l'armée est toujours inscrite dans la constitution). Martelly, dont les liens avec l'armée seraient très intenses, serait très intéressé. Relancer l'armée haïtienne couterait autour de 50 millions par année. Belle économie... Notre avion a finalement quitté avec plus de 2h30 de retard, en fait il fallu attendre l'autre avion. La journée s'est terminée dans le même genre de brouhaha. On s'est fait coller deux fois par la PNH. Au deuxième essai, le policier avait 'spotté' le seul blanc de la machine et rêvait déjà à son chien-jambé (casse croute sur le bord des routes). Il nous a fait niaiser quelques minutes avant d'exiger qu'on sorte de la machine pour la fouiller. La polis (prononcer police) s'est approché de moi en me demandant si je parlais français et je lui ai répondu 'm'pale kreol' ! Il voulait voir mon passeport et je lui ai expliqué en kreol que je sortais avec mon passeport que lorsque je prevoyais passer une douane, mais que je pouvais lui donner une autre pièce d'identité. À la vue de mon permis de conduire haïtien, il est presque devenu blanc. Il a été forcé de subir les colibets gentils de mes collègues avant de nous laisser repartir. Dix minutes plus tard, on avait une pan kawoutchou sur la route, au Carrefour Jésus à Trou du Nord. Juste là où l'on trouve les meilleurs 'mango twòp dous' de la région (une variété de mangue appelée 'trop douce' tellement elles sont sucrées). Les petites vendeuses ont fait des affaires d'or.

Envoyé de mon iPad

Sandwich à la moutarde

Je suis assis dans le resto d'un hôtel au Cap-Haïtien et mes voisins sont des québécois. J'entends sans vraiment écouter jusqu'à ce qu'un des gars parle des sandwich à la moutarde. Je comprends que c'est le genre de mets dont il s'ennuie. Pas de sa dimension gastronomique, mais de ce je ne sais quoi d'insignifiant (d'indigeste même) qui nous accroche a 'chenou'. Dans mon assiette, il y a des acras et du pikliz, la Prestige est bien froide. Le sandwich à la moutarde peut attendre encore un peu.

Envoyé de mon iPhone

mercredi 4 mai 2011

Et ça continue


Vous étiez un peu tristes que je ne vous parle plus des élections haïtiennes ? Je le savais. Voici donc le nouveau, nouveau qui en fait est de l'ancien. Presque à tous les jours depuis deux semaines, je reçois des avis de sécurité sur mon courriel pour m'annoncer que tel coin du pays est à éviter, des routes fermées par des manifestants un peu désolés des résultats. J'écris désolés dans la mesure où selon les rumeurs (je sais, je sais), les gens ne sont pas vraiment en furie, mais on leur donne des kob et du klèrin (un alcool local) pour brûler des pneus et lancer des roches. Donc, les gens manifestent un peu partout parce que notre CEP national aurait trafiqué les résultats du deuxième tour (pour les deux chambres). Après l'annonce des résultats préliminaires, l'Inite n'obtenait pas la majorité tant souhaitee au sein des chambres. Il y a donc eu 19 contestations au Bureau de contestation nationale et hop, les 19 deuxièmes sont devenus premiers. L'OEA vient de publier un rapport qui détermine que les résultats préliminaires devraient être considérés comme ceux valides, que les nouveaux résultats ont été le fruit de manipulations partisanes. Pour augmenter un peu plus la pression sur le trio Inite/CEP/Préval, ll'ambassade américaine fait circuler une liste de personnes influentes qui devraient perdre leur visa si jamais les résultats ne sont pas ceux souhaités par  l'OEA ... La manœuvre avait bien fonctionné en février dernier pour  écarter Célestin du deuxième tour, et y installer plutôt Martelly. Pour le moment donc, c'est le chaos (ou presque) dans 19 circonscriptions et dans les deux chambres. Rappelons que le nouveau Président doit prêter serment devant ces chambres ce samedi mais que pour le moment, elles refusent de siéger tant que la situation de leurs 19 collègues ne sera pas régularisée. Ce sont aussi ces deux chambres qui devront entériner le choix du Président pour le Premier ministre et son équipe. Pour l'installation de Michèle Pierre-Louis en 2008, la danse avait durée 6 mois ... On a donc un Président du CEP qui est parti se cacher en République-Dominicaine, des députés/sénateurs qui poussent pour que Préval publie les nouveaux resultats dans le Moniteur (le journal officiel de l'État haïtien) afin qu'ils deviennent officiels, ainsi qu'une communauté internationale, des deputés/sénateurs et le President élu qui veulent qu'on retourne aux résultats d'avant les contestations. On continue à garder un oeil sur le dossier et on vous informe.

mardi 3 mai 2011

Je tombe sur le cul !

