mercredi 10 mars 2010

Maîtriser ses émotions


Il y a cette jeune fille accrochée à la clôture du jardin de la primature. Elle me regarde sans sourire. Juste à côté, la mère veut que je photographie sa fille. La mère m'explique qu'elle et ses trois filles dorment sous une bâche depuis deux mois. Qu'elle aimerait trouver une tente. Du linge aussi, tout est resté sous les décombres. Ce genre d'événement se répète depuis des semaines. Quelques fois ses histoires me bouleversent, pour d'autres, le son ne se rend même pas au coeur. Allez y comprendre quelque chose !? Pour un gars généralement assis derrière un bureau les mains posées sur un clavier, les dernières semaines ont été ponctuées de craintes et d'événement troublants. Dans les premiers jours, j'ai été tétanisé à l'idée d'arriver chez un collègue et de le trouver mort, ou en pleurs aux abords d'un amas de béton. J'ai été confronté à des milliers de cadavres plus ou moins frais, plus ou moins posés là avec respect. Mais la scène qui restera gravée dans ma mémoire, même celle de mon Alzheimer future, est une réunion à l'hôpital universitaire. Devant moi, il y a Dudley, pédiatre et vice-doyen de la fac de médecine. Notre échange est interrompu une première fois par une infirmière qui apporte sur l'endos d'une feuille ayant déjà servie à autre chose (c'est la réalité des archives dans un pays comme Ayiti), une liste où sont inscrits le nom, sexe et âge d'une dizaine de patients. Dudley m'explique que ce sont des orphelins qu'on amène sur le bateau-hôpital que les américains ont stationné dans la baie de PAP. Je ne me souviens pas des noms, j'ai été attiré par la colonne âge : 2 mois, 6 ans, 3 ans, 10 ans, 2 semaines, 8 mois, … En retenant son souffle, il autorise le transfert de ses enfants nouvellement sans parents. Quinze minutes plus tard, la même personne revient. Même genre de liste, ceux-là seront transférés vers l'UNICEF qui a la responsabilité de gérer les adoptions. Plus un son ne sortira de ma bouche pour le reste de la rencontre… J'envoie un SMS à ma blonde : "Je n'en peux plus, on adopte !" On se parlera rapidement et l'émotion aura pris quelques jours à être maîtrisée.

6 commentaires:

framboise a dit…

bonjour
vous nous tiendrez au courant
moi je voudrai parreiner et hesite entre plusieurs associations ,en connaissez vous sur place plus "actives" que d'autres
merci encore pour votre blog

Marico Renaud a dit…

Je suis dans le même questionnement que Framboise et prête aussi à parrainer, mais que ce soit vraiment utilisé pour les enfants et ceux qui en prennent soin.
Avez-vous des suggestions? Je suis certaine que bien des gens se posent les mêmes questions.

Franky a dit…

Jean-François, je te lis depuis le début...et j'ai mal...tellement...et malgré les sous donnés et redonnés..on se sent tellement impuissant...je disais à Josée il y a pas si longtemps...si j'étais plus jeune...j'adopterais...j'irais...mais ...je t'admire ainsi que Johanne d'être restés..là..malgré tout...et surtout..de continuer votre mission...samedi, ns irons enterrez Roger qui avait lui aussi à coeur ces missions...Ton ancienne collègue...F

Une femme libre a dit…

Ironique que l'Unicef, qui est contre l'adoption, soit l'organisme qui gère les adoptions!

Une femme libre a dit…

Pour parrainer, il y a Soleil des nations en qui j'ai confiance. Je parraine depuis peu une petite fille par leur entremise. La responsable du parrainage, qui connaît bien Haïti, a un blogue: Mamounia "http://secretmom.canalblog.com"

André PAILLÉ a dit…

Vos Photos sont exceptionnelles. WOW
Et en plus accompagnées d'un texte qui porte à réfléchir.
Continuez, Bravo

André Paillé