samedi 17 octobre 2009

Neg pran pouwa !


J’ai reçu un compliment cette semaine. Une vraie première dans ma vie d’expat. Un collègue haïtien, le genre de gars à qui tu fais une longue poignée de main et une accolade vigoureuse, un gars à qui, au Québec, tu donnerais une ‘bean’ pour lui signifier que t’es content de le voir, m’a dit que j’avais pris du poids. Ça faisait plus d’un mois que nous nous étions vus et il a constaté que mon adaptation à la bouffe haïtienne se déroulait plutôt bien. Entre neg, on ne perd pas ce genre d’occasion de se frapper amoureusement. En fait, son compliment, neg pran pouwa !, marquait un passage dans ma vie d’expat, pour la première fois on m’appelait neg. Comme nègre chez nous. Dans son « le monsieur prend du poids ! », il me reconnaissait une appartenance à la même communauté que la sienne. Si le terme nègre est proscrit de notre vocabulaire québécois, il est ici utilisé entre les haïtiens sans aucun embarras. Il ne faut pas comme blanc faire l’imbécilité de les appeler nègres, ils sont très conscients du sens que nous donnons à cette expression. Mais entre eux ou dans les médias, le neg c’est l’autre, le monsieur. J’étais donc content de me faire dire que j’avais pris du poids, pas trop, mais juste assez.

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