Je ne sais pas si c’est le recul (en ai-je vraiment un ?), mais j’avoue que je suis complètement abasourdi par les résultats de l’élection canadienne d’hier, et surtout, par les premières analyses que nos chroniqueurs politiques québécois nous ont pondues dans les dernières heures. Les résultats dans un premier temps m’apparaissent catastrophiques. Minoritaires, les conservateurs avaient des attitudes démocratiques qui faisaient peur, majoritaire maintenant, les journalistes n’ont qu’à bien se tenir. Il faudra quelques scandales bien sentis et une opinion publique nettement négative pour que ce gouvernement se garde une petite gêne. L’instinct de survie existe en politique. Quant à la droite sociale (j’ajouterais malheureusement ‘morale’), économique et environnementale, elle aura 5 ans pour s’incruster encore davantage dans notre vie politique. Le Devoir avait fait une série d’articles il y a plusieurs mois pour montrer comment cette droite morale avait été en mesure de prendre racine dans une fonction publique canadienne trop longtemps laissée aux mains des libéraux, le natural governing party. Vous dire que j’ai peur serait un euphémisme… Quant aux oranges maintenant bien installés au Québec, ils me font tout autant peur. J’essaie de m’imaginer la quantité de ‘poteaux’ installés par les néo-démocrates pour faire cette élection perdue d’avance il y a quelques mois, et je comprends qu’on sera représenté par des novices de 'gauche' (dont plusieurs sont souverainistes en plus ...). Je le sais j’en ai été. J’ai milité dans le Parti vert du Qc il y a plusieurs années et j’avais posé ma candidature sur le Plateau Mont-Royal. La stratégie est bien connue : tu défends des idées et tu tentes de développer une arme politique pour les faire évoluer, tu présentes des candidats partout, même des poteaux, question de ramasser assez de sous pour continuer ton action politique. J’avoue que si j’avais gagné à cette époque, j’aurais été complètement paniqué à l’idée d’avoir à accompagner la population, les groupes et les entreprises de mon comté dans leur développement. De représenter ces gens-là à l’Assemblée nationale. Je m’imagine donc comment plusieurs de ces néo-démocrates se sentent aujourd’hui. Lâcher la job qu’on aime, déménager à Ottawa et de laisser la petite famille 4 jours par semaine, travailler 6 jours par semaine, piloter des dossiers politiques et stratégiques pertinents pour le comté, … Il ne faut pas chercher longtemps dans notre mémoire pour trouver dans cette victoire néo-démocrate une ressemblance désolante avec l’ADQ d’il y a quelques années. Au moins, Charest était minoritaire … Finalement, j’avoue que les premières analyses de nos chroniqueurs politiques québécois me font tomber sur le cul. Je lis ‘changement de paradigme’, ‘changement profond’, ‘changement radical’, je lis aussi ces analyses d’un renouveau idéologique dans cette réorganisation gauche-droite de la vie politique, ou encore dans cette fracture de la politique canadienne souverainiste-fédéraliste. Un réalignement des astres (désastres…) ! Hallucinant, ça doit être une fatigue accumulée des 5 dernières semaines de campagne. Franchement, c’est un coup de gueule politique comme les québécois ont été capables d’en faire depuis la révolution tranquille (le PQ, le Bloc, l’ADQ et maintenant le NPD). La question maintenant est de savoir combien de temps va durer ce nouvel engouement pour l’homme à la canne et au cancer de la prostate ? L’engouement peut-être durer le temps d’un feu de paille, le problème c’est qu’on sait qu’on en aura pour 4 ou 5 ans à être représentés par ces oranges. Harper lui, n’est pas un feu de paille.

