mercredi 26 mai 2010

N'importe quoi !


Les manifestations se multiplient depuis quelques semaines. Certains événements soufflent sur le feu, question de le maintenir en vie, ou pire, de lui donner l'allure nécessaire à un incendie. La MINUSTAH est intervenue un peu fort lundi auprès d'un groupe d'étudiants de l'Université d'État. Les excuses publiques de l'ONU n'ont pas calmé les troupes. Un des étudiants impliqués expliquait aujourd'hui à la radio que cette présence internationale correspondait à une occupation de même nature que la tentative napoléonienne qui a suivi la révolution… Les ayisien ont le sens de l'histoire. L'enjeu de communication est ici très intéressant au plan des joutes politiques, les ayisien étant des artistes du discours. Chez nous, les spécialistes des communications se battent continuellement avec les 'discoureurs' pour qu'ils arrêtent de s'éparpiller et se concentrent sur le lead, le message clé. Celui que les gens devront retenir. À écouter les organisateurs, on comprends qu'ils ne peuvent se payer de spécialistes en communication pour les aider à peaufiner le message. À moins que ce ne soit pas une question de ressource, mais une dimension culturelle complètement opposée aux techniques de communication de masse dites 'modernes'. Un des organisateurs de la manifestation nous a fait lors d'une conférence de presse la nomenclature des 9 demandes de son groupe. Tant qu'elles ne seront pas comblées, on rempilera les rues et brulera des pneus ou des carcasses de voitures : Le départ de Préval, le renvoi des membres du Conseil électoral provisoire, le retour d'Aristide, le dédommagement pour les employés de la Téléco, la suspension des mesures d'urgence (la loi sur les 18 mois), la dislocation du Comité intérimaire sur la reconstruction d'Haïti, le départ de la MINUSTAH, la distribution d'abris temporaire à tous les sinistrés et la création d'emplois. Je m'attendais à entendre quelque chose sur la déforestation tant q'à défiler une telle liste d'épicerie, mais le niveau de préoccupation est ailleurs. Il devient difficile de suivre ces manifestations et les débordements qui y sont associés, et de penser que la démarche s'appuie sur quelque chose de sérieux. On a vite le sentiment que ces revendications deviennent le prétexte pour quelques personnes (ils ne sont jamais très nombreux dans les rues à manifester, au plus 1000 personnes selon les journaux) de maintenir un climat d'instabilité politique. 'Ça profite à qui tu penses ?' me lançait un collègue haïtien. Il y a cette idée ici que des politiciens soutiennent financièrement des gens pour entretenir le chaos et laisser l'impression à tous qu'on serait politiquement sur le bord du gouffre. La grève des étudiants de la faculté de médecine qui dure maintenant depuis plus d'un an serait elle aussi encouragée par quelques personnes bien placées… Effectivement, c'est n'importe quoi !

1 commentaire:

Marico Renaud a dit…

Frustrant, décourageant!
J'ai une admiration sans borne pour tous ceux qui continuent à oeuvrer dans ce bordel, et de la compassion pour "le petit peuple" qui se démerde pour survivre pendant que les belles grandes gueules se font aller et que les politiciens complotent!
Haïti est encore très présent dans nos médias, surtout la télé de Radio-Can.
Bon courage!