Dans mes petites activités extra-professionnelles, il y a un petit bonhomme dans le milieu de l’adolescence que j’aide à trouver tous les papiers nécessaires pour qu’il puisse quitter pour un pays ami. Disons que le tremblement de terre lui a fauché plus que sa maison et qu’une tante qui vit dans ce pays ami, travaille à le prendre sous son aile. Pour la tente, il l’a déjà ici… Je donnais des coups de pouce un peu éparses depuis quelques mois et j’ai décidé de prendre le taureau par les cornes il y a quelques semaines. L’intérêt de prendre un taureau par les cornes, ce sont les cornes. Dans la perspective où elles sont identifiables et que tu puisses réellement les agripper et, on ne sait jamais, donner au taureau une autre allure. Disons simplement que le ti-cul a besoin d’un certificat de naissance et de l’extrait d’archives qui y est associé. Même si je parle français, j’ai eu besoin de beaucoup d’explications. Il y a quelques années, le gouvernement haïtien a compris que les certificats de naissances en circulation n’avaient pas une grande valeur. On en faisait un peu n’importe où, par n’importe qui, des copies et des originaux circulaient un peu partout. Pour régler le problème, on a proposé la constitution d’une étape supplémentaire, c’est-à-dire l’équivalent d’un jugement qui détermine l’authenticité du certificat de naissance. Cette authenticité est confirmée par un ‘extrait d’archives’. Il faut donc à l’ado le certificat de naissance et l’extrait d’archive. On attend donc cet extrait d’archive depuis des mois. En prenant le taureau par les cornes, j’ai donc poussé un peu la machine publique de cet Ayiti chéri. En fait, je suis arrivé à trouver l’avocat qui avait le dossier sur son bureau. Cet avocat complète un grand registre avec tous les certificats de naissances qui lui tombent sous la main (probablement près de 1000 dans un registre). Trois ou quatre fois par année, quand le cahier est plein (!!), il doit acheminer ce registre (qui comprend en fait l’extrait du jugement qui valide le certificat de naissance) au Ministère qui lui, après avoir validé le registre, le fait parvenir aux Archives nationales. Je me présente donc au bureau de l’avocat en question la semaine dernière qui me dit que je devrais revenir cette semaine, son registre est presque plein et il devra donc l’envoyer au Ministère. J’y retourne hier midi et coup de chance, le registre est prêt à partir mais … pas de bagnole. « Je peux le mettre dans la mienne si vous le souhaitez. » Heureux de ma proposition, il me donne rendez-vous ce matin pour que je puisse transporter le fameux registre bleu et son accompagnateur, un coursier du Ministère. Bonne nouvelle, tout le monde est à l’heure ce matin et on pourra partir.
- Je fais quoi quand le tout est rendu au Ministère ?
- Un des directeurs du Ministère doit le valider avant de l’acheminer aux Archives, à partir de ce moment là, vous pourrez mettre la main sur votre extrait.
- Ça veut dire combien de temps ?
- Combien il y a de lettre dans éternité ? 8 !
- Vous parlez de 8 jours, 8 semaines, 8 mois, 8 années ?
- Non, pas 8 années quand même…
- Qu’est-ce que je peux faire pour bouger les choses ?
- Vous pouvez convaincre le directeur de signer le registre directement sur place et vous rendre directement aux Archives nationales. Si vous êtes chanceux, vous aurez votre extrait aujourd’hui.
You bet !! Embarque dans la machine avec le registre bleu et l’accompagnateur, on fait un bon 3 minutes de voiture pour arriver au Ministère. J’entre avec le messager sous la tente qui sert d’abris aux fonctionnaires depuis bagay la. Discute avec le directeur en question qui accepte de faire vite, mais qui me demande en échange d’apporter aux Archives nationales les autres registres qui sont dans son classeur. Pa gen pwoblem !! Il ouvre le classeur, ils sont une quarantaine à attendre. Le plus vieux que j’ai vu passé concernait le registre des mariages de Léogane, 2002… Dans un cahier, il prend en note le détail des 40 registres et signe la liste. Mon livre bleu commence à se perdre dans la pile. Les 40 registres et la liste sont envoyés sur le bureau du voisin, le fonctionnaire voisin vérifie la liste et signe lui aussi. Je ne vous niaise pas, mais la liste a été vérifiée et contresignée 4 fois et surtout, j’ai perdu la trace visuelle de mon registre bleu. Après plus d‘une heure et avec deux accompagnateurs cette fois-ci, on se rend à la voiture les bras bondés de registre. 30 minutes plus tard, c’est enfin l’arrivée aux Archives nationales. Avec l’expérience, je ne crois pas encore que le moment de chance de l’ado est arrivé. Débarque la cargaison aux Archives où tout le monde se demande ce que fait un blanc avec tous ces registres dans les bras. On recommence le comptage et la validation de la liste jusqu’à ce qu’on arrive à mon fameux bouquin bleu. Le fonctionnaire le paraphe avant que je l’amène à une femme qui le saisit sur un ordinateur. Il ne reste que la signature du directeur des Archives qui … n’est pas là !!! « Il devrait revenir vers 16h00 aujourd’hui, revenez demain et vous pourrez avoir l’extrait. » J’y retourne demain mais je n’ai pas une grande confiance quant à la capacité des Archives de retrouver rapidement mon petit livre bleu.
3 commentaires:
Nous te reconnaissons bien là JF, pour ta gerntillesse, ton aide envers les autres, tu es admirable.
J'espère que cet extrait sera vite signé pour ce Timoun, les archives nous en gardons bien des souvenirs.
Pensons bien à vous deux et espèrons avoir un petit mail un jour prochain
Bisous
Marie Monise Philippe
À suivre... J'ai hâte de connaître le résultat de ton odyssée!
Moi aussi, je n'en puis plus, ne nous fais pas languir!
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