lundi 2 mai 2011

Nationalité


Comme aux États-Unis, certains s’inquiètent ici de la nationalité de notre Président. Est-il vraiment haïtien ? Ou plutôt, a-t-il renoncé à sa nationalité haïtienne pour épouser l’américaine ? C’est commun ici, dès que les gens en mesure de se déplacer vers le Canada, les États-Unis ou la France ont l’opportunité de coller leur photo sur un passeport étranger, ils en profitent. Disons que dans la vie en générale, un passeport canadien est plu avantageux à montrer qu’un passeport haïtien. Plusieurs de mes collègues haïtiens ont ce passeport étranger qui leur permet de voyager plus facilement, ou de se faire rapatrier en cas de petites complications naturelles ou sociales. Le hic, est que ces personnes vivent dans l’illégalité dans la mesure où la mère patrie ne reconnait pas la double nationalité. Haïtien et rien d’autre selon la constitution. On se retrouve ainsi avec plusieurs personnes qui voyagent avec deux passeports sans que l’État ayisien ne soit réellement au courant. Pas besoin de vous raconter à nouveau la petite expérience du livre bleu pour que vous compreniez que la fonction publique haïtienne éprouve certaines difficultés à émettre et à contrôler le (ou les !) passeport de ses citoyens. Personne ne sait vraiment qui a un ou deux passeports. On conserve donc son passeport haïtien tout en renouvelant en douce son passeport canadien ou américain. Est-ce le cas pour Martelly ? La question est posée, surtout que certaines ambassades auraient confirmé que son nom avait été associé à un numéro de passeport américain. Pas un vrai débat politique, mais le genre de petit crochet insignifiant sur lequel des ennemis peuvent s’agripper pour longtemps. Parlez-en à Obama ! Cette question de la double nationalité est actuellement sur la table. Préval avait lancé une réforme de la constitution qui entrouvrait cette porte, Martelly quant à lui, s’est engagé à l’ouvrir complètement. Le pari est que ces haïtiens qui sont devenus riches à l’extérieur du pays pourront plus facilement revenir investir ici si on leur reconnait la nationalité haïtienne. Il y a effectivement certains droits (droit de propriété par exemple) accessibles uniquement aux nationaux. Je suis également certain que plusieurs haïtiens de la diaspora qui ont déchiré leur passeport avec une petite larme dans les yeux, seront très heureux de reprendre leurs droits, peut-être même une partie de leur identité.

dimanche 1 mai 2011

L'homme en rose


Ça faisait déjà quelques semaines que je passais devant cette affiche Martelly en me disant qu'il fallait que je trouve le moyen de montrer sur le toit de la résidence voisine pour capter le tout avec mon kodak. Ce matin vers 7h30, le propriétaire me laissait monter sur sa toiture pour immortaliser cette publicité format géant devant un de ces mornes surpeuplé qui fait que PAP est aujourd'hui le scandale environnemento-social qu'il est. On est sur la route du Canapé-Vert, juste après Bois-Jalousie qui a tenu la secousse de bagay la, mais juste avant le secteur qui a glissé sous la rumba du 12 janvier 2010. Parmi les défis qui font la nouvelle vie de Martelly, il y a ces centaines de milliers d'haïtiens (ils sont peut-être quelques millions ???) à vivre dans un situation de précarité 'physique' évidente. Je sais que rien n'est une évidence, que tout doit être situé dans un contexte précis, mais là ..., c'est du sérieux. Ils sont donc des milliers de familles coincées à vivre dans ces environnement roulettes-russes qu'un ouragan, ou même une très grosse pluie, pourrait inscrire dans le concours olympique du bobsleigh à 4. Le problème, c'est que tout le monde va descendre en même temps ... Le goulot d'étranglement va en prendre quelques milliers à la gorge ! C'est le genre de défi qu'un nouveau président doit tenter de solutionner. Des familles louent des terrains ou des maisons à de faux propriétaires qui profitent de l'absence de contrôle de l'État pour coincer des familles dans ces secteurs domiciliaires  qui poussent comme des champignons sur PAP depuis des décennies. Les camps se vident actuellement (les ONG commencent à manquer de liquidité pour fournir de l'eau et du travail aux gens qui vivent dans les camps) pour relancer le développement de espaces illégaux et  ... meurtriers. Espérons que l'homme en rose puisse faire quelque chose !