dimanche 2 octobre 2011

L'impatience

Bon, parlons politique, ça fait longtemps ! Asefi m’en veut un peu, je ne parle presque plus d’elle. Cetout, son frère, s’en fout un peu plus. Après un passage éclatant (87 sur 87) à la chambre des députés, Conille, le troisième premier ministre désigné, devrait sortir couronné du vote des sénateurs qui devrait avoir lieu lundi. Gagnant, mais un peu égratigné. Si la commission de la chambre basse avait donné un 100% à son dossier technique, la commission sénatoriale a quant à elle rejeté quelques unes de ces pièces. La plus significative, celle dont tout le monde parle, réfère à cette exigence ‘technique’ de la constitution de résider dans le pays depuis 5 ans. Le bonhomme travaillait pour les Nations Unies dans un pays africain ou encore pour Bill Clinton (de New York/Washington) dans sa fonction onusienne de représentant spécial pour Haïti. Les sénateurs qui ont formé cette commission auraient donc conclu que le dossier est ‘techniquement’ incomplet, mais proposeraient quand même à leurs collègues de faire un vote ‘politique’ en acceptant le désigné. La conjoncture nationale exigerait que le texte de la constitution soit un peu bafoué.
-Bafoué, bafoué !! Rien dans cette constitution n’est respectée. Les politiciens s’en servent avec zèle quand ça fait leur affaire – parler de ‘leurs affaires’ serait plus pertinent !! Depuis le début de notre histoire libre, nous sommes bouffés par les politiciens. C’est décourageant.
Asefi vient de s’enflammer de nouveau. Je lui demande si elle ne pense pas que le bonhomme peut quand même faire un bon travail.
-Je n’en sais rien, personne ne le connaît vraiment sauf pour savoir qu’il navigue dans les hautes sphères diplomatiques depuis plusieurs années. Il n’a pas vraiment eu d’impact sur notre société. En fait, ce qui est le plus troublant dans cette histoire, c’est qu’encore une fois, ce sont les blancs qui nous imposent leur choix. Vous n’alliez sûrement pas vous arrêter après nous avoir imposé les résultats du premier et du deuxième tours !
-En tout cas, moi, on ne m’a pas consulté !
-Arrête de faire l’imbécile, tu comprends ce que je veux dire. Tu sais très bien que la communauté internationale s’est une fois de plus impatientée devant notre incapacité chronique à décider ou à faire les choses correctement. Devant notre marronnage chronique en réalité.
-Est-ce que je décèlerais une petite contradiction dans ta dernière salve ? À la limite, une autocritique nationale ?
-Tu comprends très bien ce que je veux dire, tu l’as même écrit dans un de tes derniers billets sur les ONG. Il faut être deux pour danser le tango. On est plus dans une logique simple de cause à effet, mais dans une relation complexe (peut-être même compliquée) où les causes et les effets se confondent. On marronne parce qu’on sait que ça va être plus payant et la communauté internationale a besoin qu’on marronne pour légitimer son impatience.
-Pour l’impatience, on la sentait bien plus chez les haïtiens.
-T’as tout faux, la grande majorité des haïtiens n’attendent plus rien de leur gouvernement ou de la communauté internationale, ils ne sont donc nullement impatients. Qu’on tergiverse un mois ou dix mois pour la nomination d’un gouvernement, ça ne change rien à leur vie. Vous êtes les plus frustrés, vous ne savez plus à qui vous adresser pour dépenser vos millions en aide au développement.
-Ça me fait suer un peu quand t’as raison.
-Suer en Haïti, c’est tous les jours. On connaît.

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