jeudi 24 décembre 2009

Noël dans le fwet !


Les ayisien fêtent Noël comme tout bon chrétien très pratiquant. La fête n’a pas le faste commercial pour 95% de la population, l’argent se faisant plutôt rare dans ce coin des caraïbes. En plus, les maisons n’ont pas de cheminée… Pour l'autre 5%, la fête ressemble à celle qui se déroule sur la rue Sainte-Catherine, la variété en moins. Cette année, la fête sera plus fwet que d’habitude. Les tempêtes de neige qui sont passées sur le Canada et le nord des États-Unis au cours des derniers jours sont venues mourir ici. Hier, on a eu droit à journée complète de pluie et de vent. Tout Ayiti a été au ralenti, on se serait cru au Québec quand les pluies d’automne font tomber des branches. Li fè fwet anpil (Il fait très froid). Le thermomètre de la bagnole montrait 15 degré ! On a réussi à dénicher plusieurs couvertures pour Claudette déjà frigorifiée dans notre fraîche montagne. Jean-Claude, le chauffeur, portait un épais chandail. À la maison, on fait un arbre de Noël typique du coin : Une branche peinte en blanc et bien enracinée dans un pot de peinture rempli de ciment, des boulles faite de papier mâché et des petites maisons de carton. Claudette le trouvait un peu ‘tounu’, elle y a ajouté des ballons. Joyeux Noël à tous.

mercredi 23 décembre 2009

Un poisson ça ne vote pas !


Les haïtiens sont sûrement un peuple très politisé. Je l’ai écrit souvent ici, la politique fait partie de la vie quotidienne des ayisien, un sport national. On en discute partout et n’importe qui peut vous raconter l’événement politique X qui est survenu en 1876 ! C’est tellement présent que la présidence sert de référence pour l’âge de plusieurs personnes : Faute de registre civil digne de ce nom, plusieurs haïtiens ne connaissent pas leur date de naissance mais ont une certaine idée de leur âge en fonction du président en place. ‘Ma mère mi disait que je sui né sous la présidence de X’. Pour Duvalier, ça complique un peu les choses, mais pour les autres, la marge d’erreur est nettement moins grande. Un peuple politisé qui ne vote pas… Comme si vie politique et élection ne faisaient pas bon ménage. Si le cynisme ambiant à l’égard des politiciens canadiens fait fondre le taux de participation d’élections en élections au cours des dernières années, les événements politiques qu’a connus le peuple ayisien depuis le départ de Baby Doc ont créé une désaffection jusqu’à atteindre moins de 3% aux sénatoriales du printemps dernier. Pour Cetoute, un partenaire haïtien (Cetoute est son nom de famille), le dernier changement de gouvernement opéré il y a quelques semaines est une autre de ces occasions de constater ce que veut dire dans un contexte politique l’expression ‘régime de bananes’. À l’inverse de ce qu’écrit une journaliste de La Presse dans le cadre de la visite du nouveau Premier Ministre dans le ‘pluss beau pays du monde’, on a viré la première ministre Pierre-Louis sur des accusations complètement démentes (elle serait responsable de la pauvreté dans laquelle se trouve la population, rien que ça !) et non à cause des 200 millions de $ volatilisés. En fait, plus un politicien ne parle de cette disparition. Cetoute me disait que le débat tenu lors de la destitution de l’ex-première ministre a été à l’image de ce que les politiciens du pays peuvent réaliser en matière de débat, c'est-à-dire n’importe quoi ! ‘On nous prend pour des poissons et des poissons, ça ne vote pas !’ Égalité (un autre haïtien avec qui je travaille) me racontait que le mariage pauvreté/démocratie est impossible, les gens au pouvoir ont l’argent nécessaire pour acheter les votes. Moins t’en achètes, plus le taux de participation est bas…

mercredi 16 décembre 2009

Tout sauf ce qu’attendu


Encore quelques semaines de paresse… Pas vraiment, le temps de suivre et de dérouler ses idées, de constituer un texte qui a assez de sens pour se présenter sur la toile. Je sais, une niaiserie de plus ou de moins sur cette toile … Le dernier billet racontait que les semaines avaient été chargées de visites personnelles et de consultants canadiens en présence sur le terrain. Bis. Maintenant un an que nous avons installé notre linge dans les commodes de Pelerin 9, Petion-Ville. Avec le linge, la vaisselle et la literie, quelques livres et ce qu’il faut pour continuer à boire le café tous les matins. L’essentiel, c’es t l’essentiel, surtout en Ayiti. Cette première année a passé aussi vite qu’une F1 dans la longue ligne droite du circuit Gilles-Villeneuve de Montréal. Sérieusement, aucun espace pour s’ennuyer, surtout pas ceux qu’on nous avait annoncé. On nous avait effectivement annoncé une dépression post-arrivum autour du cinquième ou du sixième mois. On devait vivre une écœurite aigue du pays et des ayisien. On devait vouloir à tout prix quitter les caraïbes en rêvant amoureusement aux tempêtes de neige sur le Plateau Mont-Royal. Rien de cela n’est encore arrivé et je ne crois pas que le terrain est fertile pour l’apparition de ce genre de malaise. On a bien évidement eu quelques petites bouffades dépressives face à des situations ou des événements qui montrent les conséquences de l’extrême pauvreté de ce pays et de sa population, comme pour d’autres qui montrent la grande richesse creuse d’une certaine couche de la société. La vision d’un concessionnaire Porsche à l’entrée d’un presque-bidonville laisse toujours, même après un an, une certaine amertume dans le gosier. Les milliers de génératrices qui polluent l’air et étouffent le silence. Les odeurs qui courent les rues d’un pays sans eau courante. Les millions de personnes qui vivent dans les rues entre les machines, les chiens, les cochons, les cabris et les poules. Presque pas de chats dans ce capharnaüm, on les préfère dans les assiettes. Mais surtout, l’intensité des sourires et des culs qui se font aller en permanence, comme si la fête faisait maintenant du code génétique de ce peuple.